La grandeConversationdeBarcelone

Le mercredi 22 juillet 1998, de 10h à 13h 30 et de 16h à 20h au Palais des Congrès, salle Gaudi

 


TabledesMatières

 

lever de rideau

  I. - Accueil

  II. - Rapport de l’ECF

 III. - Réponses de Florencia Dassen

 IV. - Réponses de Pierre-Gilles Guéguen

 

premiere partie

I. - Ouverture

II. - Gennie Lemoine

III.  - Antonio Quinet, Celso Renno Lima, Ricardo Seldes, François Leguil, Sonia Alberti, Marie-Jean Sauret, Guy Briole,Pierre-Gilles Guéguen 

IV. Colette Chouraqui-Sepel, Marie-Hélène Brousse, Roseane Murray Barros, Yasmine Grasser, Jacques-Alain Miller, Bernardino Horne, Ricardo Seldes, Maria Anita Carneiro Ribeiro, Gleuza Salomon 

V. - Carmen Gallano, Bernard This, Ropo, Franz Kaltenbeck, Graça Pamplona, Marc Strauss, Marie-Hélène Brousse, Graça Pamplona, Jean-Pierre Klotz, Vera Pollo, Rainer Melo, François Leguil, Jorge Forbes

 

Deuxième partie

I. - Ouverture

II. - Jacques-Alain Miller

III. - Celso Renno Lima, German Garcia, Lilia Mahjoub, Colette Soler, Pierre-Gilles Gueguen

IV. - Jacques-Alain Miller, Antonio Vicens

V. - Dominique Miller, Eric Laurent, Luis Izcovich, Antonio Di Ciaccia, Marcus André Veira, Juan Carlos Indart

VI. - Manoel Barros da Motta, Rose-Paule Vinciguerra, Alexandre Stevens, José Rambeau, Danièle Silvestre, Pierre Skriabine

VII. - Pierre Bruno, Bernard Lecoeur, Gabriel Lombardi, Colette Soler, Sérgio Laia, Jacques-Alain Miller

 

texte établi par

fabienne henry et michel jolibois

avec la collaboration de Marcela Antelo, Hilario Cid Vivas, et J.A. Miller

 


lever de rideau

 

 

I. -Accueil

 

Jacques-Alain Miller - J’appelle à la tribune les AE.

            Nous allons commencer notre Grande Conversation, dont le déroulement va être légèrement plus complexe que prévu.

             Il y a, d’une part, la thématique informelle mais annoncée de la Grande Conversation. Il y a d’autre part, la prise de parole prévue des présidents des Écoles pour résumer brièvement le déroulement des débats dans les cinq salles simultanées d’hier après-midi à propos des rapport de chaque École. Il y a, troisièmement, ce que je m’étais permis de prévoir dans le déroulement de la Conversation, à savoir des petites pauses, pour que, si besoin est, on se calme en écoutant le texte de grands écrivains de la littérature française, espagnole, allemande — je n’en ai fait la sélection qu’au dernier moment. Et il faudra donc manier ces trois fils pour tisser notre trame.

            Gennie m’a dit avoir préparé un texte concernant le premier point de la thématique, c’est-à-dire le lien. Avez-vous envie de le dire maintenant, ou voulez-vous le dire un peu plus tard?

 

Gennie Lemoine - A propos des AE, il me semble que ça ne s’impose pas, mais je ferai ce que l’on veut.

 

Jacques-Alain Miller - Nous avons d’abord à terminer la séquence d’hier matin, et il est également prévu une prise de parole des présidents. Je me permettrai d’insister auprès des présidents sur le point suivant, c’est qu’ils soient brefs, puisqu’il s’agit de résumer. Ils sont cinq, et s’ils veulent bien résumer les débats d’hier en cinq minutes, on peut compter que cela ne prendra qu’une demi-heure sur la durée de la Conversation. Ils me permettront de ne pas les aligner à la file, mais de faire appel à eux comme pour une certaine scansion des débats s’ajoutant à la scansion des textes classiques - puisqu’il n’y a pas de raison d’y déroger.

            Gennie, si vous avez envie de parler maintenant, vous le pouvez.

 

Gennie Lemoine - Sûrement pas.

 

Jacques-Alain Miller - Alors peut-être puis-je inviter le premier des présidents, par l’ordre d’ancienneté des Ecoles, à nous donner son résumé de cinq minutes, après quoi nous poursuivrons la série des réponses des AE en commençant, comme il était prévu hier, par Florencia Dassen et Pierre-Gilles Guéguen. Donc, Guy Briole, président de l’ECF, pour un résumé de cinq minutes des débats de la salle hier après-midi.

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II. - Rapport de l’ECF

 

Guy Briole  - Je vais essayer d’être assez bref. L’École de la Cause freudienne avait choisi comme titre de son rapport “ La passe et les destins psychanalytiques du symptôme ”. Elle avait pris l’option de confier, pour la première fois, la conception et la réalisation de son rapport à une de ses ACF, l’ACF-Aquitania. C’est donc le Président de cette Section, qui a coordonné, animé et réalisé le document, à partir duquel nous avons discuté hier et avec un intérêt toujours soutenu. Il faut bien dire que le travail des équipes critiques de chaque École y a été pour beaucoup. Et cette formule nouvelle s’est révélée très pertinente, tout comme d’ailleurs la participation constante des collègues présents dans la salle a été importante.

            Donc de très nombreuses questions ont été posées sur la passe, dans ses incidences cliniques, épistémiques et politiques. La matinée d’hier avec des exposés des AE a été très présente dans tout notre débat.

            Dans la dimension clinique, retenons trois points de la discussion : le symptôme comme métaphore et le symptôme comme noeud ; le déplacement pour la fin d’analyse du fantasme au symptôme, avec même le terme avancé de “ construction du symptôme ” ; l’identification au symptôme, qui a été le point le plus discuté et pour lequel Philippe La Sagna a fait valoir le traitement du Un par la lettre.

            Dans les aspects épistémiques, plus que sur le savoir accumulatif, il a surtout été invité à insister sur la question d’un savoir sur le réel. Et un échange très important a eu lieu sur “ l’amour du réel ”, qui est une formule qu’avait avancée Virginio Baïo. Mais sur les textes de Lacan, tout comme d’ailleurs sur les élaborations des AE, Pierre Naveau a fait valoir qu’il n’était pas possible d’extraire, du contexte et du travail de ceux qui les avaient produites, un certain nombre de phrases ou un certain nombre de formules, ce qui amenait à leur donner plutôt une dimension confuse là où ils exprimaient davantage le tranchant de la transmission d’un AE.

            La dimension politique a été abordée par chaque équipe critique. Il a été parlé notamment de la passe comme symptôme de l’École ou des Écoles, de la responsabilité des cartels de la passe dans la nomination des AE, dans la nomination aussi des membres pour la passe à l’entrée des Écoles, mais aussi la responsabilité des cartels de la passe dans l’élaboration de savoir à partir des témoignages qu’ils reçoivent dans les passes.

            Trois points ont été plus clairement précisés.

            Tout d’abord la passe au principe de la constitution même d’une École. C’est le cas par exemple actuellement de l’École Brésilienne de Psychanalyse. Antonio Quinet a donc aussi fait valoir que, en plus des critères cliniques, des critères politiques étaient importants dans la passe, en soulignant que celle-ci n’était pas à l’abri de la politique institutionnelle. En effet, cette dimension politique de la passe doit être considérée aussi comme un pari, un pari fait à partir de la passe pour l’entrée au un par un dans une Ecole. Et d’ailleurs il faut bien dire qu’un accord s’est fait sur ce point.

            Le deuxième point qui a été particulièrement discuté, c’est celui du gradus et de la hiérarchie. Cette question a été soulevée particulièrement à partir d’une intervention de Luis Izcovich, et d’une controverse donnée par Marie-Hélène Brousse. Luis Izcovich avait entendu que Hilario Cid déduisait le trait clinique à partir du trait politique. D’autres avaient entendu le contraire, donc que Hilario Cid déduisait le trait politique du trait clinique, et que c’était ça l’orientation de son exposé. Ainsi, Marie-Hélène Brousse a particulièrement fait valoir cette disjonction entre la position hiérarchique et la nomination par les cartels de la passe. Elle a également souligné que, comme dans l’exposé de Hilario Cid, ce qui était en question comme moment politique dans les passes, était surtout à prendre comme moment particulier de la cure de chacun, dans sa singularité.

            Enfin, un troisième point a été débattu à partir de la question de l’extime, de son importance pour la nomination des AE dans les différentes Écoles : comment ces extimes étaient désignés, comment fonctionnaient-ils? Mais peut-être laisserai-je le soin à Luis Erneta, s’il est là et s’il le veut bien, de développer ce point, car sa contribution dans notre discussion a été tout à fait importante, notamment dans son témoignage comme le plus-un de l’un des cartels de la passe de l’EOL.

 

Jacques-Alain Miller - Luis Erneta n’est pas encore arrivé.

 

Guy Briole - Je pourrais dire trois points au moins de son exposé, il les précisera peut-être tout à l’heure : la contingence de la désignation, l’impératif que l’extime soit extérieur à l’École dans laquelle cet extime intervient auprès des cartels de la passe, et enfin, la relation de confiance entre les Écoles qui est au principe même de l’extime.

 

Jacques-Alain Miller - Merci, Guy Briole, de ce résumé et de sa concision. Je rappelle aux quatre autres présidents que j’aimerais également pouvoir les féliciter après leur résumé pour leur concision. Nous poursuivons avec les réponses des AE aux réponses qui leur ont été adressées individuellement, et je rappelle qu’il y a une grande question à laquelle ils voudront bien répondre ensuite rapidement, sur les rapports de la passe et de la politique, et de la passe et de l’enseignement. Je donne la parole à Florencia Dassen puis à Pierre-Gilles Guéguen pour répondre aux questions qui leur ont été adressées personnellement hier.

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III. - Réponses de Florencia Dassen

 

Florencia Dassen - Hay dos preguntas, una de Pierre Naveau y otra de Sagrario García que se refieren directamente a puntos de mi testimonio. La de Pierre Naveau es una pregunta que dice: “¿Qué es lo que ha hecho que usted haya cesado de estar ciega, una interpretación del analista, su experiencia ha sido de golpe o ha sido progresivo?”

Bien. El punto clave del análisis donde se inscribe el sexo de la posición de enceguecida fue un momento de realización del fantasma que se inscribe como una forma de pasaje al acto, momento de bisagra en el análisis, que permite colocarlo, el fin de la elaboración de un duelo Y en esa prisa de la pulsión, del pasaje al acto, hay entonces ahí una dimensión de lo que es de golpe, fulgurante. Lo que no lo es, es decir que implica lo que se agudiza como progresivo, es la elaboración de saber, que sigue como la lógica del resto de su pasaje al acto, como localización lógica del real que emerge de allí. Es en este sentido que hay algo tanto del matiz de lo de la prisa como de una elaboración de saber que no tenga prisa.

La pregunta de Sagrario García es, si he entendido bien, si la separación del analista se produce en el pase. Sí, efectivamente, yo inscribo el momento del pase como diferente del análisis, diferente a la salida efectiva de la transferencia, y la conclusión del análisis como separación auténtica de la presencia del analista se produce en el pase. Aquí lo importante, como distinto del caso anterior, de la salida efectiva de la transferencia, es que el pase es el primer espacio para mí, donde se pone en acto la posibilidad de comenzar a alojar en el Otro el resto de imposible al que llegué por el análisis. En ese momento aún no había un saber hacer con ese imposible con el Otro, sino más bien en una posición de disyunción, de ampliación de ciertas cotas de separación drástica del Otro y no poder alojar suficientemente su inconsciente en el Otro. Esto es descripto como primer momento en relación al Otro de la Escuela en el dispositivo del pase.

Hay una pregunta anónima, pero muy importante, porque se inscribe en uno de los ejes fundamentales en los que estamos discutiendo actualmente la vida social y la de la AMP. Es una pregunta que dice así: “¿Cómo una comunidad analítica puede orientarse a partir de una asociación infinita de palabras de excepción suplementarias, aquello a lo que conduce la experiencia del pase? ¿Cómo articular estas palabras de excepción con una política que sea política de conjunto?” Bien. Aquí lo que podría diferenciar es justamente una política de conjunto que se funde en el conjunto como conjunto cerrado, que se funda en el elemento que excluye el conjunto, de una política que se funde en la lógica de las leyes, no por lo tanto en el conjunto como un todo cerrado sino como imposible de cerrar. Allí, entonces, se produce una tensión bien diversa de la que se produce en la lógica del conjunto como todo, en tanto allí el Uno de la serie sería el Uno que en rigor soportaría que cada vez se agreguen nuevas excepciones y cuya relación a la comunidad como idea de conjunto implica una política institucional que está en relación a un real que no puede no compartirse, que es el real mismo que se deduce de la teorización de Lacan y Freud del psicoanálisis, del real del inconsciente. Bien, esto es para seguir conversando, pues es una pregunta muy importante.

            Ahora una pregunta de Gabriel Lombardi. La voy a leer: “¿Que puede decir en tanto AE que ha atravesado la experiencia del pase, de la función de la doctrina psicoanalítica como marco paradigmático (fantasma) donde se inscribe su testimonio? ¿No resulta de ahí una limitación fuerte para la invención de un saber lateral que conmueva, sacuda, transforme esta teoría?”. Bien. Por un lado la pregunta dice “nuestra teoría”. Efectivamente es el punto más importante para poder tener una relación de reformulación, de conmoción, de sacudida, de transformar una relación, de transformación, de reformulación de la teoría que permita que tengamos un marco común, por eso nuestra teoría es la condición de mínima para poder revisar esa transformación. Esa transformación nunca se puede hacer de cero, de invención en relación a la teoría sino de reinvención a partir siempre de un resto aún en una serie de genealogías particulares en las que cada uno inscriba sus transferencia de trabajo. Pero por otro lado la pregunta inscribe un límite. El que la teoría misma, en tanto fantasma, se produce como límite a esa transformación.

            Por último las preguntas que están formuladas a toda la mesa se refieren a la responsabilidad política del AE a la articulación de la enseñanza y el testimonio a la clínica, ciencia y política. A mí me parece que de la intervención de Jacques-Alain Miller en el Colegio del Pase en la Escuela de la Causa se desprende la importancia de tratar como nudo la clínica, la ciencia y la política y no únicamente quedarse en el par de la clínica versus la política. Se produce, me parece, a veces, una desviación entre lo que tiene de más apolítico el testimonio de cada AE como aquello que tiene que ver con su resto de goce, que no se presta a poder ser fácilmente alojado en el Otro de la pluralidad de los analistas como dimensión política, y a su vez queda separadamente del sesgo de la política únicamente reducida entonces a, simplemente, el agrupamiento del conjunto de los analistas, degradada, por lo tanto, no en una política como política del psicoanálisis, referida a un real del psicoanálisis, sino simplemente como formas diversas de poner en juego acciones de finalidades política que se refieran a intereses particulares. Aquí lo importante, por lo tanto, es entender que el punto que se refiere a la ciencia es el único punto de toque de lo real que hace que justamente tanto en la clínica como en la política refieran a ese real que los anuda. Por lo tanto el real, incurable de cada AE se traduce como causa de una transmisión en el seno de la Escuela, en la pluralidad de los analistas pero no separadamente una cosa de la otra, porque si no, queda reducida la clínica únicamente arrojada a una lógica intimista de lo privado, y la política únicamente a una dimensión de lo público y no de una política del síntoma como política del psicoanálisis. La responsabilidad política del AE es la de hacer Escuela. Cualquier forma de uso del síntoma que hace cada AE, que atente contra la Escuela, -y eso además hay que constatarlo, porque puede haber falsas evidencias allí-, no es, por lo tanto, en tanto Analista de la Escuela, está haciendo uso de esa nominación, y fundamentalmente creo que allí lo que hay que localizar es que el Analista de la Escuela tiene como función la hiperrelación de lo que se presente contingentemente ante cada acontecimiento en la realidad de su vida asociativa que le concierna y localice este real en juego en función de la transferencia, para reabrir la transferencia en lo que esta tiene de función de saber y de deseo. Cualquier forma de síntoma del AE que más bien vuelva caduco el deseo, para mí, entonces, allí no es en tanto AE que está ejerciendo su responsabilidad política.

 

Jacques-Alain Miller - Merci à Florencia Dassen. Avant de donner la parole à Pierre-Gilles Guéguen, je demande aux AE de tenir compte du fait que leurs réponses ne sont qu’une partie seulement du programme de la journée. Je sais que Pierre-Gilles Guéguen a reçu beaucoup de questions.

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IV. - Réponses de Pierre-Gilles Guéguen

 

Pierre-Gilles Guéguen  - De German Garcia : A partir de Wittgenstein, il pose trois questions : premièrement “ Que fait-on quand on dit ? ”, deuxièmement “ Quelles sont les conditions de vérité d’une proposition ? ”, troisièmement : “ Comment le langage fait-il médiation entre des états mentaux et des choses du monde? ”.

            On reconnaît là le style de German Garcia, qui nous fait partir à un très haut niveau. Mais je pense que cette question est très bien venue comme point de départ puisque ça permet sans doute de distinguer deux positions : la position du psychotique dans le monde, celle qui au fond s’appuie sur des règles qui tentent de constituer le monde et de tisser sur lui une toile signifiante qui permet de lui donner une dimension stable, et d’opposer, cette tentative à celle du névrosé qui entre dans le processus de l’analyse, avec la possibilité d’effectuer une réduction. Cette opération porte sur la jouissance qui envahit tous les domaines de son monde, pour l’amener à un point central qui sera le point de passe. Dans cette opération on peut effectivement dire qu’il ne s’agit pas de décrire le monde, mais plutôt de réduire la jouissance à un point précis, à partir duquel peut se faire la passe de l’analysant.

            German Garcia prend les choses par le problème central: celui de la fonction du langage dans la psychanalyse. A partir du moment où nous parlons avec Lacan du sens-joui, le langage lui-même, qui apparaissait dans un premier temps comme le Symbolique pur, avec son effet mortifiant sur la jouissance, se trouve, lui aussi, infiltré de jouissance. Et donc la sortie de l’analyse ne peut plus se faire simplement par le pointage de ce qu’est pour un sujet la fonction du père comme corrélative de la nomination, mais nécessite aussi qu’un acte, au-delà du père, puisse avoir lieu pour toucher le sens-joui qui s’est infiltré dans l’expérience même de la cure. Et c’est de cela qu’il s’agit précisément de pouvoir se déprendre, me semble-t-il, à la fin d’une analyse afin de pouvoir passer au-delà du père.

            Une question de Claudine Bonjour soulève ce thème : “ Le symptôme moins le fantasme = le sinthome ; et le sinthome = se passer du père à condition de s’en servir. Etes-vous d’accord avec ces équivalences ou ces déductions? ”.

            Je suis d’accord, je vais essayer de le montrer. Je voudrais simplement ajouter une chose : se passer du père à condition de s’en servir c’est aussi d’abord s’en servir pour pouvoir s’en passer. Je ne pense pas qu’il y ait une analyse qui puisse se faire en se passant du traitement de la question paternelle, c’est pourquoi Lacan avait dans un premier temps centré le point d’Archimède de la psychanalyse autour du Nom-du-Père, et c’est pourquoi aussi il va essayer de diffracter ce nom et introduire d’autres considérations autour de cette question.

            Il me semble qu’au fond, pour répondre peut-être déjà par avance à une question que m’a posée Philippe La Sagna sur laquelle je reviendrai, ce qui reste à la fin d’une analyse c’est effectivement quelque chose qu’on pourrait qualifier de S1, d’Un, mais aussi un noyau de jouissance soit quelque chose qui tient au symbolique, c’est S1 chu sous la barre, mais aussi petit a, c’est-à-dire un point où s’intensifie à la fois un noyau de jouissance où s’ombilique le cœur du symbolique. C’est ainsi que je me représente ce que Lacan a désigné dans les années 70 comme la Lettre. Evidemment c’est tout à fait essentiel de pouvoir cerner ce point-là, ce point auquel se réduit finalement la jouissance de l’analysant et où se trouve son nom de jouissance.

            C’est un point qui concentre beaucoup de choses, et où se rassemblent éventuellement tout l’amour et toute la haine possibles, un point qui effectivement correspond au premier et au dernier mot du discours, et où Lacan situe l’insulte. Il ne faut pas reculer devant ça. Si on fait de la psychanalyse on parle de choses terribles, on parle de la mort, du sexe, de la violence. Et je crois qu’il ne faut pas s’effaroucher devant cette dimension qui est peut-être de nos jours préservée seulement dans la psychanalyse : la dimension du tragique de la destinée humaine.

            Question de Kathy Langelez : “ Pourriez-vous développer ce que vous avez avancé à propos de l’éthique de l’analyse, qui après l’au-delà du père peut être soutenu par l’analysant et l’analyste? Il y aurait donc un moment de bascule dans une cure où la position de l’analyste change, c’est-à-dire il ne serait plus seul à avoir en charge la direction de la cure mais où celle-ci serait aussi en partie à la charge de l’analysant. ” Il y a plusieurs questions en une/ Je pense qu’à partir du moment où l’au-delà de l’Oedipe se profile dans la cure, la responsabilité qui était d’abord unilatéralisée dans l’Autre devient aussi celle de l’analysant. Je pense qu’effectivement l’analysant, au fur et à mesure que sa cure se déroule, devient responsable de son orientation éthique, sur laquelle l’analyste ne peut plus forcément intervenir. Si nous disons “ l’Autre n’existe pas ”, il nous faut considérer également qu’il doit y avoir à la fin d’une cure, un point de rebroussement. Geneviève Morel en parlait hier, elle parlait de la responsabilité singulière de chacun quand il est devenu AE. Eh bien! cette responsabilité singulière commence au fur et à mesure que le lien à l’Autre se défait dans la cure , au fur et à mesure où que se dévoile que l’Autre n’existe pas.

            La question de Marie-Odile Wartel touche aussi à ce point, elle parle du père mort, du père qui n’existe pas : le père idéal, comme moi en tout cas j’ai pu l’appréhender dans la cure avec cette exigence d’un père qui soit un père médecin, un père guérisseur, c’est aussi une manière de figer la demande adressée au père, une façon d’en faire un père mort. Le père qui n’existe pas, l’Autre qui n’existe pas, demande bien autre chose. A partir du moment où l’Autre n’existe pas s’introduit une dimension politique dans la cure, parce qu’en effet le sujet doit faire des paris : il doit faire des paris sur l’endroit du monde où il peut trouver, du point de vue épistémique, ce qu’est la psychanalyse, dans notre monde ,aujourd’hui. Et là je dis que c’est un virage politique parce que, à mon sens, c’est l’épistémique qui de ce point de vue dirige le politique. Une cure, c’est ça, c’est trouver le relais dans le monde où la politique de la psychanalyse sera le plus proche possible de sa dimension, que Lacan à la suite de Freud a tant rêvée comme scientifique, et qui en effet sans être scientifique, est de l’ordre de l’épistémique, du transmissible. Et donc d’emblée, dans la cure, dès la fin de la cure, la dimension épistémique, la dimension clinique et la dimension politique, sont absolument nouées. Et c’est pourquoi je pense, je souhaite en tout cas, qu’il n’y ait pas plusieurs psychanalyses, je crois qu’il n’y en a qu’une, et que donc nous sommes tous convoqués à essayer de la faire exister mais aussi à tenter de repérer ceux qui, dans ce domaine, sont peut-être les plus avancés pour qu’ils nous ouvrent la voie et nous permettent de les suivre.

            Guy Trobas me pose une question : “ Vers la fin de ton témoignage, tu as, il me semble, mis en jeu l’articulation entre le dégagement de la pulsion et l’exigence de savoir chez le sujet en question. Peux-tu en dire un peu plus sur cette articulation plutôt cruciale et particulière à chacun en fin de cure? ”.

             Je veux bien essayer d’en dire un peu plus : Il m’a fallu consentir au fait qu’il y avait une fixation de jouissance, à laquelle je ne trouverais jamais de raison. Pourquoi ne trouve-t-on jamais une raison dernière? Cela veut dire que le savoir ne dit pas tout. Et là effectivement, là où le savoir ne dit pas tout, ce qui prend le relais, peut se désigner de différentes manières. On peut dire “ C’est la pulsion ”, je l’ai dit comme ça. Michael Turnheim, dans un article qu’a cité Anne Dunand, qui a été publié dans la dernière Lettre Mensuelle, - je peux le citer parce que c’est un article qui est fait avec tellement de précision, de tact, mais qui ne laisse pas de doute sur ce dont il s’agit, étant donné les coordonnées de sa parution -, donc c’est un article qui concerne deux rêves que j’avais faits, il les analyse avec une précision remarquable pour montrer comment à un moment, il peut déduire du texte du rêve, point où le savoir ne répond plus, quelque chose que lui qualifie “ d’impossible à dire ” ; c’est là ce que j’ai essayé de nommer en utilisant le terme freudien de pulsion.

            Une question de Jean-Louis Gault, qui est une prise de position aussi, donc je lui laisse la part de sa prise de position et je prendrai la mienne, sa question porte sur : croire au père mort, croire au père jouisseur, croire à la guérison sont, au-delà des incidences cliniques des incidences véritablement politiques. Je crois y avoir déjà un peu répondu, on y répondra encore davantage encore dans la suite.

            Une question aussi de Philippe La Sagna sur l’exception. J’ai parlé en effet d’exclu et je l’ai opposé à l’exception. L’exclu est celui qui est seul contre tous, il y a l’ensemble et puis il y a celui qui irait tout seul. L’exception quand on parle des AE, est un terme à prendre avec précaution. Je pense que si l’AE est effectivement singulier, s’il peut avoir ou s’il lui est offert de prendre une parole qui soit une parole singulière, c’est au sens de celui qui est à la fois hors de l’ensemble et qui est aussi un des éléments de l’ensemble. Ce n’est pas du tout une exception du même ordre que celle de l’exclu dont j’avais parlé dans mon témoignage.

            Une question d’Alain Merlet, il m’excusera de ne pas y répondre immédiatement.

            Je voudrais pour terminer évoquer un commentaire de Lilia Mahjoub, que j’ai trouvé extrêmement précis. Elle dit qu’elle a apprécié mon exposé, je l’en remercie beaucoup. Elle y souligne quatre points : l’exigence de la guérison, soit le symptôme comme demande ; le rêve, soit l’inconscient interprète selon la formule de Jacques-Alain Miller ; l’acting out, soit le défaut, le manque de l’interprétation ; l’acte, soit l’être exclu décide de sa jouissance pulsionnelle, ou encore possible, ou encore le mariage impossible de l’être avec l’objet. Je souscris à sa lecture ;

            Enfin, je me suis demandé si j’allais évoquer ce petit papier, il me touche profondément. Je vais quand même le lire, parce qu’au fond il a été écrit pour arriver à cette tribune : “ Vous avez fait la démonstration en acte de l’authenticité de votre passe et de votre analyse. La rigueur de votre exposé fait preuve. Vous m’avez touché. ” C’est signé Guy Clastres. Et je dois dire, je suis très ému, Il y a une chose à laquelle je tiens beaucoup, c’est qu’on me témoigne que ce que j’ai dit a pu être vivant.

 

Jacques-Alain Miller - Merci, Pierre-Gilles Guéguen. Voilà, en une heure, nous avons pu entendre un président et deux AE. Je propose que dans la trame complexe que constitue cette Conversation nous passions maintenant à la Conversation proprement dite. Nous reviendrons ensuite aux présidents, puis aux AE un peu plus tard, en commençant par Marie-Annick Gobert et Anibal Leserre.

 

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La Grande Conversation de Barcelone

 

*******

 

premiere partie

 

I. -Ouverture

 

Jacques-Alain Miller - La Conversation n’a pas vraiment de programme. C’est la liberté de parole, la liberté d’expression - entre guillemets.

             Je mets des guillemets à liberté d’expression d’abord parce que c’est une expression qui ne plaît pas à beaucoup, et qui en effet n’est pas née dans notre discours, n’est pas prise dans nos coordonnées. La liberté n’est pas une fonction que nous situons dans notre champ. Mais je ne mets pas des guillemets à liberté d’expression parce que je suis contre la liberté d’expression. Je suis pour! Et je suis pour, disons - c’est la formule que j’avais trouvée, à l’emporte-pièce -, pour augmenter la puissance de parler et de communiquer de chacun des membres de l’Association dont je suis actuellement le délégué général. La Conversation, celle-ci comme toutes celles qui ont eu lieu, est l’exercice en acte de cette puissance, pour le meilleur et pour le pire. Et donc, la parole est libre. On a chacun à tenir compte que d’autres souhaitent également s’exprimer, et donc à se modérer. Je le dis pour moi-même aussi, et j’ai Gennie pour me modérer, et Lucia, et Vicente. Voilà.

            Alors, il faut maintenant lancer un petit peu la Conversation.

             Quelles thématiques avais-je décidées pour cette Conversation où tout peut se dire? J’avais pris comme référence la matrice du discours chez Lacan : S1, S2, $, petit a, et il me semblait que pouvaient trouver à s’y loger, sans trop d’artifice, les questions qui agitent aujourd’hui certains secteurs de l’AMP, et de proche en proche l’ensemble de l’AMP. J’ai ajouté d’ailleurs un cinquième terme, qui était le lien lui-même.

            J’avais pensé que ce qui trouverait à se  dans “ le lien ”, c’était ce qui a peut-être été le point de départ, au moins le plus apparent, de la récente série, si je puis dire : à savoir, la fameuse querelle des jumelages. Et je me suis réjoui à penser que nous trouverions dans la même salle Antonio Quinet, Marie-Jean Sauret, François Leguil, Guy Briole, et que, après les avoir lus polémiquant, nous les verrions sur la scène échanger, converser, après d’ailleurs que la question des jumelages s’est, me semble-t-il, apaisée, tout en rebondissant ailleurs sous des formes saisissantes. Et puisqu’ils ont été les acteurs de cette question des jumelages, je les préviens que tout à l’heure, c’est-à-dire dans cinq minutes, quand Gennie aura parlé, je les appellerai sur la scène : Antonio Quinet, Marie-Jean Sauret, Guy Briole et François Leguil, ceux d’entre eux qui voudront bien.

            Gennie m’a dit qu’elle avait préparé quelque chose qui concernait le lien, et pour lancer l’affaire je vais lui donner la parole.

            Je signale que, étant donné le nombre que nous sommes, c’est-à-dire d’après les chiffres qu’on m’a passés, mille cent, il n’est pas tout à fait possible de faire circuler les micros dans la salle, vous le comprenez bien. Donc, ce qu’il y a, ce sont des micros qui sont fixés sur des pieds - il y en a ici un, deux, trois, un quatrième un peu en retrait. Donc, quand vous voulez prendre la parole pour la Conversation, vous venez vous placer derrière un de ces micros, debout, et vous formez même éventuellement derrière le micro une petite file de deux ou trois personnes, afin que la parole soit plus libre. Quand il y a une assistance aussi nombreuse, c’est la seule méthode qui existe pour participer. Donc, anticipez un peu votre désir de parler en venant vous placer derrière le micro.

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II. - Gennie Lemoine

 

Gennie Lemoine - Je vous remercie beaucoup, Jacques-Alain, d’avoir accepté de me placer selon mes souhaits pour ce que j’avais à dire sur le lien. Je crois qu’il est important aujourd’hui de parler du lien, puisqu’il est un peu en débat, mis en question.

            Ce lien c’est le lien qui fait qu’il y a une communauté de psychanalyse. Il n’y a pas que des communautés religieuses, il y a des communautés laïques. Donc nous sommes ici une communauté unie par un lien.

            Qu’est-ce que c’est que ce lien?

            L’autre jour, Jacques-Alain Miller a dit que pour qu’il y ait présence il faut qu’il y ait des corps. Je suis tout à fait du même avis. Certes, il faut qu’il y ait des corps, et même qu’il y en ait plusieurs. Il faut du corps pour qu’il y ait de l’un, donc il faut qu’il y en ait plusieurs pour que chacun trouve son autre dans le voisin. Voilà, nous avons tout ce qu’il faut. Nous sommes plusieurs, nous sommes même très nombreux. Et donc nous avons un lien qui nous unit.

            Il faut s’entendre sur ce terme d’unir, qui me paraît très mauvais, parce qu’il ne s’agit pas de faire l’Un, mais c’est ce qui permet à chacun de faire lien social avec l’autre. Il y a déjà tout dans les quatre discours bien sûr, mais pour commencer, pour débrouiller un peu la question, je crois que je vais essayer de débrouiller ces notes très mal écrites.

            Il faudrait distinguer combien de sortes de liens il y a en discussion.

            Il y a d’abord lien naturel. C’est très primaire ce que je vais dire, spontané, affectif. C’est ce lien qui conduit par exemple, c’est mon avis, au jumelage entre le Brésil et l’ACF-Midi-Pyrénées, pour dire les choses comme elles sont. Mais il y en a eu d’autres, spontanés, affectifs, de parenté presque.

            Ensuite il y a les liens institutionnels, qui sont faits de ce qu’on peut appeler une hiérarchie, une hiérarchie qui est en [?bise-bille?] avec le gradus, mais tout de même il y a des gens qui gouvernent, des gens qui reçoivent des instructions. En font partie par exemple les instances administratives, la permutation, les nominations, etc.

            Et puis il y a le lien communautaire, qui s’enracine dans le désir, le transfert. Et finalement celui qui se noue dans l’analyse, la passe, ce qu’on appelle le contrôle et que j’appelle dialyse - pour ne pas dire contrôle, mais parce que je crois aussi que c’est plus propre [rires]. Donc, le lien analytique.

            N’ont pas manqué des incidents démontrant qu’une nomination ou une non-nomination à la passe posaient des problèmes de fonctionnement, d’une part, c’est-à-dire institutionnels, outre les problèmes que posent les liens naturels - couple de soeurs par exemple dans une même institution, intrusions affectives de tout genre.

            Pourtant, si l’application de la règle de la permutation peut se défendre, politiquement elle est correcte, il est certain que la venue perpétuelle de nouvelles personnes peut troubler le fonctionnement de l’institution. Donc il peut y avoir un effet de l’autorité de certains pour choisir une personne plutôt qu’une autre, alors cela fait beaucoup de difficultés. Il faudrait pouvoir en discuter.

            On peut se demander où commence la liberté et où finit la distorsion. Là aussi il y a toujours les mêmes personnes qui contestent la distorsion. Mieux vaut tout de même de risquer la distorsion, si sont mises en question les revues par exemple, si sont mis en question les Séminaires, il vaut mieux la distorsion pour éviter l’appauvrissement de la pensée, parce qu’on peut toujours parler après une distorsion. Mais s’il y a appauvrissement de la pensée, on ne peut plus parler. Là je rejoins ce que vient de dire Pierre-Gilles Guéguen sur l’importance du langage et de la parole.

            En ce qui concerne les revues, si les responsables signent et gardent l’entière responsabilité de leurs écrits, tout le risque est pour eux. Ce n’était pas le cas de certaines revues de l’École Freudienne de Paris, par exemple Scilicet, tout le monde ne signait pas. Lacan a expliqué pourquoi il signait. Je sais qu’il y a eu des problèmes dans certaines revues. S’il y a un problème juridique, qu’est-ce qu’il va se passer? Voyez, nous sommes vraiment là au ras du fonctionnement de l’École.

            En ce qui concerne les séminaires, surtout s’ils sont faits à l’étranger, la directrice du Champ freudien doit savoir si c’est une initiative privée. Est-ce qu’on peut se réclamer d’une institution pour obtenir une activité ailleurs?

            Nous constatons dans ces exemples que le lien de fonctionnement, la permutation embraye son moteur sur la malencontre de l’initiative et de la responsabilité. Cela, du moins, nous pouvons l’établir, n’est-ce pas? Cela n’a rien d’étonnant, mais encore faut-il prévoir un accommodement sans concession, c’est-à-dire juste. Voilà cet espace qui va à l’encontre de l’initiative et de la responsabilité dans notre Ecole.

            La classification tripartite posée au début, lien affectif, lien institutionnel et lien social, ne tient pas bien longtemps, mais cela nous a permis tout simplement de démarrer.

 

            J’en viendrai donc à poser les problèmes du lien en m’efforçant d’abord de dire ce qu’il en est du lien social, parce que c’est le seul essentiel qui fait tenir ensemble les membres et même les non-membres d’une institution analytique.

            Il est clair que le lien fondamental, qui est le lien social en puissance, c’est le désir qui le crée. Le désir, comme le dit très justement Carlo Vigano, c’est le style qui garantit qu’il ne soit pas soumis à la jouissance de l’Autre par vouloir d’identification. Il ne sollicite pas d’identification. Ainsi le style permet à chacun d’exprimer son désir sur un mode de semblant particulier, mais qui reste du semblant bien évidemment. Le désir n’apparaît peut-être, peut-on dire alors avec Pierre Bruno, qu’avec discrétion. En effet. Il apparaît quand même.

            Mais pour Pierre Bruno, la dialectique permet que le désir consente à la discrétion. Moi je n’en suis pas très sûre. Et puis pourquoi invoquer la dialectique, si cette dialectique n’est autre que le jeu du tiers, notre tiers propre à la doctrine psychanalytique lacanienne plus propre à rendre compte de ce qu’est ce troisième? C’est un en plus, et puis c’est ça qui cause la différence. Je ne sais pas si Hegel nous aide beaucoup. Pourquoi ne pas partir de notre expérience seulement? En outre le mot de dialectique nous est donné comme le drapeau d’une théorie philosophique, et je trouve toujours dangereux de s’y référer et aussi de s’en autoriser. Oui, voilà, c’est parce que ma fille est philosophe, me dit en douce Jacques-Alain [rires], mais je ne le suis pas.

            Dans notre théorie se tient le semblant en effet, ce petit autre, ce petit a, dont il convient d’être dupe, puisqu’il n’y a pas de surgissement du désir sans sa cause matérielle, qui est précisément petit a. Ainsi le discours appelé à sustenter notre Ecole et à produire ce lien social propre à notre société analytique sera-t-il le discours de l’analyste, en ce que celui-ci favorise le surgissement du désir en mettant petit a en place d’agent tout simplement. Cela ne fait pas une association très calme ni très facile. Je n’ai jamais dit que c’était facile de vivre dans une communauté analytique. Première nouvelle, n’est-ce pas Jacques-Alain? [rires]

            Malgré tout, ce ne sont pas les bonnes raisons des causes et des vérités objectives, telles qu’elles se sont déployées ces derniers temps, qui détermineront le lien associatif. C’est le seul désir de l’Autre.

            Voilà je suis tout à fait opposé pour cette raison, je trouve qu’on a trop parlé, en particulier sur cette satanée machine qui est Internet, qui a favorisé en effet les délires particuliers. Parce que comme on ne peut pas tout dire et comme rien n’est vraiment rationnel, à cause de petit a, eh bien! ce n’est la peine de le prétendre et de prétendre que l’un a raison et l’autre tort. [Applaudissements]

            Alors, ce désir, quand il est à l’oeuvre dans la cure, produit le transfert.

 

Jacques-Alain Miller - Il y a une discipline qu’on s’était imposé à Paris dans les Conversations, qui était de ne pas applaudir. Nous sommes en effet, ou nous ne demandons qu’à devenir un groupe, avec des phénomènes de groupe. Nous essayons au contraire de maintenir une Conversation où chacun parle un par un pour son compte, et si l’on pouvait éviter les phénomènes de massification que sont précisément les applaudissements par exemple, ou les sifflets - c’est plus difficile à faire, on sait moins bien siffler qu’avant -, si l’on pouvait éviter cette massification ce serait vraiment très allégeant, alors que nous sommes, comme je l’ai dit, mille cent dans cette salle.

 

Gennie Lemoine - Ce désir dont je parle, quand il est à l’oeuvre dans la cure, produit le transfert, qui est de l’amour. Et voici le lien social propre à notre société, ainsi défini par l’amour. Je le disais à Colette Soler, un jour qu’elle parlait de la ségrégation. Ce lien ne simplifie pas notre vie.

            Alors pouvons-nous établir une politique du transfert? Ce n’est pas tout simple. Il n’est évidemment pas question que l’analyste cède au transport amoureux de l’analysant, qu’il se serve du transfert politiquement, l’analyse s’en trouverait irrémédiablement compromise.

            Alors, qu’est-ce qu’il faut faire? Certes l’analyste, en fin de cure, aime l’analysant, de cet amour nouveau que Lacan a défini, mais justement cet amour-là qui est fait du désir sans objet, il doit continuer à prévaloir mais il n’a plus la caractéristique de favoriser quelqu’un.

            Alors, qu’a voulu dire Lacan quand il a dit “ Que ceux qui m’aiment encore veulent bien poursuivre ”? Je n’aime pas beaucoup interpréter Lacan, surtout comme ça publiquement mais après tout je vais dire ce que moi j’en ai entendu. Je crois que je l’ai dit un peu hier, j’y ai entendu ce que j’entends dire souvent du transfert sur Lacan, c’est que c’est un transfert sur son texte. C’est-à-dire, quand on a lu Lacan - c’est mon cas en tout cas, avant de le rencontrer -, quand on lit deux lignes de Lacan, on sait qu’on peut faire fond sur tout le texte lacanien, il suffit d’en lire deux ou trois lignes, ça marche tout le temps. Et beaucoup de personnes ont un transfert sur le texte de Lacan et non sur sa personne. Ce n’est pas la même chose. Ce transfert sur le texte, ainsi interprété, fait que tout son livre peut être considéré comme une contribution particulière à ce que Jabès, cet écrivain égyptien, a désigné le Livre, c’est-à-dire le livre de l’humanité, un livre qui se fait tout le temps. C’est-à-dire qu’on met le pied sur un terrain que l’on construit, et cela justifie le bien dire que Lacan a posé comme fin du travail analytique, et comme ce qui justifie cette fin qui permet le bénéfice que la personne qui termine et fait sa passe, par exemple, parle et écrive, donc elle produit de nouveau le transfert à la mesure de chacun et selon la particularité de chacun. Ainsi le transfert sur le texte n’est pas le transfert sur la personne, et il permet de supposer que le livre a un auteur. Je continue à penser que ce n’est pas le transfert amoureux qui fait une demande à cet auteur pour sa propre personne, c’était le cas d’Alcibiade et de Socrate.

            Je crois qu’on peut en conclure que le transfert est ce que le lecteur éprouve avec la rencontre d’un texte dont l’auteur est supposé. Et le lien social qui se noue à cette occasion est celui du discours de l’analyste, quand le désir de savoir, qui soutenait la passion de l’analysant lecteur du livre lacanien, cède en même temps que chute l’objet du désir, l’analyste qui détient la théorie lacanienne, qui était l’objet du désir. Ce que l’analysant a à dire, mais qui reste lié à l’enseignement de l’oeuvre entre autres.

            Lacan déclare magnifiquement alors, que rien n’est plus solide que le lien qui fait, en fin d’analyse, [?de vide séquenté?]. L’objet a chu. Et les réponses des mille à la Lettre de Dissolution de Lacan suffit à prouver la force de ce dire.

 

            Alors, l’institution tient, parce que chacun est à sa place et peut dire son mot. De cette place, chaque analyste parle ou écrit. Il se produit dans la communauté du transfert sur ces dits ou ces écrits, tout comme sur le texte de Lacan, et chacun à sa mesure, et de moi bien entendu, et des autres. Mais des dits et des écrits dont l’auteur est vivant.

            Eh bien! l’École ainsi s’étend à partir de la cure, à la mesure de ce travail d’amour nécessaire pour qu’il y ait lien social, et un lien social d’autant plus fort que la cure est arrivée à son terme. La passe s’offre ainsi à qui peut en écrire.

            Donc le produit de la cure est bien un lien social spécifique, celui que produit le discours analytique instauré dans la cure, et donc dans toutes nos Ecoles. Ce n’est pas l’analysant qui en est le produit. Je regrette ce terme malencontreux. La politique du transfert ne saurait consister à exploiter un tel produit. Le produit de la cure c’est le S1, ce n’est pas une personne.

            Il n’y a donc pas lieu de s’interroger sur les deux autres sortes de liens, distingués au préalable et qui n’ont été là que pour permettre de prendre un départ. Mais ces autres liens demeurent forts dans une Ecole analytique. La raison en est simple : jamais un discours, fût-il analytique, était un acte sans mélange dans la vie d’une société, fût-elle analytique, mais les quatre discours tournent et sont toujours mêlés, ils produisent leur lien spécial propre, et il faut l’épurer constamment.

            Il n’y a qu’une éthique, c’est celle-là. Celle qui consiste à retrouver le désir. C’est la politique du désir, comme il y a une éthique du désir. Nous voyons là comment politique et éthique sont liées.

            Mais comme les discours sont mêlés, l’institution analytique a besoin d’un minimum de statuts et de règlements, où nous retrouvons nos deux premières sortes de lien, mais au registre d’une simple pratique de l’institution, donc ni politique ni éthique. J’ajoute que dans ce minimum de statuts il est nécessaire de prévoir une instance critique - je la réclame depuis 1981, mais je sais qu’elle est instaurée à l’AMP -, une instance critique qui fonctionne comme le tiers pour éviter les collusions entre les quatre discours. La fonction critique assure un travail de dissolution qui continuait et donc de libération à la mesure de chacun, car Lacan a défini la dissolution comme ce qui contient une solution implicite, à savoir que chacun est libre quand les liens sont dénoués. Et quand les mauvais liens continuent à être noués évidemment tant que les trois ronds sont noués. Si un seul s’en va, par exemple celui qui dit “ Je dissous ”, alors chacun dans l’École est libre de constituer les mille auxquels Lacan a fait appel.

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III.  - Antonio Quinet, Celso Renno Lima, Ricardo Seldes,

 François Leguil, Sonia Alberti, Marie-Jean Sauret,

Guy Briole, Pierre-Gilles Guéguen

 

Jacques-Alain Miller (avancé sur la scène, debout entre la tribune et la salle)

            - D’abord une précision. Jorge Forbes a trouvé un texte littéraire en portugais, mais je lui précise qu’il faut qu’il le fasse photocopier, qu’il m’en donne un exemplaire, et qu’il donne quatre exemplaires aux traducteurs le moment venu.

            Alors, j’aimerais beaucoup, s’ils le veulent bien, qu’Antonio Quinet et François Leguil montent sur cette scène. Je vais dire pourquoi je tiens spécialement à ce que Antonio Quinet vienne. C’est à cause de Sonia Alberti, qui a été en France récemment, invitée à Toulouse dans le cadre du jumelage, du fameux, Rio-Toulouse. Nous nous sommes vus à Paris, nous avons dîné, et nous avons parlé des tirages qu’il y avait. Je lui ai demandé ce que, à son avis, je pouvais faire, elle m’a dit : “ Mais Quinet n’attend qu’un signe de vous ”. Alors je lui ai dit : “ Je n’en suis pas tellement sûr, je crois que je l’inquiète au fond depuis très longtemps ”. Mais enfin elle a insisté, elle m’a dit : “ Mais pas du tout, si je suis venue au Champ freudien c’est grâce à Antonio Quinet qui m’a fait connaître votre Séminaire, et quand je suis venue à Paris c’est lui qui m’y a conduite ”. Alors je lui ai dit : “ Sonia, écoutez, demandez-moi quelque chose et je le ferai ”. Alors elle m’a dit : “ Mettez Quinet à votre droite, une fois, à Barcelone ”. C’est ce que je voudrais faire : ma droite est là, si Quinet voulait bien venir à ma droite, merci Antonio.

 

Antonio Quinet (devant un micro dans la salle) - Je peux parler d’ici?

 

Jacques-Alain Miller  - Antonio Quinet veut parler d’en bas. Est-ce qu’il a le micro ici, s’il vous plaît, au centre?

 

Antonio Quinet - Je vais parler en portugais. Y a-t-il une traduction en portugais?

 

Jacques-Alain Miller - Il y a une traduction pour le portugais, sauf que moi je n’ai pas d’écouteurs, et je vais essayer de saisir tout sans écouteurs (on apporte des écouteurs à JAM). Voilà, heureusement qu’il y a Marlène Belilos qui me sauve d’un malentendu possible, on a autre chose à faire.

 

Antonio Quinet  - Acho bastante a propósito que a questão da geminação – Toulouse e Rio de Janeiro – entre no âmbito do laço. Na verdade, os ataques a essa geminação começaram antes mesmo que ela fosse efetuada, denotando um pré-julgamento, a nosso ver, surpreendente, porquanto a geminação tinha sido aprovada e homologada pela AMP. Antes mesmo que eu chegasse a Toulouse para dar início à geminação, já havia uma crítica escrita, que depois foi repetida na conversação de Toulouse de que participei, no dia 1o de março desse ano. Nessa ocasião já se tentou fazer o que eu chamaria de um processo, e que continua sendo feito, dessa geminação. Os ataques, inclusive os que se seguiram, se situam, a meu ver, no âmbito dos disfuncionamentos da AMP que vêm acontecendo.

            Eu gostaria de comentá-los aqui com vocês, observando que, na minha opinião, começaram em 1996, exatamente há dois anos atrás, em Buenos Aires, no mesmo Encontro Internacional em que Jacques-Alain Miller começou a acusar Colette Soler de plagiá-lo, e que foi afirmado que a política da AMP é a política do witz.

            A própria verdade jamais foi posta em prática. Em seu lugar viu-se afirmar, de maneira cada vez mais decidida, a prática dos processos. Processos de grande espetáculo, começados em Arcachon, com a mesma acusação a Colette Soler, dessa vez em sua presença, e continuando nas chamadas conversações, onde sempre existiram os processados. Os efeitos desse método, na verdade são muito mais nocivos que os conflitos que pretende tratar.

            Se a questão é efetivamente encontrar soluções, outros meios poderiam ser utilizados, como, por exemplo, recorrer às instâncias responsáveis. Preferiu-se a tática das conversações. As cartas abertas a Colette Soler, por exemplo, no Brasil, ou as acusações à geminação na Internet, tinham também a mesma função. Fazer existir o olhar crítico desse Outro, que é o público, dessa vez anônimo, o público leitor, voyeur na contenda.

            A estrutura de três pessoas, necessária para o êxito do witz, segundo Freud, é aqui utilizada para o processo, que pode ser modulado em fofoca, intriga, calúnia, difamação, injúria, infâmia. Manifestação da pulsão de morte, que só faz degradar os laços associativos, como nós temos visto acontecer na AMP. Com Freud sabemos que Tânatos se encontra em toda relação fusionado com  Eros. Em caso de um conflito, pode se acentuar Eros, o simbólico, ou a vertente real da pulsão de morte, que desagrega, desune, dissocia, e cuja melhor ilustração Freud nos deu com a guerra.

            O que vem acontecendo com a AMP, e também na EBP, chegou a ponto de provocar a saída de membros cujo trabalho constituía um dos pilares da escola, como foi o caso de Jairo Gerbase. O que eu havia designado anteriormente como empuxo à rivalidade, revelou-se, a própria ação de Tânatos, como empuxo à guerra. Ao colocar brasileiros contra brasileiros, seção contra seção, fazendo apelo a uns a defenderem seu território, qualificando um outro de estrangeiro, instigando, intrigando, segregando, etc.. O Delegado Geral mostra sua maneira de entender a escola – como um exército, que é feito para a guerra. Com conquistas territoriais, estimulando o ódio entre pares e inventando guerras. Como, por exemplo, a guerra dos cartéis do passe da ECF e até mesmo o desencadeamento de guerra às transferências.

            O patético da situação é que essa ação de empuxo à guerra se conjuga com um semblante fazedor de paz. A definição de escola feita para o combate, que pode ser lida em Tirade, Tirade que é o texto que se encontra na abertura do nosso novo anuário da AMP. Tirade, eu lembro para vocês, é a resposta de Jacques-Alain Miller a Marie-Jean Sauret, e nós podemos nos perguntar o que vem a fazer esse texto na abertura do anuário da AMP... Definindo a escola, eu cito: "ela é feita para o combate, ela não tem o menor interesse sem isso".

            É isso então que norteia agora a AMP, a ponto de servir de abertura do nosso anuário? Para que esse combate seja interno/externo... mas que seja essa a função da escola, é isso então que me pergunto agora, para iniciar essa conversação sobre o laço que nos une. [Applaudissements]

 

Jacques-Alain Miller - Je peux avoir votre texte, Antonio? Je ne peux pas avoir votre texte. Bon. Je ne peux avoir ce texte. La Conversation, telle que je la comprends, ne passe pas par des textes écrits, mais pour lancer le débat je trouve ça très bien. Alors, il y a à la tribune précisément notre unique AE brésilien, directeur actuel de l’École Brésilienne de Psychanalyse, Celso Renno Lima, qui est également de la Section du Minas Gerais avec laquelle notre collègue Antonio Quinet a été en discussion. S’il le veut bien, je lui passe la parole, évidemment pour improviser. Vous n’avez pas, je suppose, de texte préparé ?

 

Celso Renno Lima - A questão com Antônio Quinet resumiu-se apenas àquela do seu seminário de Belo Horizonte. Não há, nem nunca houve, em momento algum, por parte dos mineiros ou cariocas, uma guerra. Quinet é uma pessoa muito querida entre nós – pelo menos por grande parte de nós, mineiros – e a sua transmissão sempre foi muito bem-vinda. A questão se resumiu – pelo menos até onde posso verificar, e para isso é que eu trabalhei todo esse tempo – na tentativa de acabar de inserir o Seminário de Antônio Quinet na Seção Minas Gerais. Esse foi o único problema que aconteceu, não houve em momento algum uma guerra entre mineiros e cariocas. O próprio Jacques-Alain Miller sugeriu-nos –a nós, mineiros –, em uma comunicação, defendermos o nosso território.

            A questão de que se tratava era que nós, da seção Minas Gerais, pudéssemos repassar a nossa posição enquanto escola, uma vez que fazia parte da Seção Minas receber sempre o que foi chamado de estrangeiros, na verdade, colegas que vinham fazer a transmissão, e nós, de Minas Gerais, não estávamos assumindo plenamente o lugar da transmissão da psicanálise em Belo Horizonte. Essa cidade tem a característica de ter vários grupos de psicanálise, não é uma propriedade da cidade de Belo Horizonte, o lacanismo se espalha e é preciso que nós, da EBP, tomemos conta do nosso território no que diz respeito à transmissão. A conversação de Minas apontou várias saídas e várias vezes nós voltamos a conversar com Antônio Quinet que se dispôs a chegar a um ponto de acordo para que o seu Seminário pudesse continuar, uma vez que eu, como diretor da EBP digo que Quinet é muito bem-vindo à escola de Belo Horizonte.

 

Jacques-Alain Miller - Il se trouve que récemment j’ai été amené à désigner Ricardo Seldes, secrétaire de l’AMP, comme ce que Romildo Do Rego Barros a appelé un extime, concernant les difficultés internes de la Section Rio. Ricardo est là au premier rang, s’il le veut bien j’aimerais qu’il apporte un témoignage à la file - en fait nous n’avons même as eu le temps d’en parler ensemble depuis son voyage à Rio à ce titre -, s’il veut bien apporter un témoignage sur les conflits internes de la Section Rio de L’École Brésilienne de Psychanalyse. C’est donc maintenant un discours en espagnol que nous allons entendre.

 

Ricardo Seldes - En la conversación que hubo en Río, con la presencia de Jacques-Alain Miller, se produjo un pedido de una búsqueda por parte del Consejo y del Delegado General de la AMP de encontrar un modo de retomar los lazos de trabajo que siempre caracterizaron a la Sección Río en relación al psicoanálisis. Una Sección, que como he podido comprobar, ha sido siempre de avanzada en la ciudad en lo referente a su relación al psicoanálisis y sin duda también en el país. A la semana siguiente he vuelto a ir, justamente para tener una conversación que se produjo en los mejores términos y donde se plantearon cuestiones que yo entendí esenciales en relación a la historia de la Sección, con dificultades en la inscripción incluso hasta en la institución legal de los estatutos, por problemas burocráticos. Pero también se notó que había una dificultad, más que dificultad, quizás, había lo que se llamaron las paradojas del pasaje de lo que había sido el grupo que constituían los psicoanalistas anteriormente, “Corte freudiano”, a la Sección. Pero todo el tiempo se me mostró el interés fundamental por inscribir, no sólo legalmente, sino en todo lo que son los pactos constitutivos de la Escuela Brasilera de Psicoanálisis y de la AMP. Durante esta conversación, que todo el mundo calificó, como decía antes, con el mejor espíritu, donde se apreció un “afecto societatis”, aunque también se pudo decir que había un cierto grado de desconfianza con las instancias directivas, incluso entre las instancias. A lo largo de la Conversación se fueron produciendo esclarecimientos, y lo más interesante es que, al final de esta Conversación, se hicieron propuestas concretas de trabajo, en torno a 16 ó 17 puntos, en las que todos coincidieron. Propuestas que por supuesto incluían fundamentalmente un pacto de trabajo entre ellos, pacto que incluye su relación a la Escuela y a la AMP. Un pacto que sostiene la necesidad de continuar con el trabajo como modo de salir de la desconfianza que los ha tenido prisioneros, y quizás aún los tenga, durante este último tiempo, y que ha impedido un trabajo efectivo; incluso se notaban pequeños problemas burocráticos. Todo esto se puede ver claramente en la transcripción de las cintas que están al alcance de quien lo desee. Se puede ver ahí que efectivamente hay un claro deseo por mantener el psicoanálisis de orientación lacaniana en Río, en Brasil y en relación a la AMP.

 

Jacques-Alain Miller - Merci Ricardo. Peut-être que là François Leguil, qui a juste à l’instant écrit son texte, voudra dire quelque chose. François Leguil, je le rappelle, a fait un texte sur Internet qui a beaucoup ému, qui a fait une sorte d’incident diplomatique dans l’AMP. En effet, avait circulé sur Internet, ou par fax, le texte contant les cérémonies de l’accord de jumelage Toulouse-Rio, et je dois dire que je ne l’avais pas lu, parce que, je le confesse, je suis loin de lire tous les textes qui circulent dans l’association. Je ne l’ai lu que lorsqu’on m’a eu signalé le texte de François Leguil, qui, lui, se moquait de la rédaction de cet accord. Tout cela a joué - c’est certainement contingent - un certain rôle dans le processus en cours. Je lui donne le micro pour qu’il puisse s’en expliquer.

 

François Leguil - Je n'ai pas écrit un texte sur le jumelage, mais trois. D'abord une lettre en 1996, qui était une réponse à une lettre que vous avait adressée Juan Carlos Indart, et c'est vrai que le problème que soulevait Juanqui m'avait beaucoup touché, je le lui avais dit d'ailleurs. Et l'idée du jumelage m'était venue, parce que ça m'apparaissait quelque chose qui pouvait intégrer dans le fonctionnement même de l'AMP ce que l'on constatait à chaque Rencontre, à savoir une certaine pâte humaine. Je veux dire que, à chaque Rencontre, il y avait comme la célébration secrète d'un tas de petites rencontres entre les gens, et il me semblait, à la suite de tous les voyages que nous pouvions faire, à la suite de tout ce que nous pouvions constater d'échanges entre les gens pendant les Rencontres internationales, et surtout à la suite de l'expérience tirée de la création de l'ACF, il me semblait qu'on pouvait effectivement lutter contre un sentiment de centralisation, par la création de toute une série de transversalités, et c'est comme ça que j'avais répondu. Vous aviez pris la balle au bond, j'avais d'ailleurs été surpris parce que je ne m'y attendais pas.

 

Jacques-Alain Miller - C'est vous, au fond, l'inventeur du jumelage.

 

François Leguil - Ce n'est pas moi l'inventeur du jumelage, ce sont les municipalités d'Europe, puis du monde entier au début du siècle, je crois. Le mot était venu dans la lettre que je vous avais faite en réponse à la publication que vous avez faite de la lettre de Juanqui, et ce mot avait ensuite été repris.

            Quand j'ai lu le compte-rendu du jumelage Rio-Toulouse, j'ai été très surpris et en même temps un peu joyeux. J'ai été surpris parce que l'idée que j'avais des jumelages, c'était plutôt quelque chose qui partait de la base, quelque chose qui s'établissait sur une longue durée et dans la discrétion. Et là nous avions plutôt la célébration d'une initiative de leaders, quelque chose d'extrêmement spectaculaire et qui plutôt se posait comme événement. Effectivement il m'avait aussi paru surprenant que la spontanéité se trouve encouragée par la recommandation que chacun puisse envoyer une carte postale à chacun. C'est vrai que [ce sont des choses,] au fond c'est mon problème, j'aime bien envoyer une carte postale mais un petit peu comme ça me vient, et ça m'avait surpris que dans un texte la chose soit recommandée comme une prescription. Pour mon malheur, je rentrais de Toulon où j'avais fait une conférence dans un lieu magnifique, au pied du Mont Farron, devant la rade de Toulon, et j'avais commencé ma conférence par toute une recension des citations que l'on pouvait prendre dans l'enseignement de Lacan sur les batailles navales. Cela commence dés le Livre I où Lacan dit que, à propos de Thémistocles et Péricles, Thémistocles donnant aux vaisseaux l'ordre de quitter le Pirée en allant vers Salamine, Lacan dit que c'est une intervention analytique. Il y a les commentaires que Lacan fait sur l'amiral Laborde, je crois que c'est dans ce Séminaire où il dit que Laborde est un con. Il parle à un moment donné aussi d'une autre bataille navale. Et puis il y avait ce passage absolument magnifique de "L'Etourdit", où Lacan compare les batailles navales à des danses. J'avoue que ça m'avait absolument saisi. Quand j'ai découvert ces citations c'était dans la semaine où j'avais vu le magnifique film de Marckiewitz, Cléopâtre, où il y a une très belle scène sur la bataille d'Actium, je crois...

 

Jacques-Alain Miller - C'est un aparté : je n'avais pas noté l'importance des batailles navales chez Lacan, mais cela éclaire l’importance spéciale que Lacan donne dans Les Formations de l'inconscient  à l'histoire de Queneau où tout repose sur la différence entre les batailles terrestres et les batailles navales.

 

François Leguil  - Donc je revenais de Toulon avec ces citations, et il y a eu l'indication du rapport de Toulouse sur le Lac des cygnes, alors manque de chance! ce n'était pas Marckiewitz, mais j'avais vu peu avant le fameux film de Billy Wilder, “ La vie privée de Sherlock Holmes ” où le Lac des cygnes est un thème récurrent. Paf! j'ai fait la jonction entre les deux, je me suis dit “ On va rigoler un bon coup ”. J'ai voulu faire dans l'aquatique et on m'a trouvé vaseux [rires]. Effectivement j'ai bien compris que je n'avais pas saisi le ton avec lequel l'affaire se posait, et que, si j'avais fait un calcul, il n'était pas d'une perfection totale. Donc j'ai écrit le troisième texte, “ Prospérité-hilarité ”, où il me semble que j'ai tenu compte de ceci, que pour dire que quelque chose est injurieux il faut attendre dans l’après-coup, puisque dans la définition de l'injure même l'excuse de provocation est considérée comme absolutoire, et donc l'affaire était close à partir du moment où j'ai pu dire que je n'avais en aucun cas voulu être injurieux. Il n'en reste pas moins que je reste toujours très surpris par la différence de ton qu'il y avait entre le jumelage Rio-Toulouse et toute une série d'initiatives, que ce soit entre Bruxelles et Tel Aviv, entre l'Andalousie et la Normandie, entre Val de Loire-Bretagne et l'Angleterre, où les choses se font de manière de plus en plus dense, de plus en plus riche, et de façon très discrète. Et là effectivement, je veux en faire l'aveu public, il y a dans le style qu'a pris le jumelage de Rio-Toulouse quelque chose que je n'ai pas compris, et peut-être que n'ayant pas compris j'aurais du me taire, mais je ne l'ai pas fait. Je suis venu ici pour parler de ça, je ne me sens pas trop justifié à le demeurer, quoiqu'Antonio a parlé d'Arcachon où c'est vrai que je n'ai pas été muet non plus.

 

Jacques-Alain Miller - Qui demanderait la parole? Il ne faut pas la demander, il faut aller se mettre directement à un micro. Guy Briole, allez au même micro que Marie-Jean Sauret et après lui. Il faut bien comprendre comment cela fonctionne : quand on fait passer des micros, on doit lever la main et on attend que le micro vous arrive ; là, on doit déplacer son corps, c'est-à-dire que quand on veut parler il faut se mettre en mouvement, pas seulement de la tête mais aussi des jambes, et on se rend près d'un micro, et le rôle de l'animateur se réduit à respecter l'ordre dans lequel vous êtes placés. Sonia Alberti est arrivée au micro central bis, je lui donne la parole, après ce sera Marie-Jean Sauret.

 

Sonia Alberti - C'est une question sur l'observation de Leguil. Je n'ai pas très bien compris ce qu'il a dit parce que je n'ai pas les écouteurs. Est-ce qu'il y a dans ton exposé d'aujourd'hui une réflexion sur le fait qu'il y aurait eu des réunions avant le jumelage? Est-ce qu'il y avait effectivement quelque chose avant? C'est-à-dire, à partir d'une lettre écrite par Pierre Bruno, du Conseil de l'École de la Cause freudienne, qui invitait Rio à être le jumeau de Toulouse, y a-t-il eu une discussion au Conseil de l'École de la Cause freudienne, quelque chose d'autre qui aurait préparé ce jumelage? Je te demande d'éclaircir ce point parce que je n'ai pas bien saisi, c'est comme si tu parlais de quelque chose de secret.

 

François Leguil  - Je n'ai absolument pas parlé de quelque chose de secret. Je crois que sur les préliminaires du jumelage Rio-Toulouse, rien d'autre n'a à en être dit que ce qu'a dit Antonio Quinet, à savoir que cela avait été approuvé et encouragé par le Conseil. C'est tout.

 

Marie-Jean Sauret - Oui, je suis venu au micro parce que Jacques-Alain Miller est venu me demander tout à l’heure de monter sur l’estrade, et j’ai décliné l’invitation en lui disant que je donnerais ma raison. Je vais donc dire ma raison. Je m’excuse d’ailleurs tout de suite auprès de ceux que ce refus pourrait heurter. Mais je ne peux pas faire comme si je n’avais pas vu le texte qui figure dans la Préface de l’Annuaire de l’Association Mondiale de Psychanalyse, la “ Tirade ” contre Marie-Jean Sauret. Est-ce que c’est ça l’acte de fondation de l’AMP? Vous m’y situez trop bas, avec quelques autres, pour que je puisse faire les quelques pas qui m’auraient permis de monter à la tribune. Est-ce un exemple du noeud entre politique et clinique pour la psychanalyse? Je me posais une question très bête : Comment est-ce que - je le fais chaque fois - je vais donner cet Annuaire à mes collègues, à mes amis qui cherchent un analysant [rires], un analyste - oui, oh! oui -, à ma famille, à mes enfants? Tiens! imaginez que c’est vous, que c’est une tirade contre vous, et que vous faites lire ça aux vôtres. Imaginez une seconde. La question du jumelage Rio-Toulouse - pardon! Antonio -, elle me paraît dérisoire à côté de celle-là. Comment chacun, ici, peut-il consentir à ce que son nom figure sur une liste qui a pour chapeau la “ Tirade ” contre Marie-Jean Sauret? Je demande le retrait de ce texte de ce document officiel [applaudissements].

 

Guy Briole  - Je voudrais dire quelques mots à propos des jumelages. En effet, leur démarrage a été timide, difficile même parfois, et il est vrai qu’on n’avait pas donné de règles bien précises pour ces jumelages, ils étaient plutôt placés sous le signe de l’invention. L’idée était que des membres d’Écoles, de communautés de notre Champ, qui ne se connaissaient pas, se rencontrent, qu’ils échangent, et qu’ils travaillent ensemble. L’idée de ces jumelages était donc de créer des liens nouveaux, de provoquer des rencontres élargies. L’esprit était celui-là, celui d’échanges larges, et non pas celui d’une restriction des échanges. Ces jumelages se sont mis en place progressivement, et il faut bien constater une large diversité. Je vais dire quelques mots très rapides de ceux que je connais et de leurs arguments : le jumelage de l’ACF-VLB et du London Circle autour du travail en cartels, sur des thèmes cliniques et théoriques ; l’ACF-Belgique et le Groupe de Tel Aviv à partir de travaux de psychanalystes de Tel Aviv sur des témoignages de survivants de la Shoah et d’une mise au travail de chacun sur ces questions ; l’ACF-IdF et le Groupe d’Études psychanalytiques de La Havane de Cuba à partir d’une rencontre et d’un désir décidé de nos collègues cubains ; l’ACF-Normandie et le Groupe d’Études d’Andalousie ont choisi de se jumeler pour produire un travail propre à chacun, c’est leur argumentation dans leur jumelage ; et enfin l’ACF-Méditerranée-Alpes-Provence et le Groupe Franco-Algérien ont décidé de se jumeler à une question, ce qu’ils ont appelé “ le malaise dans la citoyenneté ”.

            J’ai écrit un texte, “ Le jardin des jumeaux ”. J’ai, en effet, écrit ce texte à partir de ce qui s’était passé à Toulouse-Midi-Pyrénées autour de ce qui se mettait en place dans le projet de jumelage avec la Section Rio de l’EBP. Antonio parlait d’un jugement préalable, d’une pré-interprétation. Je dois dire que de ce jumelage, on en avait déjà parlé, avant la Conversation où on était ensemble Antonio, le 14 décembre 1997 lorsque je suis allé avec Jacques-Alain Miller à Toulouse, rencontrer les membres de cette ACF. Ce jour-là, en effet, nous avions déjà évoqué cette question de la personnalisation, de la nécessité dans les jumelages d’élargir les rencontres, et nous avions parlé par exemple, Antonio, de la traduction de ton livre, dont chacun a souligné l’intérêt. J’avais indiqué que ce travail de traduction relèverait davantage d’un travail du Cercle Franco-Brésilien à Paris, que d’un jumelage. Voilà quelques questions que nous avions avancées. Et c’est vrai, j’ai dû constater qu’à la Conversation à laquelle tu as assisté, ces petites indications, plutôt amicales et qui n’avaient pas une valeur de contrainte, n’avaient pas été suivies. Au contraire, l’orientation se poursuivait plutôt vers des échanges au un par un ou au deux par deux. Mon texte a été écrit à partir de cette situation.

 

Pierre-Gilles Guéguen (depuis la tribune) - Je voudrais simplement dire à Antonio Quinet que je comprends mal sa diatribe sur l’École et la guerre. L’“ Acte de fondation ” de Lacan situe l’École elle-même comme une plate-forme de guerre pour la psychanalyse. Cela me paraît quelque chose qui devrait être entre nous compris et admis, je ne parle pas de guerre entre nous mais de guerre pour la psychanalyse. Donc je trouve dans sa tirade à lui, une obscurité, une confusion des termes qui me paraît gênante.

            D’autre part, je voudrais dire à Marie-Jean Sauret que tout de même le texte dont il parle, la Tirade, comprend une remise au point, à laquelle j’adhère, sur la question des AE. Les AE effectivement ne nous paraissent pas devoir incarner des objections au savoir, il me semble qu’au contraire, j’espère l’avoir montré à partir du texte de Michael Turnheim, ils permettent de faire rebondir le savoir dans l’École. C’est plutôt le rôle qui leur serait donné, de permettre à la fois de transmettre quelque chose et surtout que d’autres puissent, à partir de ce qu’ils peuvent fournir et produire, contribuer de manière plus générale à l’étude de la psychanalyse. Donc ce texte, qui critique véritablement la position de Marie-Jean Sauret, est tout à fait fondé.

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IV. Colette Chouraqui-Sepel, Marie-Hélène Brousse,

 Roseane Murray Barros, Yasmine Grasser, Jacques-Alain Miller,

Bernardino Horne, Ricardo Seldes, Maria Anita Carneiro Ribeiro,

 Gleuza Salomon

 

Colette Chouraqui-Sepel - Je voudrais revenir sur l’intervention de Gennie Lemoine à propos du lien qui unit notre communauté, ou plutôt du style que pourrait avoir ce lien. Effectivement je me demande si on ne pourrait pas concevoir une communauté d’analystes, la nôtre en l’occurrence, autrement que comme une église ou comme une armée. Pierre-Gilles, je crois qu’on peut faire la guerre pour la psychanalyse autrement que sous forme d’une église ou sous forme d’une armée. Je propose de le faire sous forme d’un orchestre, d’un orchestre qui ne vire jamais ni à la fanfare militaire ni au choeur d’église, mais d’un orchestre symphonique, c’est-à-dire qui ne soit pas non plus cacophonique. Un orchestre se bat pour la défense d’une oeuvre ou pour l’interprétation d’une certaine oeuvre. Un orchestre suppose des musiciens, qui tous ont eu la même partition, qui tous sont soucieux de la défendre, qui ne s’entendent pas forcément entre eux, qui parfois se détestent. Et des musiciens parmi lesquels sont élus quelques solistes et un chef d’orchestre. Moi je proposerais plutôt ce type de communauté, d’autant qu’on peut dire que dans un orchestre règnent et le désir et le transfert.

 

Jacques-Alain Miller - La référence de Colette à l’orchestre me fait penser que j’avais pris la même métaphore dans l’éditorial du Temps logique n°1 du 21 juin 1996, c’est-à-dire il y a deux ans, où j’avais essayé d’ordonner une trentaine de lettres qui étaient arrivées pour participer à un débat mondial sur l’organisation de Barcelone. L’organisation actuelle de notre Congrès et de notre Rencontre de Barcelone a été discutée dans un débat mondial entre les membres de tous les Conseils, d’abord par fax, et il y a eu, si mon souvenir est bon, une trentaine de lettres envoyées de tous les coins des Conseils, et puis nous avons eu avec les membres de tous les Conseils de toutes les Ecoles un débat de quatre heures, dont le compte-rendu a été publié, et au cours de ces débats on a discuté de comment préparer Barcelone. A cette occasion, donc, j’avais fait cet éditorial.

            Simplement, là, nous nous rencontrons sur cet orchestre. Je disais cela après avoir parlé de German Garcia : “ Cette logique est incarnée. Elle est là dans les voix multiples qui font ce numéro.

            Pas d’harmonie. Pas de solennité. Pas d’ennui. Certains feront la moue? Qu’ils la gardent sur le visage. ‘‘Moi personnellement’’ (comme dit Ropo), j’ai traduit tous les textes en espagnol de ce numéro.

            Vous ferez ici la connaissance de Juanqui, de German, de Samuel Basz, une des bases de l’École Argentine. Adela Fryd, c’est la flûte après la trompette, et qui dit : ‘‘Difficile pour la flûte de se faire entendre si la trompette n’arrête pas, ni la grosse caisse, ni les cymbales. Comment la flûte à elle toute seule ferait-elle taire la trompette, la grosse caisse et les cymbales? Et une flûte peut-elle vouloir devenir tuba - tiens! - comme la grenouille boeuf? - c’était déjà là en 1996 - D’où l’appel... au chef d’orchestre. Adela décrit des choses à retenir. ”

            Oui, bien sûr, il y a des instruments très divers, il y a des grosses voix, il y a des petites voix. Parfois les petites voix disent des choses plus intéressantes que les grosses voix. Et donc il faut parfois arriver à écarter quelques grosses voix pour que de plus petites voix se fassent entendre. En même temps d’ailleurs  que j’avais pris cette métaphore, puisqu’à l’époque je m’étais occupé du programme de la Rencontre, ce qui n’est pas le cas cette fois-ci, je m’étais permis de placer la flûte d’Adela Fryd en séance plénière pour qu’on puisse entendre sa musique.

            Le seul problème c’est qu’évidemment chaque instrument étant différent dans un orchestre, au fond l’orchestre ce serait : on contribue à faire une symphonie. Non, on ne contribue pas à faire une symphonie. Nous sommes tous des solistes. C’est ça le problème de l’Association. C’est pour ça que je ne trouve pas bien placés les applaudissements. Parce qu’il s’agit de faire que, dans cette masse que nous constituons, tout de même on puisse entendre chacun comme un soliste. Et chacun n’a pas le même instrument, n’a pas la même puissance de voix - là nous retrouvons la puissance -, il y a les ténors, comme on dit, et tout le monde n’a pas la même puissance de voix. Donc comment faire pour que tout de même on puisse entendre tout le monde?

            Je ne sais pas si vous remarquez la diversité des AE qui sont nommés, de tous les coins du monde. Si vous pouvez dire qu’il y a un pattern de l’AE, j’aimerais bien savoir lequel, parce que eux-mêmes illustrent cette diversité, et en plus ils forment cet orchestre très spécial qui est un orchestre uniquement composé de solistes. Eh bien! pour arriver à ça, il faut beaucoup d’attention, il faut beaucoup de passion, et il faut peut-être un peu de cet amour du réel dont parle Virginio Baïo.

            Alors maintenant, je ne sais pas qui est arrivé d’abord, je donne la parole à Marie-Hélène Brousse et ensuite à Roseane Murray Barros du Cercle de Londres.

 

Marie-Hélène Brousse - Je voudrais faire état de mon sentiment. Après la dernière Conversation qu’il y a eu à Toulouse j’étais dans un certain enthousiasme, je me suis expliqué cet enthousiasme comme ce qui a succédé pour moi à un temps pour comprendre : j’avais compris ce qui se passait. Depuis, c’est un peu retombé, et une certaine lassitude m’a prise avant d’arriver à Barcelone, qui s’est tout de suite dissipée devant l’accueil chaleureux que nous avons reçu. Je vais cependant essayer d’expliquer pourquoi cette lassitude.

             Je crois que j’ai longtemps attendu, depuis un an et demi, que cette agitation, ce malaise qui est devenu une crise, me montre son visage épistémologique, se transforme en un débat d’idées. Mais il m’est apparu progressivement qu’il n’y avait là que des intérêts particuliers : l’honneur, les biens divers et variés, les mois idéaux, les idéaux aussi. A côté des intérêts particuliers, c’est-à-dire à côté des biens, il y avait donc nécessairement des revendications à en avoir, à ne pas en perdre, j’ai vu apparaître les fantômes de chacun. En particulier, je pense à la lettre de Perena, je peux dire que j’ai vu son fantôme d’Autre, fantôme corrélatif à chacun d’entre nous.

             Le troisième point par rapport à cette lassitude, c’est qu’elle surgissait aussi du sentiment intense que j’assistais à des tentatives de destruction d’une Ecole, à partir du dispositif de la passe dans lequel je me trouve. J’y suis fermement opposée. Donc, je dirai - je reprendrai sûrement la parole après - que ce qui m’oriente actuellement ce sont les objectifs tels qu’ils sont justement définis à la fin de la Tirade, des objectifs pour les années à venir en ce qui concerne la psychanalyse. Je rejoindrai là-dessus ce qu’a dit Pierre-Gilles Guéguen dans une des réponses aux questions qu’il a faite. Cela me semble tout à fait nécessaire.

 

Roseane Murray Barros - Devo dizer que quando chegou a minhas mãos, não lembro bem como, uma carta de Quinet sobre a geminação, o "twinning", fiquei muito surpresa porque de uma certa maneira, a ênfase era dada na "sameness", na mesmice. Segundo minha concepção nossa geminação com a ACF é baseada numa diferença. Eu acho que é necessário respeitar as diferenças; não se pode construir nada baseado numa política da similitude. Eu acho também que esse jumelage, quando foi traduzido para o português evoca gêmeos, distorce precisamente  o sentido já que põe o ênfase numa relação imaginária.

            Tenho acompanhado de perto e ajudado a construir o Círculo Londrino; temos passado por várias crises desde há quatro anos mas acho que um ano atrás, principalmente graças a Eric Laurent quem usou o dispositivo da dissolução e congelou as atividades do Council of the London Circle  podemos desde então observar é trabalho efetivo. Isto coincidiu também com nosso twinning, muitos cartéis se formaram, tivemos uma guia de estudos preparatória para este encontro reforçando laços não só de amizade mas principalmente de trabalho.

 

Yasmine Grasser - Je voudrais évoquer un souvenir avant de parler de la question du jumelage. C’était le début de mon analyse. Je pensais à l’époque que l’analyse était un contrat, un pacte, et mon analyste m’a fichue dehors. Evidemment, lorsque la question des jumelages s’est posée, puisque je suis responsable du Groupe Franco-Algérien et qu’on a fait un jumelage avec l’ACF-Naples, il n’était absolument pas question pour moi d’imaginer un jumelage sur le mode d’un contrat ou d’un pacte, c’est-à-dire que je ne considère pas que je suis le jumeau d’un autre jumeau. Donc on a cherché ensemble à quoi on se jumelait, d’abord on était deux groupes, deux associations différentes, avec des langues différentes, et on s’est dit : il y a une question qui nous rassemble. Et c’est l’idée qui nous est venue de nous jumeler à une question, à une problématique. L’idée a sans doute fait son chemin depuis cette rencontre que nous avons eue. J’ai lu avec beaucoup d’attention le rapport qui a été fait par Rio-Toulouse, et je me disais que c’était impossible de se présenter : comment se présente-t-on, comment se déclare-t-on, est-ce qu’on a une identité à décliner? La question finalement a été résolue, j’en donne le résultat : nous avons été à l’initiative d’un journal pour mettre en circulation les questions, et ce journal s’appelle Journal des Exceptions. Il sera distribué aux membres de l’Assemblée générale et il en restera un certain nombre d’exemplaires. Je voulais dire ça parce que dans ce journal nous avons trouvé une difficulté, c’est comment traduire dans les langues le mot de jumelage. J’ai constaté qu’en espagnol ce n’était pas évident, j’ai eu une petite discussion avec Beatriz Ramos, le terme n’avait pas l’air d’être complètement fixé, je ne sais pas s’il l’est ici en Catalogne. J’ai vu aussi qu’au niveau de la langue anglaise le mot de twinning qui vient d’être dit et qui circule, mais pour Israël par exemple où l’on parle anglais le terme de jumelage a été conservé. Je pense qu’il y a une interrogation à travers les langues sur ce que l’on veut, parce que ce n’est pas la question du contrat mais celle du désir, sur ce que l’on veut à travers ce terme et pour le mettre en forme.

 

Jacques-Alain Miller - Une ponctuation. En effet, demain sera distribué gratuitement aux membres de l’AMP le numéro zéro de ce Journal des Exceptions. Comment s’est créé ce Journal ? J’ai vu arriver un jour Yasmine Grasser, que vous avez entendue, me disant : “ Nous avons eu l’idée, entre le groupe franco-algérien et l’ACF-Méditerranée-Alpes Provence, et se sont joints à nous dans la fièvre quelques autres, nous avons eu l’idée de faire un journal pour l’AMP. Et nous sommes prêts à le financer nous mêmes, sans demander un centime aux caisses de l’AMP. ” Qu’est-ce que j’ai eu à faire? J’ai eu simplement à bénir l’initiative, à dire : “ Je suis d’accord pour que ce soit un journal de l’AMP ”.

            Le premier titre avait été “ Journal du jumelage ”. Comme c’est un terme un peu discuté, j’ai proposé “ Journal des Exceptions ”. J’ai inventé le sous-titre “ Bulletin local de l’Association Mondiale ”, voilà ma deuxième contribution. Et ma troisième a été de dire : “ Je fais confiance ”. Cela devrait se passer comme ça plus souvent dans l’AMP. C’est un instrument, l’AMP, on peut s’en emparer, s’en servir. On s’en sert bien ou on s’en sert mal. Quand on s’en sert d’une façon qui déplaît à une partie des membres, eh bien! ils le disent.

            Le mot de jumelage a été lancé par François Leguil. Je l’ai repris au vol. Je ne l’ai pas défini, je l’ai lancé pour qu’on s’en empare. Nos collègues de Rio et Toulouse s’en sont emparé d’une certaine façon qui n’a pas plu à François Leguil, il l’a dit. Mais quand nos collègues de Rio, je crois même Antonio Quinet et Sonia Alberti, m’ont dit “ Mais alors, faut-il qu’on arrête? ” — ils m’ont demandé ça quand j’étais à Salvador de Bahia, “ Faut-il qu’on arrête ces échanges? ” — j’ai dit : “ Mais pas du tout! ”. Sonia a continué de faire ce qu’elle a voulu à Toulouse. Le fait qu’on critique un ton ou une présentation ne veut pas dire : stop! Je n’ai jamais dit stop. On m’avait demandé mon avis avant, j’ai donné mon accord pour le jumelage de Rio. Il est critiqué, je trouve que la critique peut s’entendre. Je n’ai jamais dit : “ On arrête, je retire mon autorisation au jumelage Rio-Toulouse ”. Et je suis persuadé que Sonia Alberti a fait à Toulouse le meilleur travail, pour elle-même et pour nos collègues du lieu.

            On peut penser que parfois je me sers mal des instruments dont je dispose, qui sont avant tout le oui et le non. Eh bien! on me fait des critiques, je ne tombe pas à la renverse, je ne demande pas qu’on retire ce qu’on m’a dit.

            Cela a un peu débordé du côté d’Internet, comme l’a signalé Gennie. c’est vrai. Peut-être cela a-t-il un petit peu débordé — depuis quinze jours, trois semaines. Je l’avais senti venir d’ailleurs, vous verrez l’éditorial que j’ai écrit pour le Journal des Exceptions, c’était juste avant, juste sur le bord où cela allait commencer. Moi-même, je me suis retiré d’Internet parce que je ne pouvais plus suivre personnellement ce qu’y s’y passait. Mais imaginez-vous qu’en effet, il aurait suffi d’un coup de téléphone de ma part aux responsables des listes, qui sont des listes de l’AMP, pour faire arrêter tout ça, pour faire disparaître le champ où ça s’exprimait. Et, bien sûr, j’ai dû y réfléchir : quels sont les intérêts supérieurs de la liberté d’expression? Et j’ai conclu qu’il fallait laisser ces listes ouvertes, parce que la liberté d’expression, même entre guillemets, ça ne se partage pas. Et c’est justement quand il y a des abus de la liberté d’expression, ou qu’on peut ressentir comme tels, que la liberté d’expression vaut quelque chose. Si on ne peut s’exprimer que pour faire des éloges aux uns et aux autres... Comme disait Beaumarchais : “ Sans la liberté de blâmer il n’est pas d’éloge flatteur ”. C’est toujours la devise d’un grand quotidien parisien qui n’est pas toujours à la hauteur de ce patronage.

            Donc je refuse, tant que je suis délégué général, de supprimer les listes électroniques existantes, même si ça fait souffrir certains, et peut-être peut-on s’imaginer que ce n’est pas tout à fait agréable de ce côté-ci.

            Je préfère fonder,  à côté, d’autres listes, des listes supplémentaires. C’est comme Fourier. Dans la Cité de Fourier, les amoureux qui s’aiment vont ensemble, alors ils ont leur petit pavillon, il y a des amateurs de mots croisés, ils ont leur pavillon, etc. Donc, multiplions les listes! Il y a ceux qui veulent s’insulter les uns les autres, qu’ils continuent d’échanger entre eux! Donc, plutôt qu’une philosophie de la censure, je propose une philosophie de la multiplicité.

            Quand j’ai prononcé quelque chose et que ça a été transcrit et diffusé, c’est là, il faut le supporter. Ou alors, simplement, faites un autre texte pour y répondre, et éventuellement me demander que ce soit diffusé d’une manière comparable.  Ca, oui. Mais dire “ Cela ne me plaît pas, ça m’offense, alors il faut que je déchire ça ”, — moi-même, je peux avoir parfois ces impulsions, mais jusqu’à présent je n’ai jamais eu recours à cette censure.

            Par exemple, dans la Conversation sur le signifiant-maître, qui est maintenant un ouvrage traduit en espagnol, je me suis très longtemps posé la question concernant une phrase supplémentaire qui avait  été introduite après-coup par quelqu’un. Je n’ai pas pu prendre mon stylo et l’enlever. Et donc, cela a eu certaines conséquences. Parce que je ne peux pas supprimer un texte. Et même quand un texte me déplaît très fortement, je peux envoyer une réplique en demandant que ce soit publié ensuite, mais je n’ai jamais jusqu’à présent demandé la suppression d’un texte.

            Je le dis à propos. C’est ma position. On peut la considérer comme irresponsable, en tous les cas elle est réfléchie.

 

Bernardino Horne  - Voy a hablar en castellano. Quiero rebobinar un poco la cuestión, hacia atrás, refiriéndome a Brasil, que comenzó su relación al Campo Freudiano a través de grupos locales extremadamente fuertes y eficaces en algún sentido. Y también para decir que el avance, la marcha, hacia la idea de Escuela, fue una marcha lenta, y más por presión de las bases que por los líderes locales que en ese momento dirigían y ordenaban los grupos locales. Opción lacaniana, que hoy es la revista oficial, es decir de la Escuela, fue fundada, de un modo privado, siguiendo el modelo de entonces, de Uno por Uno, de El pasador de la Argentina, para poder llevar algunas ideas, para traducir algunas ideas que circulaban por el mundo, y para las cuales los líderes locales no tenían oídos. Por ejemplo, la idea de pase, de entrada por el pase y la lógica del uno por uno. Poco después de la fundación de Iniciativa Escuela, voy a dar un ejemplo del pasado sobre algo que podría dar ejemplo del presente de todas formas. Poco después de la fundación de Iniciativa Escuela se decidió que los carteles no necesariamente deberían inscribirse a través de los grupos sino que podrían hacerlo directamente a través del Campo Freudiano. Y hubo una mesa redonda sobre este problema, en Bahía, donde participó Marcela Antelo y un colega del que no recuerdo el nombre y que creo que se retiró después de ese momento, y Jairo Gerbase y yo mismo. Allí se acusó a Miller de prácticas maoístas tendientes a disolver la fuerza de los grupos, que en ese momento eran la base de nuestro trabajo. Es evidente que este modelo de invertir los argumentos sigue presente. Se acusa de intervencionismo porque se trata de avanzar en el concepto de Escuela en el concepto de uno por uno, en el trabajo hacia el pase etc, etc. Porque también hay ataques a eso en los corredores, en los pasillos y en los grupos.

Entonces, yo no creo que el problema central en Brasil sea la cuestión entre lo múltiple y lo uno, la cuestión en Brasil es entre la Escuela y los grupos y es posible que eso sea así en otros lugares también. Cuando la asamblea en su fundación, aprobó el pase hubo un torrente de entusiasmo que arrastró por un tiempo a todo el mundo y acalló esas voces de alguna forma. Son voces que retornan. Y tienen razón de retornar, porque han sido arrastrados a un modelo que no les gusta, que no les interesa. Esa es la verdad. Y ciertas propuestas, propuestas que hoy existen en otro sentido, implican retornar al modelo del Campo Freudiano, digamos un modelo federativo, modelo para salir del cual tuvimos que realizar tantos esfuerzos y tanta lucha. Me parece mucho más claro que avancemos para adelante, no que retrocedamos para atrás. Y que avancemos en el sentido de elaborar ideas para la Escuela Una, cada vez más Una, y no hacia una Escuela múltiple que disfraza el modelo grupal, modelo que es mucho menos democrático, mucho más autoritario y que da muchas menos oportunidades a todos que nuestro modelo, aunque éste tenga defectos y que debemos también rectificar.

 

Ricardo Seldes - Les pedimos por favor que durante el receso del mediodía se dirijan al pasillo que hay en las salas 1, 2, 3 para recoger los Informes que corresponden a la Asamblea General de mañana. Cada uno puede recoger el suyo. Gracias.

 

Maria Anita Carneiro Ribeiro  - Dois comentários pequenos, um dirigido à colega de Londres que acabou de falar sobre a twinning, geminação em português, e eu queria esclarecer para ela que o tema da reciprocidade, que foi entendido como a relação imaginária especular, foi bastante debatido entre nós até mesmo porque foi levantado desde a primeira hora por Guy Briole. Houve cartas, comentários, debate teórico, então, se você não teve acesso a toda esta parte do debate eu teria o maior interesse de te emprestar os textos, porque este debate já está bastante ultrapassado para nós.

            A segunda observação é sobre o comentário de Marie Hélène Brousse, que eu achei muito interessante mas que me faz retornar à fala de Marie Jean Sauret, pois me parece bastante cabível que a Tirade toque pessoalmente vários colegas no que diga respeito às suas convicções, a seu ponto, seu momento em à relação a AMP. Porém nós temos que lembrar que isto é um anuário, nós todos somos membros da AMP, nós contribuímos com a AMP e nos constituímos a AMP  e me parece que é um assunto para nós debatermos, o fato que na abertura deste anuário haja um texto que ataca, vamos usar a palavra certa porque ataca mesmo, um colega nosso da AMP, um só não, uma vez que há também alusões pouco agradáveis a Colette Soler.

            Então, eu acho que no mínimo nos deveríamos dizer algo sobre isso. Marie Hélène disse o que tinha a dizer e eu pediria a outras pessoas que dissessem o que têm a dizer. Eu, de minha parte,  me desagrada muitíssimo ter um anuário cuja abertura tem um texto contra um colega que eu aprecio muitíssimo, e cujo trabalho no Rio de Janeiro foi um trabalho estimado belíssimo, de alta qualidade, pela causa analítica. É isto que eu tenho a dizer.

 

Gleuza Salomon - Avant je parlais trois langues : portugais, espagnol et français. Maintenant à Barcelone j’ai appris un peu de catalan. Je crois qu’il y a à Barcelone ce mélange des cultures et des styles. J’ai même écrit un texte sur le gothique comme une réduction de style à partir de l’étranger, comme une acceptation de l’étranger et en même temps quelque chose du symbolique. Je veux parler aussi de mon trajet qui a commencé en 1978 et je suis au Champ freudien depuis vingt ans.

 

Jacques-Alain Miller - Est-ce qu’il a vingt ans, le Champ freudien? Je n’en suis pas sûr. Cela a commencé un tout petit peu après. Enfin, c’est comme ma petite fille, quand elle avait deux ans je lui ai demandé “ Qui est le chef? ”, elle m’a dit “ C’est moi! ”, et je lui ai dit “ Depuis quand? ”, elle m’a répondu “ Depuis dix ans! ” [rires]. C’est la même structure.

 

Gleuza Salomon - J’étais à la Conversation de Rio, de Bordeaux, de Toulouse et de Barcelone. Ce que j’ai vu dans ces quatre Conversations, c’est un point commun : l’intérêt du groupe. Chaque groupe commence à devenir plus fort et demande un leader. C’est un appel à un leader. Quelques-uns prennent cette place parfois de façon malsaine, parfois bien, ça dépend du groupe. Nous connaissons cela. Pour moi, ce moment est un moment très spécial parce que c’est un moment où nous sortons du groupe. Avant, nous étions tous du groupe, dans le sens de commencer à organiser quelque chose de très important, chacun travaillait pour cela dans les cinq Ecoles de l’AMP. Maintenant il faut travailler sur la passe et je crois que c’est cela qui est vraiment difficile, car ce moment de passe touche à un réel et chaque groupe a sa manière de répondre dans son style à cette question. Je crois qu’il faut que tout le monde ait le courage et aussi soit pressé, parce qu’on voit dans le monde actuel le racisme, et maintenant entre nous et dans la psychanalyse, et ça on ne peut pas l’accepter. On dit non.

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V . - Carmen Gallano, Bernard This, Ropo, Franz Kaltenbeck,

Graça Pamplona, Marc Strauss, Marie-Hélène Brousse,

 Graça Pamplona, Jean-Pierre Klotz, Vera Pollo,

Rainer Melo, François Leguil, Jorge Forbes

 

Jacques-Alain Miller - Merci. Une précision. Il est 12h 45, on va aller jusqu’à 1 heure et demie. Je demande qu’on ne se mette plus derrière les micros. Lorsque les interventions qui se présentent ici seront faites, je demanderai à Jorge Forbes de venir nous lire en brésilien le texte de Chico Bouargue de Olanda qui servira de note finale.

 

Carmen Gallano - Se ha hablado entre nosotros del vínculo entre nosotros, después de la orientación dada a la AMP. Han hablado varias personas y ha precisado Marie –Hèléne Brousse la orientación dada a la AMP con el texto de la Tirade. Se ha hablado también, Jacques-Alain Miller, de libertad de expresión. Bueno, todo eso me ha hecho preparar rápidamente algunas cosas que quiero decir. Me excusarán, pero para ser más precisa voy a tomar el papel que acabo de escribir. Porque está la retórica que fabrica mensajes, que fabrica mensajes que inciden de formas diversas en la audiencia, pero hay también además de la retórica hechos, actos que son para mí otra vía de la esencia de la verdad.

Para mí, el punto de partida de la crisis que estamos tratando de clarificar hoy, son dos hechos. El primero, el proceso contra Colette Soler apoyado en la acusación de pompage lanzada por Jacques-Alain Miler. El segundo, la acusación, con la consiguiente desacreditación y descalificación del cartel B del pase, de la ECF, acusación lanzada también por Jacques-Alain Miller. El tercero, después, también, que no es un punto a tratar aquí, porque de eso hablé en la Conversación de Madrid y en el Consejo de la EEP, la aplicación de ese estilo después en la EEP, y es el estilo que llamé, lo resumo así: “un funcionamiento de estado de excepción”. Bien, pero no es el punto en el que quiero entrar ahora. Ya hablé en otra ocasión.

Luego desde esos hechos, a mi modo de ver, se ha ido cristalizando una crisis. Desde el mes de junio, sobre estos hechos, ¿qué he escuchado yo? He escuchado a Jacques-Alain Miller y a Eric Laurent nuevas interpretaciones sobre los mismos hechos, nuevas cada día, variables. Pienso, he pensado que si quitas lo que tratan de justificar con nuevas teorías eso indica... porque así quizás la píldora se puede hacer más fácil de tragar, pero para mí hay una verdad que resiste a los efectos de la retórica. Y una verdad que no se eliminará fácilmente por dolorosa que sea y difícil de llevar. Es que esa píldora para mí, ese imposible de tragar y se nos atraviesa, porque ¿cómo se puede consentir a ese proceso contra Colette Soler y al cartel B?

Yo, particularmente, me reprocho, precisamente, haber tardado en manifestar públicamente, y con claridad, mi no consentimiento a esas acusaciones. Porque si ese y otros hechos traducen de facto algunas cosas de la orientación. del Delegado General, ¿cómo ver en ellas la orientación lacaniana del Psicoanálisis?. Para mí no es posible. Lo que veo es otra cosa, que es lo que a mi sorpresa vi también ayer cuando al abrí el Anuario de la AMP. Ya ha sido dicho por otros, que cómo es posible que se ponga como prefacio a la AMP la Tirade. En estos hechos que he citado veo que la orientación de la autoridad responsable se apunta a eliminar a aquellas y a aquellos que en el psicoanálisis lacaniano de la AMP resisten a la voluntad del Señor. Y entonces por eso vuelvo a cuestionar: ¿ qué tiene eso que ver, esos hechos, con la orientación lacaniana del psicoanálisis y con la reconquista del Campo Freudiano?. Experimento cómo aquél que defiende y desea otra cosa, otro modo digo, de situarse en la orientación lacaniana, y ahí preciso mi posición. Yo no me voy a orientar, esa es una diferencia con Marie-Hélène Brousse, que por otra parte aprecio mucho. Una diferencia: yo no me voy a orientar en este texto de la Tirade, ni en el final, ni en el principio, ni en el medio del texto, porque es un texto, es un texto que invita a constituirse en milicia de combate Y no. A eso digo no. Mi modo de situarme en la orientación lacaniana y en la reconquista del Campo Freudiano será otra. Entonces he experimentado cómo aquél que quiere defender otra vía, otra cosa, y lo he experimentado también en carne propia, la respuesta que encuentra es esa conminación: “ ¡márchese de la AMP! ” ¿Por qué tendría que responder a esa sugestión de que me marche?. No lo haré.

Un último pequeño punto y termino. Ayer otra sorpresa al abrir otro Anuario. Abrí el Anuario de la EEP y al leer la lista de sus publicaciones me encontré con que, no me lo podía creer, ¡qué casualidad!, sólo una no está en la lista, es la publicación: Estudios psicoanalíticos. ¿Por qué esta eliminación de una publicación monográfica anual de la EEP en la que su directora y su equipo consultan regularmente con el presidente de la EEP. No lo puedo entender. ¿Eso es decisión de la autoridad responsable?. Se podrá argumentar cómo... Puede ser un olvido involuntario. Pero aunque se me dijera que es un olvido, en psicoanálisis no ignoramos lo que un olvido significa [aplaudissements].

 

Bernard This - In utero les jumeaux se battent, donc le jumelage n’est pas un terme qui me semble adapté. Et quand une mère désigne à droite son enfant en disant “ Il est méchant, il attaque l’autre ”, il n’y a qu’une possibilité, ce n’est pas de voler au secours de celui qui est attaqué parce que le dominant donne des coups de pied et des coups de poing encore plus férocement, il suffit d’intervenir et d’apaiser celui qui est désigné comme le plus agressif, le plus méchant aux dires de la mère. Si on réussit à apaiser ce jumeau, à ce moment-là nous assistons de nouveau à des relations sereines. Ceci n’est qu’une introduction à ce que je voulais dire concernant le malaise dans lequel nous sommes. A partir du moment où un Pacte de Clairefontaine nous a invités à continuer à travailler avec tous ceux qui lisaient Lacan, Jacques-Alain Miller en était l’au-moins un mais il n’était pas désigné comme le seul, nous avons continué à travailler. Mais à partir du moment où ceux qui étaient au départ du Pacte se disputent, je me dis qu’il ne faut plus que nous nous réunissions au titre d’analystes, nous ne sommes pas dignes de constituer une Association Mondiale des analystes.

 

Jacques-Alain Miller - Parce qu’ils ne se disputent pas, les analystes?

 

Bernard This - Si, justement! Mais alors c’est au titre d’analysants que nous nous rencontrons ici. Et si Lacan nous a indiqué quelque chose d’important, c’est la création des Analystes de l’École. Seulement je regrette que les Analystes de l’École soient au service de raconter comment ils ont été choisis par un cartel qui les a désignés comme des bons, alors qu’il y en a d’autres qui sont des méchants. Le travail d’un Analyste de l’École, c’est d’analyser la dynamique de ce qui se vit ici et maintenant au sein de ce groupe. Je n’entends pas les Analystes de l’École. Lors d’une dernière Rencontre, j’avais évoqué La Fontaine et cette hydre aux cent têtes, vaut-il mieux rencontrer un dragon aux cent queues? Qu’est-ce qui est le plus dangereux? Il est évident qu’un groupe de plus de mille personnes a besoin d’une direction. Mais n’importe quel navire qui part au combat ou pour une croisière a besoin d’un commandant. Qu’est-ce qu’il hurle, le commandant, en Grèce, quand il veut que le navire quitte le quai, et qu’on largue les amarres? Il crie : “ Analysis! ”

 

Ropo  - Voy a tratar de levantar mi inhibición de hablar. Simplemente quería ponerme de parte de los que toman parte y ponerme del otro lado de lo que es la imparcialidad. A mi la imparcialidad siempre me parece aparente, me inhibe, y no puedo hablar porque me parece que es imposible ser imparcial. Cuando se pretende ser imparcial se está escondiendo algún interés. En cambio la gente, si se declara juez y parte, me parece la gente más amorosa, más realmente imparcial porque es fácil defenderse de alguien que muestra la paz Y me parece que el verdadero juez imparcial es el que es juez y parte.

 

(Jacques-Alain Miller se retire pour s’installer dans la salle)

 

Franz Kaltenbeck - Depuis un certain temps je critique cette institution qui est l’École de la Cause freudienne. Mais aujourd’hui je regretterais si elle nous quittait. Elle est en danger. Pourquoi? Parce que j’ai l’impression que nous sommes en train de perdre un peu notre discours au niveau politique. Je voudrais indiquer quelques symptômes de cette perte.

             Par exemple, quand d’un côté nous vivons un certain nombre de diktats et quand on veut refuser à quelqu’un qui a fait un texte très mesuré sur la dictature, je nomme Louis Soler, d’employer ce terme, je trouve cela scandaleux.

            D’autre part, on nous serine maintenant depuis des mois une théorie sur l’exception unique, devant laquelle il faudrait vraiment se plier. Eh bien! je vous dis qu’il n’y a pas d’exception unique, et je peux le prouver mais je ne vais pas le faire ici.

Autre terme, la démocratie. Non! elle ne nous suffit pas. Qu’est-ce que c’est la démocratie directe? C’est le court-circuitage des responsables, n’est-ce pas? Quand on veut éliminer un responsable on fait de la démocratie directe. La crise, il ne fallait pas en parler par exemple le 17 mai dernier, alors que c’était seulement un malaise, et ensuite on pouvait encore reparler de la crise.

            Une pulsion, j’ai toujours pensé que Freud avait raison quand il disait que les deux pulsions, la pulsion de mort et la pulsion de vie, étaient intégrées. Qu’est-ce qu’on fait à des fins purement politiques? On les sépare, et on met d’un côté les méchants qui sont du côté de Thanatos, et de l’autre ceux qui sont du côté d’Eros.

             Donc on trafique notre savoir pour renforcer le pouvoir. On installe une police de langage. Je crois que, quand on essaye de trafiquer le langage, il faut se défendre. Et donc j’ai proposé à un certain nombre d’amis, hier, à des analystes de l’AMP que j’ai qualifiés de “ capables ”, mais tout le monde est invité parce qu’il y a beaucoup de capables, qu’ils se réunissent pour repenser nos structures politiques et faire des propositions. On m’a dit que “ capables ” n’était pas le bon terme, donc j’aurai une autre proposition. J’ai parlé il y a longtemps de l’attention de Lacan et on pourrait par exemple créer une sorte de base, qui aurait des réflexions, des propositions, et même qui agirait, et qui s’appellerait “ l’attention lacanienne ”. Elle défendrait éventuellement tel ou tel collègue quand on refuse un enseignement, parce que c’est arrivé récemment, ou qui pourrait également critiquer nos publications, la liberté de publications de certaines personnes et la non-publication d’autres, elle pourrait également se mêler des débats sur la passe, par exemple elle aurait été très utile à l’époque du Collège de la passe.         J’invite tout le monde à se joindre à cette initiative, et je serai prêt à coordonner éventuellement les personnes qui s’intéresseraient à cette initiative.

 

Graça Pamplona - Em primeiro lugar quero dizer que aderi à AMP já em Caracas, pouco depois que ela foi fundada. Como eu, vários colegas fizeram o mesmo em Caracas, nos propondo a construir a Escola Brasileira. Então é daí que penso que gostaria que retornassem à dianteira do anuário a Proposição, a Ato de fundação e o Pacto de Paris.

            Penso que são esses os textos que devem nortear, pois assim foram norteados os propósitos da AMP, da Escola Brasileira e, acredito, das outras Escolas.

            Em segundo lugar. Celso Rennó é nosso diretor e tenho certeza que é do lugar de Diretor da Escola Brasileira como um todo que ele quer e talvez tenha tentado se colocar, malgrado, em muitos momentos, o que transparece, é um pensar na Seção Minas. Eu quero trazer à AMP que no Brasil outros colegas dão ensino em outros lugares diferentes das suas Seções de origem e também recebem pacientes de outros lugares. Talvez para a Europa seja até surpreendente que no Brasil isto se torne um problema pois sabemos que vocês estão acostumados a praticar em diferentes cidades e a dar ensino em diferentes cidades, o que é bem vindo, certamente. Neste período de conversações no Brasil algumas coisas surgiram e que me trazem inquietação. Como membro da AMP e membro da EBP.

            Transparece de declarações de colegas a dificuldade dos mineiros desta geração teriam para encontrar em Belo Horizonte analistas nos quais confiem para tornarem as suas análises, análises didáticas.  E que, por essa razão, estão procurando analistas fora de Belo Horizonte e, de preferência em Paris. Este assunto veio a tona nestas conversações e que, de algum modo me preocupa. Penso que isto se redobra em outro ponto também quando um outro colega considera que a escola de Lacan contribuiu para que o modo de manejo de Lacan das questões do grupo analítico contribuíram para que Lacan fizesse da sua escola uma SAMCDA, e que nesse momento o que teríamos de Lacan é uma escola que se orientava à passagem ao ato, ato de dissolução. Não entendo jamais o trabalho de Lacan e a sua proposta institucional como tendo contribuído contra o discurso analítico mas ao contrário.

            O terceiro ponto que surgiu neste contexto de conversações é a pesquisa de um outro colega a partir de textos das história da psicanálise de Elisabeth Roudinesco onde concluiu dizendo que Miller vai ao Brasil tantas vezes para que alguém um dia lhe diga, Miller você foi o analista do velho Lacan. Eu acredito que este conjunto de coisas traduzem hoje uma pergunta que nos cabe colocar: aonde estamos hoje com a questão da transferência? Porque entendo que de um lado surge um certo cerceamento das transferências analíticas e que isto se rebate no cerceamento do que, de alguma maneira, nos articulou como conjunto no que chamamos de transferência de trabalho. É a causa analítica que permite estarmos hoje todos aqui reunidos.

            Finalmente, para concluir, eu gostaria de dizer à Leguil que ele foi alguém muito importante na escola brasileira e, a nível particular, na Seção Rio, pelos para mi.  Pelos momentos que nos foi possível trabalharmos juntos no Brasil ainda na época da construção da Escola Brasileira em que ele esteve dando um seminário em Salvador. Queria perguntar à Leguil se ele entendeu que quando o convidamos no final do ano passado para ir ao Rio dar algumas conferências no contexto de um jornada, e que nessas jornadas teve exposições de arte e festas de encerramento, se isso foi espetacular, e se ele entendeu isto como um espetáculo de líderes também. Porque não foi no lugar de líder que você veio para nós.

 

Marc Strauss  — Je voudrais “ rebondir ”, pour reprendre le terme utilisé précédemment par Pierre-Gilles Guéguen, à partir de son intervention et de celle de Marie-Helène Brousse. Ils nous disent tous deux que si guerre il y a, ce n’est pas une guerre entre nous. Ils qualifient aussi la Tirade de “ mise au point ”, enfin se disent d’accord avec les objectifs présentés à la fin de ce texte.

            Il n’est pas question de guerre entre nous. Pourtant, que voit-on?

            Pour commencer par un exemple de ce qui vient de se passer, nous venons d’entendre Pierre-Gilles Guéguen récuser sans appel une expression de Marie-Jean Sauret, qui avait défini l’AE à partir de la formule “ objection au savoir ”. Pierre-Gilles invalide cette expression et y oppose celle de “ rebondir ”. Cette façon de faire ne me paraît pas pertinente. D’ailleurs, pour rebondir, une balle doit bien rencontrer un obstacle, une objection dans son trajet initial.

            La guerre ne serait pas entre nous, disent-ils. Mais enfin, que voit-on? Qu’est-ce d’autre ? Antonio Quinet en a parlé : nous assistons depuis deux ans à une succession de guerres.

            D’abord la guerre autour de l’accusation de pompage.

            Puis une dite guerre des cartels.

            Ensuite une guerre autour du jumelage Toulouse/Rio. C’est dans ce contexte que Francois Leguil a fait son texte, ce qui oriente la lecture de celui-ci, tout comme c’est dans le contexte de l’accusation de pompage contre Colette Soler qu’il est intervenu à Arcachon.

            Ensuite encore il y a eu le problème de la Présidence de l’ECF.

            Enfin, dans de nombreux endroits de notre monde la situation est tendue : Rio, Madrid, d’autres encore.

            Est-ce le meilleur moyen de préparer une “ guerre ” avec l’IPA, pour la psychanalyse, que de se livrer à des guerres internes?

            La Tirade est peut-être une mise au point. Mais si c’est le cas, elle se fait en épinglant, en fixant, des collègues, des membres de l’AMP, à des positions qui ne sont pas nécessairement justes, et qui de surcroît ont toutes les raisons de leur être intolérables. Mettre ce texte en tête de notre annuaire cristallise un conflit et en fait une guerre interne.

            Il y a donc deux choses très différentes. D’une part il y a un objectif affiché, dont je peux dire que je le partage avec Jacques-Alain Miller, Marie-Helène Brousse et Pierre-Gilles Guéguen. D’autre part, il y a des méthodes, avec lesquelles je suis en désaccord, et dont je doute qu’elles soient même compatibles avec l’objectif.

 

(Jacques-Alain Miller revient à la tribune pendant l’intervention de Strauss)

 

Marie-Hélène Brousse -- Je vais reprendre le dernier point que je n’ai pas beaucoup développé. Cela fait un an et demi qu’un certain nombre d’entre nous marquent leur souffrance. J’y suis très sensible, sensible par exemple à la souffrance qu’a manifestée Marie-Jean Sauret. Pendant le Collège de la passe il y a eu aussi des moments très durs où chacun d’entre nous souffrait. Ce processus de séparation, entre nous parfois, produit des effets de souffrance indéniables, je les entends, je les vois, parfois je les ressens, et je suis désolée pour Marie-Jean. Mais même quand c’est la mienne, elle est de peu de poids, pour moi en tout cas, par rapport à ce que je vais dire maintenant. Je respecte cette souffrance, mais elle ne m’arrête pas, parce que j’ai quelque chose de plus important qui me détermine. Ce plus important qui me détermine je le vois précisément à deux endroits de la fin de la “ Tirade ”, mais aussi dans le débat avec Marie-Jean. Je veux bien qu’on mette mon nom à la place de celui de Marie-Jean, je me sentirai plutôt honorée.

            En tout cas, les deux points en question sont les suivants.

            Le premier est un débat sur le statut à donner à la parole de Lacan. Gennie parlait de l’écrit. C’est vrai que c’est un écrit mais un écrit très spécifique, qui préserve sa puissance d’énonciation. C’est pour ça qu’il compte, et c’est pour ça que, comme Gennie le disait, on peut y faire fond. Il y a, dans la culture contemporaine, une tendance très forte à la mortification de l’énonciation dans les textes, en particulier dans celui de Lacan. Cela se voit dans différents endroits du monde et aussi dans différents endroits de la société, l’université étant le lieu majeur de cette mortification de l’énonciation. Donc quand, dans la “ Tirade ”, Jacques-Alain Miller accentue cette question, j’en fais même un élément majeur de l’avenir que je veux pour l’enseignement de Lacan au XXIe siècle.

            Deuxième point. Il y a, en cette fin de XXe siècle, une question à se poser, question qui me détermine : Est-ce que la psychanalyse franchira ou non le XXIe siècle? Dans Le savoir du psychanalyste Lacan en parle comme d’un symptôme, même si dans le Séminaire Le Sinthome il dit que la psychanalyse n’est pas un symptôme. Il développe tout un paragraphe sur la question, extrêmement complexe, demandant : Est-ce que ce symptôme survivra ou ne survivra pas au XXIe siècle? Nous devons prendre cela au sérieux. Mais je suis attachée comme analysante et comme analyste au discours analytique, je préfère un monde avec le discours analytique, et considère que l’AMP est un outil fondamental dans cette lutte. Or, en ce moment, à l’AMP, nous assistons à un processus de destruction.

            Dernier point. Cette question de rendre vivantes et l’énonciation de Lacan et la psychanalyse au XXIe siècle, est l’effort à quoi il faut s’atteler. Il faut le dire simplement. Comme Gennie Lemoine, sans faire de phrases, je dirai donc que je veux entrer au XXIe siècle avec l’orientation que jusqu’à présent Jacques-Alain Miller a donnée, à l’étude de Lacan et qui met au premier plan son énonciation. C’est simple, c’est ça. Pas plus que ça, avec tout le respect que j’ai pour les personnes humaines, pour leur souffrance, pour la mienne propre. Là-dessus, intraitable. [Esquisses d’applaudissements aussitôt réfrénés]

 

Vera Pollo  ¾Queria colocar uma questão. Ela é mais dirigida para Jacques-Alain Miller. Eu trabalho como adjunta de Cartéis na Seção Rio e vivemos, nestes últimos tempos, precisamente do mês de abril para cá, um processo de desintegração completa de um trabalho que era feito de forma combativa e sem ser guerreiro a ponto de ser mortífero, mas de forma entusiasmada e combativa. E este ritmo teve que ser quebrado, o ritmo de publicação, inclusive publicações ao meu ver bastante sérias, bem feitas com todo o respeito à enunciação de Lacan, onde não se sabia mais se era conveniente ou não publicar Marie-Jean Sauret, o ritmo teve que ser interrompido, o Conselho teve que ser consultado com mais cuidado. São uma série de coisas como estas.

            Então, a pergunta que queria fazer a J.A.Miller é se ele poderia explicar um pouco mais porque na Carta Madrilenha na parte de Apocalypse now ele esperava a vinda de Tânatos desde a fundação da EEP e porque esta proximidade da vinda de Tânatos e a EPB, na sua carta, e porque no Rio quando da conversação da EBP você nos diz,  "me acusam de ditador mas vejam bem que o Conselho de vocês me levara a tomar uma decisão, a única tal vez, sem consultar ninguém", enfim, se você poderia  falar mais sobre isto.

 

Jean-Pierre Klotz  - Dans la psychanalyse on est toujours responsable de ce qu’on dit, de ce qu’on écrit, et même de la façon dont on est lu - même si on prétend qu’on n’est pas lu comme on voudrait l’être ou comme on avait prévu de l’être. On ne peut récuser la responsabilité des suites. On a bien sûr la possibilité de répliquer, de reprendre, de continuer à parler - comme cela se fait ici dans la Conversation et dans toutes les autres Conversations.

            La “ Tirade ”, pour moi, n’est pas un texte où l’essentiel est la mise en cause de collègues. La “ Tirade ” est un texte d’orientation, qui a été produit, certes, dans certaines circonstances, mais aussi à un moment précis et qui a marqué un tournant. Son auteur, Jacques-Alain Miller, l’a précisé au moment même où il la prononçait, c’est contenu dans le texte. C’est un texte d’orientation qui, pour moi, est particulièrement clair, et qui vise, comme il y est dit, reprenant le terme de Lacan, la reconquête du Champ freudien. Le terme de reconquête est un terme qui fait partie du vocabulaire guerrier, du vocabulaire du combat. L’AMP, les Écoles, sont des organes de combat, d’un combat tourné d’abord vers l’extérieur, à l’extérieur d’elles-mêmes. Il se trouve qu’il y a sans doute trop de combats intérieurs en ce moment. On peut le penser ainsi. Il est vrai que pour nous, l’intérieur et l’extérieur sont noués, souvent.

            Eh bien! il me semble que la “ Tirade ” vise d’abord à aller au-delà de ces combats intérieurs et à recentrer les choses sur le combat extérieur. Que l’AMP soit un organe de combat a au moins le mérite de nous éviter de considérer que notre visée essentielle est notre paix et notre tranquillité. Ce n’est pas dans une atmosphère de paix et de tranquillité qu’un combat comme le nôtre pourra être mené. Tous les noms qui sont cités dans la “ Tirade ”, au fond, peuvent être considérés comme des contributeurs à ce combat. Telle est la bonne manière, me semble-t-il, de prendre les choses, si on veut bien subordonner à l’École et à l’AMP l’incidence qu’on peut avoir dans ces affaires. Et quelles que soient les critiques qu’on veuille émettre, chacun a la possibilité, bien entendu, comme Marie-Jean Sauret a commencé à le faire, de rectifier, ou de reprendre, ou de redire, comme il l’entend. Il est parfaitement légitime de le faire pour qui se croit lésé.

            En tout cas, nos Annuaires commencent par des textes d’orientation, et je trouve que de ce point de vue la “ Tirade ” vient tout à fait à sa place, telle qu’elle est, d’autant plus que je n’y vois nulle injure personnelle, au contraire même à l’occasion. C’est cela l’essentiel. Voilà ce que je voulais dire.

            Je suis par ailleurs en accord complet avec ce que vient de dire Marie-Hélène Brousse, et en particulier avec ce qui pour moi prime sur tout aujourd’hui : le combat que Jacques-Alain Miller a initié il y a maintenant de nombreuses années, il faut qu’il puisse continuer à le mener, à nous y mener, et qu’il ait les moyens de le faire, au-delà des susceptibilités personnelles. C’est un choix que je ne cesse jamais de faire et de refaire, ce n’est jamais un choix une fois pour toutes, mais c’est un choix qui jusqu’à nouvel ordre m’oriente avant toute chose, pour ce qui concerne la psychanalyse dans son incidence collective.

 

Rainer Melo  ¾Fiquei surpresa quando percebi que fazia parte da pauta da Conversação hoje a questão da geminação porque me parece que foi idéia de Judith Miller esse intercâmbio entre as escolas e pensei que já tivesse encerrado essa história e percebo que tem questões mais importantes para serem discutidas aqui como por exemplo a questão da política da Escola centrada por exemplo na Tirade.

            Esta política está trazendo conseqüências lamentáveis como a saída do nosso colega Jairo Gerbase que sempre trabalhou pela causa analítica e pela Escola. Também tratar as conseqüências  dos insultos aos colegas que sempre trabalham, trabalharam para a construção dessa Escola. Na conversação do Rio, eu falei sobre o Miller político e o Miller teórico. De forma que o Miller teórico eu o considero brilhante e admiro, então, porque não na política esse Miller proceder da mesma forma?

 

François Leguil - Plusieurs questions ont été posées sur le jumelage, je n’y répondrai pas, je considère que l’on a plus rien à en dire pour aujourd'hui. Jacques-Alain Miller a proposé un débat entre Antonio et moi-même, Antonio a expliqué pourquoi il ne voulait pas monter à la tribune, on doit parfaitement respecter cela, et après tout on n’est pas obligé de passer la journée à parler de cela. Cet après-midi, j’aimerais bien intervenir pour dire mon point de vue sur la mise en série, que ce soit la mise en série que Antonio Quinet a faite, celle qu’a faite Carmen Gallano, ou celle de Marc Strauss. Cette mise en série de phénomènes, qui se présentent dans un premier temps comme disparates, et dans un deuxième temps en continuité, ayant une profonde logique, eh bien ! la logique, c’est que tout cela traduit l’action d’un homme : quelque chose qui doit être désormais refusé absolument et tenu pour inacceptable. Mais on peut prendre la série autrement. On peut la prendre comme le fait que cela traduit à chaque fois une réponse prise dans un même combat, et à ce moment-là on peut analyser chacun des faits qui ont été mis dans la série comme étant à chaque fois quelque chose qui nous est connu, parce qu’une personne offre un type de réponse à ce qui lui paraît contraire à la poursuite de notre combat. Cet après-midi j’aimerais beaucoup intervenir pour dire ce que je pense de cette façon de mettre en série les choses sans dire la logique qu’il y a derrière.

 

Jorge Forbes - Poema. Cuando llegué a Barcelona supe que tendría que escoger rápidamente un texto literario brasileño, que junto con otros textos serán leídos durante la Conversación. La primera idea que me vino fue de proponer un texto de un poeta contemporáneo Carlos Drummond de Andrade que se llama "José" pero no lo hice. No lo hice por tres razones. Primero por que este texto empieza diciendo “la fiesta acabó, la luz se apagó, el fuego soñó, la noche expiró y ahora os dejo”. Entonces este texto no es muy animador. Entonces pensé que no [¿] que la fiesta puede continuar. Entonces escogí otro autor muy conocido de ustedes, que se llama Francisco Buarque de Hollanda, Chico, es un poeta, es un escritor y es un músico.[¿] Y la música brasileña habla para los brasileños más que su literatura pura. Es un texto que dice que la fiesta puede continuar y al mismo tiempo da una visión (¿dependiente de la hora de la verdad?). En la conversación cuando decimos que estamos en la hora de la verdad no quiere decir que sea el juego de la verdad.  La hora de la verdad es también saber dar un paso y a veces ver que la fiesta puede continuar, no siempre una sola fiesta, que lo mismo puede haber dos fiestas.

            Entonces pensé en escojer un texto que cuenta la historia de un maestro sala y una porta estandarte dentro de una otra escuela, de una escuela de samba. Para situarles, es el momento en que la escuela va a salir en la avenida, el maestro sala no ve más a la porta estandarte, la persona que lleva la bandera de la escuela, porque hay una distinción entre sambar en la avenida y entre sambar en las galerías, y se puede entonces optar por la fiesta de la avenida o por la fiesta de las galerías. El texto se llama: “Quien te há visto, quien te ve”. Cabrocha es la mulata que baila bien el samba.

Você era a mais bonita das cabrochas desta ala

Você era a favorita onde eu era o mestre sala

Hoje a gente nem se fala

mas a festa continua

Suas noites são de gala

nossa samba entra na rua

 

Hoje o samba saiu

procurando você

quem te viu

quem te vê

 

quem não a conhece

não pode mais ver pra crer

quem jamais esquece

não pode reconhecer

 

todo ano eu lhe fazia

uma cabrocha de alta classe

de dourado lhe vestia

pra que o povo admirasse

 

não sei bem com certeza

por que foi que um belo dia

quem brincava de princesa

acostumou a fantasia

 

hoje eu vou sambar na pista

você vai de galeria

quero que você me assista

na mais fina companhia

 

se você sentir saudade

por favor não dê na vista

bata palmas com vontade

faz de conta que é turista

 

Jacques-Alain Miller - Merci. Nous nous retrouverons à 16 heures pour la deuxième partie de la Conversation. Je prie les AE et les présidents de m’excuser, mais il était difficile d’interrompre la dynamique de la Conversation.

 

Fin de la matinée

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 La Grande Conversation de Barcelone

 

*****

 

Deuxième partie

 

I. - Ouverture

 

Jacques-Alain Miller - Bon, je vois que les opérations postprandiales sont longues malgré le temps qui avait été donné. La tribune commence à se remplir, elle est presque complète, mais ne l’est pas tout à fait.

            Alors, je vais procéder à la lecture d’un auteur. Je ne sais pas si c’est un classique, mais c’est un auteur qui nous intéresse. Il s’agit d’un texte inédit de Jacques Lacan qui vient de paraître dans la publication que voici, Les Cahiers cliniques de Nice, numéro 1, de juin 1998. Et vous trouvez en deuxième place dans le numéro la conférence de Lacan faite à Nice sur “ Le phénomène lacanien ”.

            On en connaît le titre parce que Lacan y fait lui-même référence à son Séminaire RSI de 1974 qui a été publié dans Ornicar? n°2. Et comme la transcription a été faite à Nice même où avait été prononcée la conférence, j’ai pensé que c’était le meilleur lieu pour la publication.

            Pendant que la salle se remplit, je donnerai lecture de fragments de ce texte, que j’ai dû établir à partir de la transcription.

            “ C’est évidemment une faiblesse que d’avoir accepté ce titre. ”, dit Lacan.

            “ Lors de la séance de réception de mon ami Claude Lévi-Strauss à l’Académie française, il m’avait semblé que celui-ci élevait l’Académie française jusqu’à l’initiation, c’est-à-dire réduisait l’initiation à rien. Naturellement, cela me tracassait. Je lui ai posé peu après toutes les questions qu’il fallait, grâce à quoi je me suis aperçu que, effectivement, il réduisait l’initiation à ce que comporte l’accession à l’Académie française, ce qui m’a encore plus affecté - non pas du tout que je tienne à l’initiation.

            Non seulement je n’y tiens pas, mais je pense, pour tout dire, que l’initiation est toujours un truc assez moche.

            (...)

            Je tâcherai de vous faire sentir, pendant cette chose comme ça qui s’appelle une conférence, à quel point je n’y crois pas, à la nature. Ceci est d’ailleurs frappant - dans une culture, dans ce qu’on appelle ainsi au nom de la nature - la nature qui serait -, il y a différentes conceptions de la nature.

            Je ne crois pas beaucoup à l’initiation, tout en le regrettant un peu, comme tout le monde, enfin comme tous les débiles. Ce que je me sentirais dans la nature... Malheureusement, vu que je suis analyste, il m’est totalement impossible d’y croire.

            L’analyste - au moins ai-je essayé de faire qu’il y ait des analystes de cet acabit - est quelqu’un qui réalise - le pire est qu’il faut qu’il le réalise lui-même - que ce dont il s’agit dans l’effet de toute culture, au fond du fond du tourbillon, je veux dire de ce qui fait cause - eh bien, c’est un déchet.

            Tout le monde ne s’en aperçoit pas, mais seul a le droit de s’autoriser d’être vraiment un analyste celui qui s’en est aperçu. Être un déchet est ce à quoi aspire sans le savoir quiconque est un être parlant - je n’emploie ce terme que parce que je ne sais pas à qui je m’adresse, vous êtes trop nombreux.

            Quiconque est un être parlant est pris dans ce tourbillon qui est la vraie course de son désir - désir dont vous avez sans doute appris à l’occasion que c’est l’essence de l’homme. Un certain Spinoza s’en est aperçu, bien avant que la psychanalyse existât. Dieu merci, il jette un voile sur ce qu’il en est de l’authentique cause du désir. ”

            Je passe.

            “ Si j’ai accepté ce défi, c’est parce que j’admets qu’il y a des effets lacaniens.

            De quel ordre sont-ils? Evidemment, de celui que je veux.

            Cela n’a rien à faire avec le phénomène au sens, disons, le plus sérieux qui est donné à ce terme. Comme il y a ici, je le suppose, quelques personnes pour s’en douter, c’est celui qui l’oppose au noumène. Ce sont des histoires de philosophie, de ces choses qui traînent dans l’enseignement.

            (...)

            (...) On dit que le phénomène est ce en quoi les choses, comme on s’exprime, nous apparaissent. Elles ne nous apparaissent qu’à travers la faiblesse de nos sens, et nous ne soupçonnons pas ce qui peut en être de leur réel. C’est une vue modeste, mais dont il s’agit justement de rendre compte.

            (...)

            Ce que je voudrais, c’est faire que le discours analytique se tienne assez pour s’enseigner de façon aussi rigoureuse que la science. Ce qui, pourtant, me rend ce dessein difficile à réaliser, c’est que, quoiqu’elle en pense, la science ne s’est pas encore donnée son propre statut.

            Bien sûr, me dira-t-on, c’est l’expérience qui fait son statut. Il est pourtant bizarre et regrettable que l’expérience ne mène strictement à rien quand l’appareil mathématique ne la soutient pas. C’est très précisément de cet appareil que, de façon datable, la prétendue fécondité de l’expérience s’est opérée dans la science.

            Quand la science en question, qu’elle soit physicienne ou biologiste, se targue de trouver sa règle dans l’expérience, elle omet complètement qu’il n’y a d’expérience sensée que depuis Galilée, pour l’appeler par son nom. Il a fallu frayer les choses d’une façon telle qu’on renonce à se servir de ses intuitions, c’est-à-dire de quelque chose de sorti de l’imaginaire, et qu’on se passe de ce qui va très bien avec ces intuitions - il s’agirait encore de savoir pourquoi -, à savoir les grands mots, les mots qui font sens.

            Il n’y a pas à dire, moi aussi - même en voulant frayer ce qu’est l’analyse, je suis forcé d’emprunter de ces grands mots, des mots qui font sens. Qu’est-ce que c’est, l’imaginaire, le symbolique, le réel, si ce n’est quelque chose qui fait sens?

            Comme vous le voyez, l’exercice de mettre au pas un certain nombre de gens ensemble sans retomber dans l’ornière philosophique, n’est pas une petite affaire.

            La science elle-même n’ayant absolument pas éclairé ses principes, à savoir sur quel pied elle danse, je n’ai strictement d’autre point d’appui que la pratique analytique.

            A ceci près que - et je m’en félicite - ce n’est pas moi qui l’ai inventée. C’est un nommé Freud qui a fait le travail de l’introduire.

            Nous n’allons pas nous mettre à réfléchir sur le fait qu’il croyait avoir là-dessus l’appui de vérités scientifiques établies. Dieu sait à quel point il se gargarise de notions dites énergétiques. (...) Mais jusqu’à nouvel ordre, pour implanter une énergétique au niveau de la pratique analytique, il faut vraiment tirer les choses par les cheveux.

            (...)

            Dans la pratique analytique, ce dont il s’agit ce n’est pas simplement de chatouiller. On s’aperçoit qu’il y a des mots qui portent et d’autres pas. C’est ce qu’on appelle l’interprétation.

            C’est par là que j’ai commencé à introduire la sorte de cogitation à laquelle j’invitais les co-praticiens. Je leur ai demandé de réfléchir (...) sur le sujet de savoir comment ils pouvaient bien se faire qu’ils opèrent (...) avec les mots. (...)

            Quand j’ai introduit cela, il y a vingt-et-un ans ” - ça c’est ce que Lacan dit en 1974, il se réfère au Rapport de Rome de 1953 - “ , cela fait du tirage un tout petit peu de tirage. N’allez pas vous imaginer qu’il y en a eu un très grand. Les psychanalystes sont comme tout le monde, comme vous, ils sont sourds à ce qui ne leur plaît pas. Même parmi mes élèves les plus proches, ils étaient sourdingues à la remarque que je leur faisais, qu’il valait peut-être la peine de remettre en cause quelque chose de l’acquis pour introduire la question de comment cela peut-il bien opérer. ”

 

            Bon, on peut peut-être commencer.

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II. -Jacques-Alain Miller

 

Jacques-Alain Miller  - Ce matin, nous avons eu, d’après le compte qu’a tenu Lucia D’Angelo, 34 prises de parole. Je constate que, par rapport à l’écriture sur Internet, le ton et le contenu étaient plus civils. C’est bien.

            A l’heure du déjeuner, une collègue, que j’aime bien — je l’ai vu passer — m’a demandé, presque les larmes aux yeux : “ Enfin, est-ce que vous allez dissoudre? ”. J’ai dit : “ Pourquoi dissoudrais-je? ”. Elle m’a dit : “ Mais est-ce que vous allez tolérer l’existence d’une opposition dans l’AMP? ”. Je lui ai dit : “ Je n’ai pas l’intention de demander la dissolution de l’AMP ”.

            En effet, je suis d’accord avec cette collègue — je peux la nommer, c’est Diana Kamienny, argentine de Paris, française d’origine argentine — je suis d’accord avec les deux mots qu’elle a prononcés : “ une opposition ”. Il n’y a pas de quoi tomber dans les pommes pour autant.

            Evidemment, avant, apparemment il n’y avait pas d’opposition. Enfin il y en avait une, mais elle n’était pas explicite, elle ne se connaissait pas tout à fait elle-même.

            Comment est-ce que je vois les choses de cette matinée? Je le dis parce que plusieurs m’ont interpellé : “ Mais vous n’allez pas parler ?! ”. Je compte parler demain, je présente un long rapport, mais je veux bien parler tout de suite aussi, un petit peu.

            Comment m’apparaît cette matinée? C’est plutôt la bonne surprise. La bonne surprise est que ce n’est pas strident. Personne ne m’a comparé au roi du Maroc — tant mieux [rires].

            Au niveau du contenu, j’ai retenu ce qu’a dit Bernardino Horne : le débat est celui de l’École et des groupes. Cela me paraît très exact.

            Au fond, quelles sont les interventions qui ont marqué? Ce sont celles qui mettent en évidence, au sein de l’AMP, ce que j’appellerai le retour du multiple. Le Champ freudien, les Ecoles, l’AMP, tout cela est le résultat d’une grande aspiration à l’unité. Et il était sans doute fatal - on s’en aperçoit après-coup, évidemment - que cela produise un retour du multiple.

            Eh bien! c’est avec cette grille, disons, que j’ai entendu, au fond sans surprise, Antonio Quinet, Carmen Gallano, Marie-Jean Sauret, et également - bien qu’il n’ait pas la même implantation locale - Marc Strauss, dont j’ai perdu une partie de l’intervention.

            Qu’est-ce qu’on a vu avec ces quatre interventions? Eh bien! on a vu — je parle pour moi, bien sûr —, avec une sorte d’évidence, qu’ils se sont réunis à l’avance, qu’ils ont synchronisé leurs interventions, qu’ils se sont donné le mot, qu’ils ont répété, chacun dans son style propre, la même histoire, qui commence avec le pompage, qui continue avec le Collège de la passe et le fameux cartel B — dont je signale en passant qu’il a cinq membres, il y a peut-être des membres de ce cartel qui sont ici et qui pourraient aussi vouloir parler —, une histoire qui se termine par la même demande de retrait de l’annuaire de l’AMP, ou la demande d’en enlever la Tirade.

            Il n’est pas question d’enlever ce texte, d’aucune façon. Ce texte indique exactement ma position. Il indique très précisément le moment où j’ai compris ce que j’ai dit, à savoir que, pour un certain nombre dans l’AMP, le grand problème du Champ freudien c’était moi —et que leur pensée était toute tournée vers moi : comment m’arrêter, comment me freiner, comment me contrôler, comment m’empêcher, etc — et qu’ils me considéraient comme une sorte de furoncle, de symptôme, qu’il y aurait une tumeur qui aurait poussé au milieu de l’AMP.

            Ce n’est pas une conception que je peux partager. Donc, au moment où j’ai aperçu ça - c’est contingent, je l’ai aperçu en écoutant quelqu’un -, au moment où je l’ai aperçu je l’ai dit. Et j’ai dit en même temps que cela me paraissait pour le moins un point de vue très très étriqué, très très médiocre.

            Je crois que ce que j’ai aperçu là est bien là. C’est tout à fait exact, il y a en effet un certain nombre de gens de l’AMP, de collègues de l’AMP, qui sont réunis par l’idée que le grand problème c’est moi, et qui depuis lors se réunissent en groupe, se mettent d’accord en groupe.

            C’est d’ailleurs un groupe  qui a décidé, il n’y a pas si longtemps : “ Pas de réconciliation ”. Il y a eu une réunion en forme de nos collègues où ils ont débattu entre eux pour décider qu’ils ne voudraient pas s’engager dans le chemin d’une réconciliation.

            Il y a donc désormais dans l’AMP un groupe constitué qui se réunit régulièrement. J’en ai parlé  avec Colette Soler, je lui ai dit que je ne pourrais pas en parler davantage, et je lui ai demandé de nous expliquer elle-même quel était selon elle le sens de ces réunions - il y en a eu une il y a deux jours, il y en aura une autre ce soir -, ces réunions de groupe, comme on dit, nous. Voilà.

            C’est donc une première grille de lecture : il y a un retour du multiple, et des collègues bien implantés à Rio, à Madrid, à Toulouse, qui se rapprochent, se lient, se réunissent, s’en prennent au délégué général de l’AMP, s’en prennent souvent également aux instances responsables de leurs Ecoles —à ma connaissance, ces collègues sont également en opposition avec les instances responsables de leurs Ecoles.

            Deuxièmement, il y a des projets qui se tissent, d’une sorte de Champ freudien bis qui serait universitaire. Cela se passe entre l’université de Buenos Aires où enseigne Gabriel Lombardi, l’université de Toulouse, l’université d’Antioquia près de Medellin où est Palacio, avec un relais à l’université de San Paulo, également à l’une des universités de Rio, et à Bahia.

            C’est-à-dire que nous avons parmi nous un certain nombre de collègues qui ont à mon avis — et je serai très content de les entendre là-dessus —la vieille idée qu’ils pourront, à partir de l’université, subtiliser au discours analytique son agalma,, qui parfois sont irrités par les injustices du transfert, et qui préfèrent le modèle d’organisation du discours universitaire, où chacun est maître chez soi quand il a sa chaire, où il n’y a pas une énonciation dominante, où un professeur voisine avec l’autre, tranquillement, sereinement. Il y a des collègues pour qui ce type d’organisation de discours est plus agréable, leur convient mieux que le mode plus chaotique, plus sauvage, plus compétitif, qui règne dans nos associations analytiques.

            Périodiquement, on voit en effet des tentatives de détournement se produire. On a vu celle de N* à une époque. J’étais bien placé pour en réaliser une à un moment donné, et j’ai préféré ne pas le faire, et développer le Champ freudien hors de l’université.

            Lacan a pris même ça tellement au sérieux que dans son organisation des quatre discours, il met en quelque sorte le discours universitaire après le discours analytique. C’est-à-dire : ça finira à l’université. Eh bien! le jour où le discours analytique sera un discours mort, où plus personne ne se prêtera à l’expérience, n’en prendra plus le risque, alors ce sera l’heure d’écrire sur nous, alors ce sera l’heure de classer les concepts analytiques, et on enseignera la psychanalyse pour faire des professeurs d’histoire de la psychanalyse.

            Il y a quelque chose d’irritant en effet pour le discours universitaire dans la résistance que lui oppose le discours analytique. Donc, je vois se mettre en place, disons, une ébauche de réseau, sur nos marges, je vois des négociations s’ébaucher, au moment où, en effet, il y a des difficultés internes dans l’AMP. Cela me fait penser aux images noir et blanc de vieux films américains, où les vautours tournent autour d’une proie. Je vois ça.

            Troisièmement, il y a le  désir de l’effacement de l’énonciation.

             Ce qui efface de façon majeure l’énonciation, c’est le discours universitaire, car c’est, au fond, le pompage généralisé. C’est ce qu’on a fait avec Lacan, et c’est ce qu’on voudrait faire avec nous : tout le travail du Champ freudien, chaotique, depuis près de vingt ans, ordonner tout ça, en faire quelque chose d’aseptisé, de recevable, pour être distribué et donner lieu, si possible, à des diplômes. Cela tourne la tête à des gens, ça, d’être des maîtres du tampon : on tamponne et on a un diplôme; et quelle injustice de ne pas pouvoir faire ça avec la psychanalyse ! Et donc, ça les taraude toujours, de le faire.

 

            Voilà ma grille de lecture pour cette matinée. Comme dirait l’autre, je peux me tromper. De tout façon, je continuerai d’écouter. Mais voilà comment je lis les choses.

            Alors, ça nous indique de préparer quoi, ça?

            Selon moi, il y a un retour du multiple. Cela implique donc l’Aufhebung du Un, si je puis dire. Il faut accentuer l’unité, qui est présente dans le Champ freudien depuis l’origine, c’est-à-dire faire un pas en avant dans l’unité, pour répondre à ce retour du multiple.

            Ce pas en avant porte un nom, c’est l’École Une. J’ai dit ce mot à Rio presque par hasard, Ricardo Seldes l’a entendu. Alors, il est allé à Buenos Aires en disant : Miller parle maintenant de l’École Une. Et beaucoup ont dit : mais c’est très intéressant, etc. Et puis cela m’est revenu : alors, qu’est-ce que c’est, l’École Une? Eh bien! je ne sais peut-être pas tout à fait encore. Mais ce que je sais, c’est que  la seule réponse possible au retour du multiple dans l’AMP, c’est un pas en avant dans la voie de l’unité.

            Beaucoup veulent ça, beaucoup veulent que nous soyons plus proches. D’autres, au contraire, veulent que nous soyons plus éloignés, rester tranquilles chez eux, et s’unifier seulement au niveau des chefs de groupe, qui tiendraient de temps un temps un concile. Très bien. Ce sont deux conceptions tout à fait différentes.

            Deuxièmement, puisqu’il y a actuellement une offensive de type universitaire, très bien : avec l’Institut du Champ freudien, les Sections cliniques, les Instituts brésiliens, le Centre expérimental de Buenos Aires, etc, il s’agira là aussi de faire un pas en avant, parce que c’est notre protection contre le discours universitaire.

            Et enfin, au moment où il y a une tendance à l’effacement de l’énonciation, il faut, plus que jamais, favoriser, pour chacun des membres de l’AMP, la possibilité de parler dans son style propre. Je parle des membres un par un - non pas, comme on l’a vu, synchronisés dans des conspirations qui sont évidemment très vite éventées, vu ce qu’est notre milieu; il s’agit de faire droit à l’exception multiple, et de faire de notre réunion une réalité vivante.

            Voilà, très simplement, comment j’ai entendu la Conversation de ce matin, et l’essentiel des réponses qu’il me semble qu’il faut y apporter. Je ne développe pas davantage, puisque ceux qui sont membres de l’AMP auront demain à l’Assemblée générale un long rapport de ma part.

 

            J’ai noté les noms de personnes qui avaient à parler et qui n’avaient pas pu le faire à la séquence précédente : Celso Renno, German Garcia, Lilia Mahjoub, et je crois que Colette Soler m’a dit qu’elle souhaitait intervenir cet après-midi. Je demande à ces collègues, s’ils désirent parler, de se rendre auprès des micros. 

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III. - Celso Renno Lima, German Garcia, Lilia Mahjoub

Colette Soler, Pierre-Gilles Guéguen

 

Celso Renno Lima - Eu penso que a exposição que acaba de nos fazer Jacques-Alain Miller, a partir de suas elaborações, e do que nos trouxe Bernardino Horne, simplifica bastante o que eu tenho para dizer neste momento.

            Durante a manhã, fui chamado a falar logo depois que Antônio Quinet tomou a palavra. Lembrei que a disposição da Escola Brasileira, desde há muito tempo, é de acertar as coisas no que diz respeito a seu Seminário de Minas Gerais. E decerto foi um discurso político, que não dizia bem a verdade das coisas. Eu quero dizer que essa é a minha posição, como pessoa que busca, estando na direção da EBP, a direção Una, para enfrentar a tendência que existe no Brasil –e, pelo que vejo, no mundo– de volta ao múltiplo.

            É um trabalho insano, pois o Brasil é muito grande. Depois escuto de uma colega, Graça Pamplona, que haveria na AMP –bem, na EBP, porque ela é colega da Escola Brasileira– um cerceamento das transferências. Em função disso é que, mais especificamente, intervenho neste momento. Eu não acredito que em momento algum tenha havido um cerceamento das transferências. Houve, sim, e vai haver enquanto eu for diretor dessa escola, um cuidado com a transferência.

            Trabalhamos muito, para permitir que o que conquistamos seja utilizado por pessoas que não vêm trabalhando junto conosco na construção do Campo Freudiano. Isso eu não admito. Nesse sentido, faço uma alusão ao uso que se faz da transferência que se conquistou no Campo Freudiano, para falar em nome próprio. Utiliza-se do agalma conquistado pela Escola para se trabalhar com grupos que se compõem, em sua maioria, de pessoas que são contra a escola.

            Enquanto eu for diretor da EBP, vou trabalhar na direção do Um da AMP.

 

Germán García  - Hay un filólogo español que se llama Francisco Rico que acaba de hacer una nueva edición del Quijote, me parece que muy excelente, pero creo que está agotada; al menos yo la estuve buscando y no la encontré. Escuché un debate por televisión donde estaba Francisco Rico discutiendo de Cervantes. Los cervantinos discutían dos temas: si Cervantes era judío y si era homosexual. Los interlocutores de Francisco Rico, para tomar una posición progresista, dijeron que eso no tenía ninguna importancia. Y Francisco Rico dijo que sí tenía importancia, porque nosotros no leíamos al Quijote, sino que leíamos a Cervantes. Y que si leíamos a Cervantes evidentemente, su lectura iba a cambiar según tuviéramos la certeza o no de cuáles eran las elecciones de objeto de Cervantes o si Cervantes era judío o no. Me pareció una observación muy interesante porque yo recuerdo el primer período de difusión de Lacan en Argentina, donde las personas decían que tenían transferencia con el texto, que se analizaban con los textos. Pero el gran secreto de todos nosotros era que no podíamos siquiera imaginar qué práctica se correspondía a eso. Las cuestiones se resolvían curiosamente en el hábito, es decir se leía a Lacan, se estudiaba a Lacan y se hacía un análisis habitual, es decir más o menos imaginado habitualmente.

            Me parece entonces, que - es un punto al menos del recorrido que yo he hecho y he llegado acá -, decir que esta cuestión, cuando escuché hoy hablar del texto y de la transferencia con el texto también en algún momento, que esta cuestión se juega en las personas, en cada una de las personas. Yo recuerdo que en 1980 invité a Miller a Barcelona, justamente a esta ciudad en la que estamos, y él vino, yo diría hoy por suerte, acompañado de Eric Laurent, y estuvimos aquí discutiendo todo tipo de cosas: tal, tal y tal. Pero había una verdad. La verdad en cuestión era que nuestros grupos analíticos - y aquí están muchos de Buenos Aires que pueden discutir lo que yo digo -, nuestros grupos analíticos no podían resolver la cuestión ni la articulación a nivel de la Argentina del psicoanálisis, ni mucho menos darse a una política internacional, a algún tipo de organización consistente. Es decir, los grupos se agotaban en este juego unos con otros, etcétera, etcétera. Era realmente una cosa entretenida en un sentido, agotadora en otro, estimulante también, ¿por qué no?. Esas mismas personas, con todo, estamos en la Causa. Pero evidentemente yo puedo haber usado alguna vez cuando íbamos hacia la Escuela la palabra castrum que es una palabra que me gustó: el castrum de las ciudades. Esos castrum no constituían las ciudades, eran lugares de la ciudad donde alguien evitaba la batalla. Yo quiero reivindicar el lenguaje bélico porque sé que es lenguaje, no porque sea bélico.

            Yo he leído Dinámica de la transferencia, donde Freud dice que cuando se cerca una capilla no hay que deducir de eso que es el depósito oficial del ejército, hablando de las resistencias, y hablando de los desplazamientos resistenciales. También dice Freud que cuando esta batalla transferencial se transforma por los ideales, se convierte en una batalla dibujada en el cielo, y no puedo recordar de qué pintor habla, un pintor que hacía las batallas en el cielo. O sea que me parece que este lenguaje bélico es bastante legítimo y además podríamos también argumentar con Lacan, que da una cierta épica de estructura este lenguaje, cosa totalmente necesaria para interesarse. Entonces...

 

Jacques-Alain Miller  - Un peintre avec une bataille dans le ciel, n’est-ce pas Aldörfer?

 

Germán García  - No, es Kauffman o algo por el estilo, está citado creo en El yo y el ello, cuando habla de la transformación de las pulsiones en ideales, habla de unas batallas pintadas en el cielo.

Cuando yo venía subiendo para aquí me digo, ¿a ver qué tiempo verbal uso?: ¿fue?, ¿qué fue la A.M.P.?, ¿qué habrá sido la A.M.P.?. No sé que tiempo verbal usar, porque en Buenos Aires, Miller anunció la A.M.P. a la vez que la Escuela y con ese anuncio yo creo que quedó la idea de que la A.M.P. era como la proyección internacional del proyecto, incluso la Escuela misma contenía en su seno ya, miembros europeos, y había una serie de cuestiones que hacían a garantizar algo de este proyecto y evitar el retorno de los grupos, y de... Bueno. Digamos que hiciéramos trabajar a Miller para nosotros y después pudiéramos volver a respetarlo. Iba a ser difícil...

            Yo comentaba el otro día y voy a concluir con esto, porque toco el tema que planteaba Miller, comentaba que hay un hábito argentino que está registrado en un libro en la historia de la  Universidad, que consiste en que uno quiere hacerse un lugar en la Universidad. Está fuera de la Universidad y quiere hacerse un lugar en la Universidad. En la Argentina la Universidad, más que en Europa, me parece, está subordinada a la política, van cambiando la gente a medida que van cambiando los gobiernos. Uno se organiza un Instituto fuera de la Universidad, hace invitaciones a autoridades extranjeras, va creando una agalma epistémica, y en el próximo gobierno es rector, catedrático, etc. Así pasaron Ortega y Gasset, etc.

Creo que lo que nos ocurrió con Miller fue que Miller fue pero no volvió, es decir que rompió este ritmo tradicional de la Argentina, esta relación con ir. Y se fue creando otro tipo de relación distinta. Yo personifico porque hasta hoy que leí el Anuario, por la mañana, no sabía muy bien como estaba articulada la A.M.P. No tengo una pasión para articular este tipo de cosas. Sí sé qué tipo de relación hemos tenido con Miller, y sé que hay algo cierto. Yo recuerdo con vergüenza el hábito argentino de enseñar a Freud, Freud puro, que consistía en tener al lado los textos de Lacan, y decirle a la gente cosas supuestamente sacadas de los textos de Freud. Los estratos alucinatorios de la audiencia eran increíbles porque de pronto alguien daba a leer a sus alumnos La negación de Freud y se ponía a hablar de la Aufhebung de Hegel y nadie podía encontrar nada de eso en el texto La negación de Freud. Yo espero que no haya un retorno de la misma alucinación, donde nuestra lectura de Lacan sea en realidad la de los textos escondidos Miller.

 

Lilia Mahjoub – J’avais suggéré de rajouter à la thématique proposée pour cette Conversation, l’amour. Pourquoi ? D’abord parce que c’était une thématique absente de la liste publiée dans la Dépêche de l’AMP. Ensuite parce que ça me paraît essentiel. Cette question a été soulevée par certains AE, par Anne Dunand, par exemple, qui dans son exposé la formule ainsi : “ Est-ce que l’amour existe ? ”, de la même manière qu’on interrogerait l’existence de Dieu, à savoir qu’il y aurait là un réel en question. Et puis, enfin, parce que tout ce qui nous est arrivé par Internet, ces échanges, me paraissaient vraiment être très loin de la lettre d’amour. Celui qui écrit une lettre d’amour prend du temps pour l’écrire, car il y met de son être.

            Ce n’était pas non plus la pulsion qui était à l’œuvre dans ces échanges, car pour celle-ci, comme l’ont fait remarquer Jacques-Alain et d’autres, il y faut le corps, le corps de l’Autre, la présence, la chair. C’est ainsi que le corps peut s’approcher par petit bout, selon la pulsion.

            Freud n’a pas confondu les pulsions avec l’amour, il les a plutôt mis côte à côte dans un texte que vous connaissez tous et ce pour mieux les distinguer, voire même pour les conjuguer. On pourrait dire, en effet, que la pulsion toute seule peut se satisfaire de n’importe quoi, et, à l’extrême, comme il en a été dans ces échanges sur l’Internet. Mais ça rend malade. Dans la tradition populaire on dit même que ça rend sourd, et dans notre milieu ce serait plutôt embêtant. J’ajouterai que cela porte un nom : la jouissance masturbatoire.

            Je reviens à l’amour. Ce qui me paraît important, c’est la conjugaison de la pulsion avec l’amour, car l’amour est à mettre du côté de la lettre. La lettre d’amour n’est pas une lettre ouverte, une lettre qui s’adresse à tous. Mon amour, comme le disait Freud, je ne le donne pas à tout le monde. Je choisis. Sinon il serait déprécié et personne n’en voudrait. Et puis quand il devient universel, vous savez ce que ça donne, ça donne la religion, le sens religieux – c’est ce contre quoi Lacan s’est élevé à la fin de son Ecole. Il disait même, dès 1974, que le réel ne dépendait pas du psychanalyste, mais que c’était le psychanalyste, et par conséquent la psychanalyse, qui en dépendait.

            C’est pour cela que je voudrais en venir à ce réel qui concerne l’amour et qui est ici en question. C’est un enjeu de la fin de l’analyse qui rejoindrait ce que Freud a articulé à propos de sa première identification, l’identification au réel de l’Autre réel, - telle que Lacan l’a reprise dans son séminaire en 1975. C’est quand même quelque chose d’un peu complexe, n’est-ce pas ?. Je dirais que ce premier lien affectif sans investissement d’objet, est ce qui est à serrer en fin d’analyse, soit un “ amour sans limite ”, “ hors des limites de la loi ”, pour reprendre la fin du Séminaire XI consacré notamment à la pulsion. La pulsion en fin d’analyse n’est pas à confondre avec ce qu’il en advient de l’amour. Il reste un réel lié au S1, qu’il s’agit de faire résister, via l’amour, pour que la psychanalyse de disparaisse pas.

            Chacun peut être, dans son parcours analytique, plus ou moins proche de cette question. A ceux qui n’entreverraient peut-être pas encore ce point, j’aimerais leur adresser une demande : d’en faire un enjeu pour la suite, autrement dit de ne pas oublier de parier sur l’amour, sur sa valeur de lettre au-delà de la satisfaction pulsionnelle.

 

Colette Soler — Je me place de telle sorte que je puisse regarder mes collègues sans tourner tout à fait le dos à la tribune.

            Mes chers collègues, j'ai souhaité vous parler. En effet, je crois que chacun aujourd'hui a le sentiment que nous sommes à ce qu'on appelle, en français, l'heure H — un moment de virage certain. Je voulais vous parler, puisque ces temps-ci, j'ai plutôt écrit et que ça ne suffit pas. Nous sommes des tenants de la parole, bien sûr. J'ai été encouragée, je dois le dire, non seulement par beaucoup, qui m'ont dit : il faut parler — c'était déjà ma pente —, mais aussi par la réunion que j'ai eue hier, au déjeuner, avec Jacques-Alain Miller et Ricardo Seldes, au titre du bureau de l'AMP. Ce fut un déjeuner dont je dirais qu'il était prometteur. J'ai entendu de la bouche de Jacques-Alain Miller que pour ce qui allait venir aujourd'hui, et dans la suite d'aujourd'hui, il était prêt à accueillir les objections, les discussions, les débats — il l'a dit en d'autres occasions, redit aujourd'hui, écrit aussi — et que même, après tout, ce qu'il appelait une opposition n'était peut-être pas intolérable. A une condition, disait-il, qu'il n'y ait pas d'injures — ce qui m'agrée parfaitement. Pour ma part, je crois n'avoir, dans ces débats, jamais proféré ni injures ni attaques personnelles.

            Bon, j'en étais là, quand, le soir, j'ai ouvert l'annuaire de l'AMP. Et ç'a été pour moi un choc. Je n'ai pas pu ne pas mesurer le contraste entre le “ pas d'injures ” et certaines phrases de la préface. Il y aurait beaucoup de choses à dire sur cette “ tirade ”. Je ne vais pas le faire ici, surtout que j'ai eu la surprise d'entendre, ce matin, beaucoup d'interventions qui la concernaient, cette “ tirade ” — et même des protestations vives.

            C'est un texte qui a été prononcé dans des circonstances précises, et qui se veut, à l'évidence, inspiré par l'enthousiasme pour la cause analytique. C'est un texte qui mériterait un commentaire suivi et détaillé, et peut-être le ferai-je, ce commentaire.

            En tout cas, dans ses énoncés, c'est un texte “ pour ” : pour la reconquête du Champ freudien, et aussi pour l'unité de notre mouvement. Je suis pour ce “ pour ”. D'autant que la fin du texte précise que cette unité doit en quelque sorte inclure en son sein, éventuellement, des positions qui ne seraient pas tout a fait des positions d'harmonie avec le Un de l'ensemble.

            C'est un texte pour, mais il y a aussi, dans ce texte, du “ contre ” : le pour énoncé s'appuie sur le contre de l'énonciation. Le contre y est nommé, et à plusieurs reprises. Le contre a un nom général qui est l'Autre — grand A, c'est écrit comme ça. Il y aurait un Autre de l'Un de la cause, qui serait à l'intérieur, après avoir été d'abord externe, et qui étant contre le pour, devrait évidemment être contenu. Je ne me reconnais pas comme Autre de la cause analytique — pas du tout. Je considère que c'est une imputation. Je ne peux que la rejeter et je la rejetterai.

            L'Autre de l'intérieur est en outre, nommé : je ne dis pas qu'il n'a en fait que deux noms dans l'esprit de l'auteur, mais dans ce texte, il y en a deux. Il y a “ Sauret ” et “ Colette ”. L'un est qualifié : il est précisé qu'il a produit un texte de faux-semblant. Il est épinglé du style curé et faux-derche. C'est un peu vif, non, pour quelqu'un qui prétend proscrire l'injure? Quant a moi, on m'y attribue le pompage et le bâillon que je mettrais sur la communication. Alors ça, eh bien, je trouve que c'est un aspect du texte qui n'est pas bien... inspiré!

            Et je pourrais dire, Jacques-Alain Miller, puisque vous aimez les classiques, souvenez-vous du Molière, des Femmes savantes : “ Le moindre solécisme en parlant vous irrite / Mais vous en faites, vous, d'étranges en conduite ”. C'est Molière — il faut donc le prendre légèrement, sans dramatisation.

            Je laisse là la “ tirade ”. Ce que je voulais vous dire avant d'avoir ouvert l'annuaire, ça concernait, au fond, ce que je vais appeler le “ problème ”, entre guillemets, de notre communauté aujourd'hui. Je ne pense pas que ce problème tienne dans l'opposition qui a été formulée : d'un côté, il y aurait l'École et l'AMP et de l'autre côté, la menace groupale.

            Je ne crois pas que la partition passe de cette façon. La menace groupale, qui existe toujours dès qu'il y a du collectif, elle est interne à notre ensemble. Et puisque je commence par dire ce que je ne crois pas, j'ajoute que je ne crois pas non plus que le problème, ce soit le retour de l'Université. J'ai eu connaissance de cette nouvelle thèse, Jacques-Alain Miller, hier au déjeuner, par vous. Elle m'a surprise, venant de vous, mais enfin, je la prends en considération. Si on parle de l'institution universitaire, je peux bien dire qu'à son égard, je me sens très libre : j'ai été universitaire, j'ai eu dans l'Université un poste de grand prestige, et je l'ai quitté sans contrepartie aucune. J'aurais pu continuer à jaspiner sur Lacan dans l'Université — très tranquillement. Je l'ai quittée afin d'avoir tout mon temps pour m'occuper de psychanalyse. Je n'ai donc aucune sympathie secrète pour cette institution, dont tout le monde connaît les limites, et elles sont grandes.

            Par contre, je suis plus surprise de percevoir dans les propos de Jacques-Alain Miller un amalgame évident entre l'institution Université et le discours universitaire. Parce que le discours universitaire n'a pas besoin des murs de l'université — il peut même bien prospérer dans nos Sections cliniques à l'occasion, et c'est même souvent le cas, en vérité. De même que, à l'inverse, dans l'université, il arrive que quelqu'un, pour être analyste, fasse un autre usage de l'énonciation, un usage qui ne mette pas le savoir en position de semblant.

            Alors, les problèmes de notre communauté : j'ai pris quelques notes, je vais essayer d'être brève. Je les aborderai à partir de cette question toujours brûlante que Lacan appelait la garantie des psychanalystes.

            Aux standards de l'IPA, qui sont fallacieux, Lacan a opposé la Passe : l'École de la Passe, la Passe antinomique du standard et qui consiste à authentifier, pour chaque psychanalysant venu au bout de son analyse, la solution singulière, symptomatique, si on veut, la solution singulière à laquelle il est parvenu. La Passe assure donc la sélection, voire la promotion des “ exceptions ”. Ce dispositif de la Passe comme laisse donc concrètement ouvert le problème de l'unification de la communauté.

            Retour du multiple, dit-on. Mais non, le multiple a toujours été là, le multiple constitue même la base de la communauté. Le problème, c'est de savoir comment une communauté analytique, quelle qu'elle soit, unifie ses exceptions symptomatiques ou ses singularités. Alors, quelle est la solution de notre communauté, si nous ne les faisons pas passer par le standard?

            Notre solution, c'est d'asseoir l'unification du multiple en passant par Un qui est en position d'exception — Un qui assume en quelque sorte la responsabilité majeure des décisions dans la direction politique et d'où émane — j'ai cherché le bon terme : Gennie disait ce matin, instruction, consigne ; le bon mot c'est : directive — d'où émanent les directives. La fonction de ces directives est effectivement d'unifier, à la fois sur le plan théorique, le plan de la pensée —celui des thèmes et des avancées —, et sur le plan pratique de l'action de la communauté. Nous connaissons les bénéfices, après tout, de cette fonction unifiante des directives du Un d'exception. Notre communauté s'est constituée grâce à ça. Je dois dire que je n'avais pas d'objections de principe à cette forme institutionnelle et j'y ai largement participé. Aujourd'hui, expérience faite — parce que là, je suis pragmatique aussi —, je vois des problèmes. Alors, où voit-on les problèmes? Certains ne les voient pas, semble-t-il ; moi, j'en vois, beaucoup en voient.

            Je vois des problèmes au niveau du fonctionnement institutionnel, et en effet, j'ai dénoncé, je dénonce, je critique, ce que je peux bien appeler un dysfonctionnement au niveau des directives de l'Un. Je ne vais pas reprendre les péripéties — elles sont connues de tous ceux qui veulent les connaître et qui veulent en savoir quelque chose. Dans expérience, on a vu qu'il pouvait arriver que ce dysfonctionnement devienne délétère. Il est délétère quand une objection est stigmatisée comme opposition à la cause analytique. Je prétends qu'une objection n'est pas une opposition à la cause analytique — même si elle est forte. Il est délétère quand, alors que l'on dit admettre l'objection, on y accouple une disqualification de l'objecteur, avec d'ailleurs toujours un effet boomerang, un effet de retour à l'envoyeur, qui fait que les interlocuteurs sont immédiatement propulsés sur l'axe a-a', chacun accusant l'autre d'être en faute contre la cause analytique. Elle se fait délétère encore quand l'interprétation, l'anticipation interprétative se convertit en imputation fantaisiste.

            Exemple : les “ bis ” de mes voyages au Brésil. Je dis “ imputation fantaisiste ” : ce n'est peut-être pas le bon terme, mais il est plutôt gentil. Il y a beaucoup d'autres exemples, il est inutile d'insister là-dessus. J'appelle ça les épiphanies de Thanatos désassociatif!

            Comment penser ces phénomènes? L'idée la plus simplette, immédiate, c'est de dire : eh bien voilà, le mésusage de la place de l'Un d'exception relève des excès du D.G. Bon, il y a un petit peu de ça, mais je trouve qu'on ne peut pas se contenter de cette explication. C'est un peu court, parce que, en même temps, comme je l'ai dit, la formule qui définit notre communauté a une force certaine et a produit des choses excellentes. Cependant, je ne suis pas là pour l'autocongratulation mais pour la critique de ce qui est mal inspiré. Alors, je n'ai pas de pente à accentuer le mauvais usage personnalisé. Je n'ai aucune pente à considérer, comme Jacques-Alain Miller l'imputait à tout va, il y a un instant, qu'il soit l'ennemi de l'intérieur — et je pense, en outre, qu'un autre à la place ne ferait pas mieux, ça je n'en ai jamais douté. Il ferait peut-être autrement, sans doute, mais pas mieux, car c'est la fonction qui doit être revue.

            Alors je crois qu'on peut prendre la réflexion à un autre niveau et se demander si la solution par l'Un d'exception n'a pas quelque chose d'aporétique, si elle ne demande pas à être en partie corrigée, ou plutôt en partie complémentée par des dispositifs de régulation de ce que j'ai appelé les épiphanies de Thanatos désassociatif. Si on veut entrer dans la réflexion de son caractère aporétique, on est amené à considérer la tension qu'il y a entre les exceptions multiples et le un d'exception, et cette tension-là, qu'on ne me dise pas qu'elle va se résoudre par l'invocation du consentement subjectif des exceptions multiples à l'Un d'exception. Parce que la question est seulement de savoir à quoi l'on peut consentir.

            Il y a une tension, voire une aporie, effectivement, entre les directives de l'Un et les singularités du multiple, et quand Lacan, inventant la Passe, dit qu'il veut des analystes capables de penser l'expérience de l'École — non seulement l'expérience de leur cure, mais l'expérience de l'École, ce n'est évidemment pas pour donner l'exclusivité de ce travail au UN unique. Cette multiplicité n'exclut pas, bien entendu, et loin de là, que l'élaboration se fasse avec d'autres, dans une élaboration collective.

            Ça n'exclut pas non plus le transfert de travail, mais ça suppose que chacun pense l'expérience de l'École sans directives préalables, quitte ensuite à mettre en commun les produits pour refabriquer de l'Un. Alors franchement, quand ce matin on objectait à l'expression de Marie-Jean Sauret, disant que le sujet en fin d'analyse est une “ objection au savoir ”, je trouve que l'objection n'est pas de bonne foi, en tout cas pas bien comprise, parce que tout le texte de Marie-Jean Sauret indique que ce qu'il appelle objection au savoir, c'est, si j'ai bien compris, ce que nous écrivons avec le mathème S de grand A barré et que son interlocuteur appelle le point d'impossible à dire. Ça ne devrait pas faire une guerre.

            Produire de vrais psychanalystes de l'expérience de l'École. Lacan considérait, si vous vous souvenez bien, que c'était la seule chance pour que l'on sorte de la panne théorique de la psychanalyse — il disait ça en 1967. Cette panne théorique, c'est d'ailleurs aussi bien une panne éthique.

            Où en sommes-nous à cet égard?

            Je vais terminer. Je dis que la psychanalyse doit être orientée — absolument. Et dans l'orientation, l'épistémique et le politique sont intriqués, mais je crois que l'orientation ne peut pas déboucher sur une compacité de monolithe, quoiqu'il n'y ait qu'une seule psychanalyse. Je le crois aussi, comme on l'a dit ce matin. Si on aboutissait à la compacité de monolithe, les énonciations, multiples, singulières, seraient étouffées. Ce ne serait plus de l'orientation, ce serait la secte, à quoi Lacan a toujours voulu parer. Nous n'en sommes peut-être pas encore là. Au fond, nous avons entendu les A.E. récemment nommés, et chacun des auditeurs, dans son jugement le plus intime, a pu percevoir le point d'authenticité de chacun, ses limites aussi bien. Donc, nous n'en sommes pas là, mais peut-être au bord — un pas de plus et nous y serons.

            Je dis donc qu'il faut remettre à l'étude l'aporie que j'ai évoquée. Remettre cette aporie à l'étude, ça n'est pas s'en prendre à Jacques-Alain Miller. Remettre cette aporie à l'étude, ce n'est pas saper les fondements, mais au contraire, c'est essayer de les assurer un peu mieux [applaudissements].

 

Jacques-Alain Miller - Merci. Pierre-Gilles Guéguen m’a fait passer un petit papier comme quoi il voudrait répondre. Donc Colette Soler, si vous voulez répondre aussi, autant que vous restiez là. Après ce petit échange, nous ferons une petite pause simplement littéraire. Je demanderai à Antonio Vicens de nous lire un extrait qu’il a choisi du Libro de buen amor.

 

Pierre-Gilles Guéguen - Je voudrais vous parler, Colette. Vous savez que j’ai travaillé longtemps avec vous et je continuerai peut-être, sans doute, à le faire. Vous savez que j’ai beaucoup appris de vos enseignements et que je reconnais la dette que j’ai à votre endroit. J’apprécie votre ton. Vous êtes restée silencieuse, je ne vous ai également pas parlé depuis longtemps, je ne savais pas très bien ce qui faisait entre nous la différence. Je crois qu’aujourd’hui je suis mieux en mesure de l’apprécier et de vous dire ce qui nous sépare.

            Vous parlez d’une communauté analytique dans laquelle il faudrait quelqu’un qui donne des directives, qui unifie les points de vue. Je ne vois pas la chose de cette façon.

 

Colette Soler - Je dis que nous l’avons.

 

Pierre-Gilles Guéguen - D’accord. Eh bien ! je ne vois pas la chose de cette façon justement. Je pense que cette singularité, à laquelle est mené chacun d’entre nous au terme de son analyse, suppose une confiance renouvelée, que cette confiance est un pari, et que si l’Autre n’existe pas il faut faire un pari, que ce pari porte, en ce qui me concerne, non pas sur ce que je sais ou ce que disent les uns et les autres, mais sur ce que peut anticiper quelqu’un qui est au-delà de ce que j’ai encore compris. C’est pourquoi je ne séparerai pas, dans notre communauté, pas plus que vous ne le faites d’ailleurs, l’épistémique et le politique, et c’est pourquoi je serais pour, non pas considérer que celui qui dirige unifie, mais plutôt à l’inverse, que c’est celui qui a une position d’exception, du point de vue épistémique, qui est le mieux placé pour que l’intendance suive.

            Cela fait bien longtemps que ces questions sont posées. Je parcourais récemment un livre sur “ légitimité et politique ”, on y voit que Max Weber posait déjà ces questions. Si on veut un fonctionnement trop démocratique dans lequel celui qui dirige ne fait qu’unifier, on aboutit à une société des élites, on aboutit à une société fermée dans laquelle la politique et les classes politiciennes sont véritablement la seule question.

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IV. - Jacques-Alain Miller, Antonio Vicens

 

Jacques-Alain Miller - Je m’excuse, mais là, je commence à ne plus rien comprendre. Bon.

             Comment voudrait-on que soit dirigée ou que se soit formée l’AMP?

            Soyons simples. Quand l’AMP s’est formée il y avait déjà quatre Ecoles — l’EOL commençant, mais elle a pris son mouvement et sa consistance assez vite. Les Ecoles, on connaît leur fonctionnement, ce n’est pas le plus démocratique du monde, ce n’est pas le moins démocratique du monde, il y a tout une partie qui repose sur des contrepoids, des équilibres, qui font que les Conseils sont en général composés à partir de plusieurs sources, non pas tout le monde élu par l’Assemblée générale, mais le pouvoir statutaire du Conseil est réparti entre l’Assemblée générale, le Conseil lui-même qui coopte, etc. C’est différent selon les Ecoles, mais cela repose sur des contrepoids divers, pas du tout sur l’élection directe. C’est la constitution des Ecoles. Elles ont des Assemblées générales, mais souvent avec des pouvoirs assez limités : dans l’EOL, l’Assemblée générale a des pouvoirs aussi limités que ceux que l’Assemblée générale avait dans l’École de la Cause freudienne pendant près de dix ans, enfin jusqu’en 1993 : pendant dix ans on ne votait pas directement à l’École de la Cause freudienne, on votait par des délégués. Et c’est encore le cas à l’EOL.

            Alors, je ferai déjà remarquer qu’à l’AMP, ce n’est pas le cas. Le système démocratique, auquel on est arrivé à l’École de la Cause freudienne seulement au bout de dix ans et auquel on n’est pas encore arrivé à l’EOL, est déjà pratiqué dans l’AMP. C’est une petite remarque de fait : dans l’AMP on s’adresse directement aux membres, c’est eux-mêmes qui mettent directement leur bulletin dans l’urne, et ils élisent la totalité de l’exécutif, c’est-à-dire le délégué général. Ce qui n’existe en effet dans aucune Ecole. Les Directoires sont simplement confirmés, ou choisis partiellement, par l’Assemblée générale. Or, dans tout le Champ freudien, l’AMP est la seule association qui d’emblée a remis le pouvoir à son Assemblée générale, c’est-à-dire à chaque membre directement.

            Donc, c’est ici un moment de démocratie directe. Je m’adresse à vous directement, et chacun de ceux qui participent ici s’adresse directement aux autres. Et l’Assemblée générale, c’est-à-dire chaque membre, élit directement la totalité de l’exécutif.

            Ce n’est pas beaucoup, la totalité de l’exécutif,  c’est le délégué général, et de lui procèdent, par délégation, la trésorerie, le secrétariat, voire d’autres délégués. Tous les deux ans, eh bien! on a la possibilité de changer le délégué général. On a en attendant la possibilité de faire des critiques, on a la possibilité de s’exprimer, et d’ailleurs j’ai tout fait, me semble-t-il, pour augmenter la facilité des membres à s’exprimer, y compris dans le sens critique. Donc, il faut déjà faire cette remarque.

 

            D’autre part, quel était le problème de l’AMP? Bien sûr, nous ne sommes pas habitués à agir sur une étendue aussi vaste, ce n’est pas familier, on ne savait pas très bien ce à quoi pouvait servir l’AMP. Il y a deux ans, j’ai créé cinq Départements. Je les ai créés avec l’accord du Conseil.

            Je ne sais pas d’où vient l’idée que c’est moi qui décide tout seul, et qu’après on ne peut plus m’arrêter, etc. J’ai dit que j’ai passé des heures et des heures pendant deux ans, quatre ans, six ans, à contacter les différents Conseils, et ils étaient d’accord. Tout le monde ne le sait pas! Pourquoi? Parce que ça s’est fait entre moi et les membres des Conseils, et ça n’est pas passé par les membres.

            On me reproche donc : pas d’instance, etc. Mais rappelez-vous, les Ecoles n’existaient pas à un moment, ou elles étaient faibles, ou certaines sortaient à peine d’une crise, ou d’autres commençaient seulement à exister, comme l’EOL. Donc, je n’ai pas voulu, en effet, créer une bureaucratie centrale de l’AMP, superposée aux Ecoles, et qui leur dicterait leurs lois. Donc, j’ai pensé qu’en effet il ne  fallait pas créer — et je m’en suis expliqué dans les Assemblées générales précédentes, c’est comme si on avait tout oublié - je ne voulais pas créer un appareil centralisé trop fort pour ne pas gêner la construction des Ecoles. Hormis la période de l’Assemblée générale, je ne voulais pas m’adresser directement aux membres des Ecoles, par-dessus la tête des Conseils. Et cela, afin de fortifier les Ecoles.

            J’ai fait pendant deux ans une Dépêche où on voyait, comme on dit en espagnol, la [?...?] qu’il y avait entre les Conseils et moi pour se mettre d’accord. Mais cette Dépêche, je l’ai réservée aux membres des Conseils. Cela a été en quelque sorte leur privilège de construire avec moi l’administration de l’AMP. J’ai été un peu pris de court, tout ça fait bien 150 ou 200 pages machine en petits caractères, je n’ai pas réussi à le sortir pour l’occasion de cette Assemblée générale, mais tout ça sera publié intégralement, et on verra qu’il y a des centaines de pages d’échanges entre les Conseils et moi, et que je n’ai pris à aucun moment une décision irraisonnée ou solitaire.

            J’ai un style qui est ce qu’il est, mais qui est plutôt participatif. Je demande aux personnes de parler, j’écoute, je dis moi-même mes doutes, mes variations d’idées, etc, jusqu’au moment où on tombe sur un point de capiton, sur quelque chose qui ordonne, et à ce moment-là on avance dans cette direction.

            Si je n’ai pas réussi à publier toute la Dépêche, j’en ai tout de même publié une sélection, que vous trouverez demain - peut-être vous l’a-t-on déjà donnée à midi. C’est un document de 120 pages que voici, qui est intitulé “ Rapports à l’Assemblée générale, et autres documents ”, et vous y verrez, sur six ans — c’est ce que j’ai pu réunir, j’ai dû arrêter parce que je suis venu moi-même à Barcelone— vous verrez l’attention et la modestie avec laquelle je pense que j’ai procédé dans cette direction, non pas du tout comme un cavalier qui s’en va tout seul et laisse tout le monde sur place. Parce que mon ambition n’est pas de diriger — mon ambition, il y en a une, c’est de créer de vraies institutions, c’est-à-dire précisément qui puissent fonctionner sans moi. Il y a des gens qui créent des institutions, des groupes, et qui s’arrangent d’une certaine façon, parfois sans le savoir, pour que ces groupes ne puissent pas fonctionner sans eux, parce que c’est trop complexe, etc. Moi, pas du tout!

            Pour l’Ecole de la Cause freudienne, j’en ai été le dirigeant pendant un moment important. En effet à l’Ecole de la Cause freudienne, surtout au moment de sa création, j’ai donné le la. A ce moment-là j’ai inventé tous les mécanismes de l’Ecole de la Cause freudienne : la permutation, la différence des Conseils et des Directoires, etc. Et on a cru à ce moment que l’Ecole était identifié à moi. Mais du moment où j’ai quitté les instances régulières, je ne me suis absolument pas mêlé de la vie quotidienne, administrative et organisationnelle, de l’Ecole de la Cause freudienne. Que j’y aie une influence, qu’on me consulte, c’est vrai, mais je considère que c’est une Ecole qui fonctionne parfaitement bien par elle-même.

            Autre exemple. Je ne sais pas comment je peux en donner un meilleur. Cette année, j’avais pris un peu de retard dans la rédaction du Séminaire de Lacan que j’avais promis aux Editions du Seuil, qui devait sortir, etc. Quand je suis rentré d’Argentine, j’ai coupé toute correspondance avec les Conseils, etc, je n’ai répondu à personne pendant près de cinq mois. Ce qui est formidable c’est que rien ne s’est passé — personne ne s’en est aperçu. Je veux dire que, évidemment, les Ecoles sont des organismes qui se gèrent et qui se dirigent eux-mêmes. Quand elles ont certaines difficultés, elles me consultent, et c’est ce que j’en ai dit dans mes rapports précédents.

            Aussi bien quand Colette Soler a présenté un “ Projet de résolution ” qui disait que je gouverne l’AMP, que je gouverne les Ecoles, etc, — tous les Conseils, du moins les Conseils de l’ECF, de l’EOL, de l’ECFC, le président de l’EEP, le président de l’EBP, se sont immédiatement dressés pour dire que c’était parfaitement inexact. Et je précise que je n’ai jamais demandé aucune de ces réactions à ces collègues, ils l’ont fait d’eux-mêmes, ils ont considéré d’eux-mêmes que c’était une description qui n’était pas exacte.

            Alors, je lis des considérations très compliquées sur le mode de gestion des associations. Il m’est arrivé de parler d’“ autorité authentique ” : en effet, je ne peux pas consulter tout le temps, je prends parfois mes responsabilités moi-même, je prends des décisions, dont j’entends rendre compte ensuite. Je n’ai jamais demandé de chèque en blanc. Moi-même, je tiens à rendre compte tous les deux ans. Si cela pouvait être tous les ans, je préférerais. Mais est-ce qu’on peut faire une Assemblée générale de l’AMP tous les ans? Cela paraît difficile. Peut-être. Moi, dans les réunions, je suis bien connu pour être le dernier qui veut partir : quand on est à deux heures du matin, je suis encore prêt à continuer, et les gens essayent de me faire taire pour pouvoir s’en aller. Donc, je n’ai absolument pas un style de travail comme celui qu’on décrivait.

 

            Finalement, ça se résume à quoi?

            Premièrement, il y a des gens ont été blessés parce que j’ai parlé de pompage au sujet de V*. Comme je l’ai dit, j’ai écrit trois lignes là-dessus, après avoir fait plusieurs démarches auprès de l’intéressé, après avoir également demandé à Eric Laurent de s’entremettre. A un moment, on m’a apporté une revue où j’ai pensé reconnaître une conférence entière de moi sous un autre nom, j’ai lâché trois lignes, après qu’on m’avait envoyé une lettre. Voilà ce que j’ai écrit. Que cela ait eu des effets plus importants, etc, c’est tout à fait exact, mais ce que j’ai signé, c’était ça.

            Il y a des gens qui témoignent qu’ils ont été affreusement blessés par ça. Comme l’a dit Marie-Hélène Brousse, respectons la douleur, et qu’ils se demandent aussi si ce que je dis est vrai ou n’est pas vrai. Il ne faut peut-être pas complètement gommer ce moment. Qu’il y ait le moment de la douleur et qu’il soit respectable, c’est vrai, respectons la douleur de l’autre. Derrière la mousse qu’on fait, comme dirait Colette Chouraqui-Sepel, je ne crois pas du tout qu’il y ait les décisions que j’ai prises, ma gestion, etc, il y a ce que j’ai dit du pompage, qu’un certain nombre ne me pardonnent pas. Très bien. Je les invite simplement à se demander aussi “ est-ce vrai ou non? ”, et si c’était vrai, qu’ils se demandent peut-être ce que ça pourrait me faire, à moi.

            Deuxièmement, on me reproche d’avoir publié des textes concernant le Collège de la passe. A cela j’ai déjà répondu dans une autre Conversation, je vais répondre ici.

            Je vais répondre d’abord qu’il y a au moins une trace écrite du fait qu’en tant que délégué général, je me suis inquiété que le Conseil de l’Ecole de la Cause freudienne ait oublié de convoquer le Collège de la passe. Et j’ai dû, moi, faire une lettre en disant : “ C’est le dernier moment où vous pouvez convoquer ce Collège, veuillez immédiatement le convoquer parce que toute l’AMP attend ce Collège de la passe ”. J’ai envoyé cette lettre à Jean-Pierre Klotz qui était secrétaire du Conseil à l’époque, avec le texte même de la convocation à envoyer, parce que c’était le dernier jour où on pouvait convoquer ce Collège de la passe.

            Ensuite, quand j’ai ouvert ce Collège de la passe en tant que délégué général de l’AMP, à côté du président de l’Ecole, j’ai dit que toute l’AMP attendait les résultats de ce Collège de la passe. Tout le monde a dit ça : toute l’AMP a les yeux fixés sur ce Collège de la passe. Donc, à la fin du Collège de la passe, qu’ai-je publié? J’ai publié le compte-rendu officiel qu’a fait Jean-Pierre Klotz de ce Collège de la passe. Et je l’ai envoyé à tous les Conseils et à tous les membres de l’AMP. Je considère que c’était mon devoir.

            D’autre part, j’avais écrit environ quinze petits textes pendant ce Collège de la passe. J’ai décidé de les publier. Est-ce illégitime que je publie mes propres textes? Où cela va-t-il s’arrêter, ces reproches? Donc, j’ai décidé de publier mes propres textes. Et je les ai publiés. Etant par ailleurs délégué général de l’AMP, j’ai pris la décision de publier mes propres textes avec les trois lettres A.M.P.

            Il se trouve que Jo Attié, qui était à l’époque président de l’Ecole de la Cause freudienne, a décidé, lui, d’enregistrer les séances du Collège de la passe, ce que je n’aurais jamais fait. Mais il l’a fait, et comme dans l’Ecole de la Cause freudienne il était chez lui, je n’ai pas moufté, enfin je n’ai rien dit. Ensuite, Jo Attié, qui est ici - il donnera son témoignage -, a décidé de lui-même de décrypter les discussions du Collège de la passe, et de les distribuer aux trente membres du Collège. Quand vous distribuez un texte à trente personnes, je m’excuse, on est déjà dans la diffusion publique. J’ai donc décidé de reprendre mes interventions orales, de les nettoyer un petit peu, et de les diffuser également. Si c’est cela qu’on me reproche en disant que c’est un acte tyrannique, je trouve que c’est un petit peu excessif.

            J’ai préparé ça au mois d’août, et quand je suis rentré au mois de septembre, qu’est-ce que j’ai fait? J’ai fait une lettre aux autres membres du Collège de la passe en leur disant : “ Je publie sous le sigle AMP le rapport officiel de Jean-Pierre Klotz, mes textes, et mes interventions orales. Ceux d’entre vous qui désirent que je les publie également sont priés d’envoyer les documents ”. Eh bien! j’ai publié tout ce qu’on m’a envoyé.

            Voilà mon pêché. Voilà la décision que j’ai prise — en effet sans consulter auparavant le Conseil de l’AMP, car c’était ma responsabilité comme délégué général.

            On me réclame par ailleurs de la transparence, etc. Qu’est-ce qu’il y avait de plus transparent que de faire connaître ça?

            Si je l’ai fait connaître, c’est aussi pour qu’on lise et qu’on voie que je n’ai fait changer aucune décision des cartels de la passe. Il y a une fois, tous les six ans, où on a le droit, à l’intérieur du Collège de la passe, de mettre en question les décisions des cartels de la passe, alors que pendant six années on avale ce qui se passe. Une fois tous les six ans, on se réunit pour mettre ça en question.

            Je crois que ce n’est pas par hasard qu’on a oublié de convoquer ce Collège, et que j’ai dû, moi, faire le rappel nécessaire pour qu’il soit convoqué au mois de septembre — parce que, dans un certain fonctionnement, on préfère l’impunité au fait de rendre compte.

            En effet, j’ai posé un certain nombre de questions au cours de ce Collège de la passe. Il est possible que certains en ont été surpris ou froissés. Je prétends que c’était ma responsabilité comme membre de ce Collège d’agir ainsi, et que les résultats ont été positifs, à savoir que, désormais, le fonctionnement de la passe à l’Ecole de la Cause freudienne me paraît bien meilleur. On a fonctionné pendant deux ans avec un secrétariat de deux personnes, et comme une de ces personnes était en province il restait une seule personne pour assurer le secrétariat de la passe à Paris, ce qui a produit un certain nombre de dysfonctionnements. Eh bien! maintenant il y a un secrétariat où il y a quatre personnes, qui est animé par Alexandre Stevens, et ça marche bien. En tout cas, cela a servi à quelque chose.

            Je vous ferai remarquer d’autre part que, loin que la mise à ciel ouvert de ces difficultés effraie tout le monde, il y a plus de demandes de passe que jamais à l’Ecole de la Cause freudienne.

 

            Je résume. On ne me reproche pas tout ce qu’on dit. On me reproche d’avoir dénoncé le pompage. On me reproche d’avoir dérangé le ronron qui aurait fait oublier le Collège de la passe, et qui aurait fait que ce Collège ne serve à rien. Et ensuite, il y a ce que j’ai appelé le retour du multiple à l’intérieur de l’AMP.

             Il y a des pouvoirs locaux qui entendent dicter leurs lois aux Ecoles. Depuis longtemps on savait que Toulouse avait sa place propre dans l’Ecole de la Cause, c’était acquis depuis quinze ou dix-sept ans. On a fait preuve à cet égard d’une tolérance très très grande. Mais lorsque Toulouse a entrepris d’avoir une projection internationale, il est certain que cela a produit une certain nombre de dysfonctionnements internationaux. L’idée qu’il faut des pouvoirs locaux forts et un pouvoir central faible limité par les pouvoirs locaux, c’est l’âme même du “ Projet de résolution ”. Quand on dit “ Ce sont les l’Ecoles qui doivent orienter l’AMP et pas le contraire ”, très bien! c’est le contraire de ce que je fais depuis six ans. On a le droit de dire le contraire. Mais reconnaissons que c’est le contraire.

            J’ai vu en effet dans ce “ Projet de résolution ” le point de capiton qui permettait de comprendre vers quoi allait tout ça : on allait vers un Champ freudien qui servirait des chefferies locales, ou des chefferies nationales.

            C’est la tendance naturelle. Si on ne fait rien, bien sûr on sera plus proche des gens qui ont la même langue, plus proche des gens du même quartier ou de la même ville, du même pays. Cette belle Assemblée qui est ici, ces huit cents personnes, membres et adhérents, la tendance toute naturelle, c’est que chacun s’éloigne, que chacun soit pris dans son chez-soi, et puis que, tous les deux ans, comme par une sorte de rite, on se retrouve pour constater : “ Ah! eh bien! voilà, Untel est un peu plus par là, Untel est un peu plus par là  ”. On constituera finalement un conglomérat.

            Pour que cela n’arrive pas, si nous ne voulons pas ça, en effet il faut exercer une traction à contre-pente, il faut aller à contre-courant. Et je vais à contre-courant, je le sais. Mais ce n’est pas en réprimant : il faut essayer d’entraîner, il faut essayer de convaincre, il faut essayer de passionner. Je n’ai jamais prétendu être dépassionné. Je fais ça avec la passion, en effet.

            Et ceux qui ont fait le Champ freudien l’ont fait avec la passion, ils l’ont fait en s’engueulant, ils l’ont fait en se choquant. Je suis venu pour la première fois à Barcelone à l’invitation de German Garcia, on s’est disputé. je suis rentré à Paris, j’ai dit “ Plus jamais je ne viendrai ici ! ”. Rosa Calvet m’a téléphoné, et je suis revenu, et ça a recommencé, etc. Voilà ce qui a fait l’histoire du Champ freudien : la chair, la vie, la jouissance du Champ freudien. Bon.

            Alors, évidemment, quand on se contente de dire “ Ah! voilà le brillant rhéteur, voilà celui à qui on ne peut pas faire confiance ”, on démolit le Champ freudien. On liquide l’AMP quand on dit ça. Parce que, jusqu’à présent, c’est aussi par ce que j’ai pu transmettre de ma passion à moi, c’est aussi par là que ça s’est fait.

            On vient avec des petites mines : “ Ah! voilà le gars qui parle tellement bien qu’on ne peut pas s’y fier ”. Moi, j’éprouve autre chose. J’éprouve que je suis l’esclave de la parole donnée, j’éprouve que je continue de distribuer le tract de juin 1964 du Dr Lacan. Je lui ai dit une fois que j’allais faire ses Séminaires, je ne les fais pas aussi vite qu’on le désirerait, mais je les fais. Bon.

            Je ne dirai pas le nom de celui qui a lancé “ la défiance ”, et qui essaye de saper tous les jours ce que je dis.

 

            Voilà, je m’excuse, c’est comme dans la “ Tirade ”, je commence à être un peu vif, il faut que je m’arrête.

            Mais j’aimerais vous la relire, cette Tirade. Où est-ce qu’il y a une injure, dans la Tirade? J’étais hors de moi, c’est vrai. Je suis arrivé, j’étais hors de moi, j’ai parlé fort, j’ai été épuisé par le fait de dire ça, que j’avais simplement pris en notes, j’étais en eau après! D’accord, il s’est passé quelque chose pour moi, c’est vrai. Mais même dans ce moment-là, je n’ai pas enlevé un mot de la Tirade. Où y a-t-il une injure? J’ai dit que quelqu’un avait écrit un texte de faux-semblant. C’est ça, le comble de l’injure? Donc, qu’est-ce qu’on veut faire croire avec cette Tirade? Cette Tirade est ce qu’elle est. Je comprends très bien qu’il ne soit pas agréable à un certain nombre de la trouver dans l’Annuaire : qu’ils changent de délégué général. Ce délégué général exposera sa politique du ton qu’il lui conviendra.

            J’ai exposée ma politique dans la Tirade, et en effet j’ai pris cette Tirade pour préface. Bon, je voulais écrire cette préface dans le style du début, mais après, je n’en ai pas eu le temps, je n’avais plus d’idée, et j’ai donné ce texte-là parce qu’il me semblait le plus authentique, parce que c’était le moment où j’ai compris de quoi il s’agissait à mon avis, et alors, je l’ai mis. Je prétends que ce n’est pas un texte injurieux, en aucune façon, ce n’est même absolument pas un texte contre une personne — si j’avais voulu dire Tirade contre X, j’aurais mis Tirade contre X. C’est une tirade à l’occasion de ce que quelqu’un a écrit, et j’y expose en effet la continuité d’un combat de trente-quatre ans.

            Bon, ça m’a surpris moi-même, ce fameux trente-quatre ans, j’avais vingt ans à ce moment-là, je ne suis pas resté aux côtés du docteur Lacan comme ça, mais ça m’est venu en le disant — trente-quatre ans, une continuité de trente-quatre ans. Et on est à présenter ça comme un texte injurieux. Bon.

            Alors,  je dis : Très bien ! Confions dans l’histoire. Est-ce que le texte de la Tirade de 1998 sera considéré dans l’histoire comme un texte injurieux et infâme ? Je dis : Non ! Il sera considéré comme étant dans la ligne du même combat, et comme la preuve que précisément la continuité existe avec le combat du Dr Lacan.

            Excusez-moi de cette tirade.

 

Antonio Vicens  - Voy a contar una fábula del siglo XIV. Esto significa que nos situamos casi 500 años antes de que Napoleón inaugurase la época contemporánea con su frase "Ahora la política es el destino", frase conocida de todos los freudianos por la paráfrasis que hizo Freud diciendo "La anatomía es el destino". La fábula pertenece al Libro del Buen Amor del Arcipreste de Hita, Juan Ruiz. Un curioso y variado volumen que es una compilación de cuentos de lo que en la época se llamaban "ejemplos", provenientes de fuentes tradicionales.

El ejemplo que voy a leer es para mí cautivador en su simplicidad y me parece que ilustra lo que es la transmisión por el malentendido y también el valor de un discurso sin palabras. Dice así:

 

_"Así fue, que los romanos leyes no tenían;

fuéronlas a pedir a griegos, que tenían;

respondieron los griegos que no las merecían

ni las podrían entender, pues tampoco sabían.

 

Pero que si las querían para de ellas usar,

que antes debían con sus sabios disputar,

para ver si las defendían y merecían llevar:

esta buena respuesta daban para poderse excusar.

 

Respondieron los romanos que lo harían con agrado;

para la disputa prepararon un trato firmado;

mas como no entenderían el lenguaje desusado,

que disputarían por señas, por señas de letrado.

 

Pusieron día convenido todos para contender,

los romanos en cuita, no sabían qué hacer,

porque no eran letrados ni podrían entender

a los griegos doctores ni a su mucho saber.

 

Estando en esta cuita dijo un ciudadano

que tomasen a un campesino, un bellaco romano;

según Dios le enseñase a hacer señas con la mano,

que tales las hiciese: pues fue un consejo sano.

 

Acudieron a un bellaco muy grande y muy ardid;....

 

Vistiéronle muy bien con paños de gran valía,

como si fuese un doctor en filosofía;

subió a la cátedra, dijo con bravuconería:

“Vengan aquí los griegos con toda su porfía”.

 

Llegó allí un griego doctor muy esmerado,

escogido entre griegos, entre todos loado;...

 

Levantóse el griego con gran tranquilidad,

y mostró solo un dedo que está junto al pulgar;

luego se sentó en ese mismo lugar;

levantóse el bellaco con gesto de pelear.

 

Mostró luego tres dedos hacia el griego tendidos,

el pulgar con los otros dos con él contenidos

a manera de arpón los otros dos encogidos;

sentóse el necio mirando sus vestidos.

 

Levantóse el griego, tendió la palma plana,

y se sentó luego con su conciencia sana;

levantóse el bellaco con presunción vana,

mostró el puño cerrado, de pelea con gana.

 

A todos los de Grecia, dijo el sabio griego:

“Merecen los romanos las leyes, no se las niego.”...

 

Preguntaron al griego que fue lo que dijera

por señas al romano y qué le respondiera.

Dijo: “Yo dije que hay un Dios; el romano dijo que era uno

en tres personas, y tal señal hiciera.

 

Yo le dije que todo estaba en su voluntad;

respondió que en su poder tenía el mundo y dijo verdad.

Desde que vi que creía en la Trinidad,

entendí que merecían de leyes seguridad”.

 

Preguntaron al bellaco cuál fuera su antojo.

“Díjome que con su dedo me quebrantaría el ojo:

y de esto tuve gran pesar y tomé gran enojo.

Respondíle con saña, con ira y con sonrojo

 

que yo le quebrantaría, ante todas las gentes,

con dos dedos los ojos, con el pulgar los dientes.

Díjome luego tras esto que le parase mientes,

que me daría gran palmada en los oídos retiñentes.

 

Yo le respondí que le daría tal puñada,

que toda su vida la viese vengada.

Desde que el griego vio la pelea tan mal parejada,

dejóse de amenazar a quien no teme nada.”

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V. - Dominique Miller, Eric Laurent, Luis Izcovich,

Antonio Di Ciaccia, Marcus André Veira, Juan Carlos Indart

 

Dominique Miller - Je voulais réagir à chaud à cette idée de l’École Une, parce que je dois dire que ça me soulage un peu et que ça commence à bien faire. A l’ECF cela fait au moins un an que nous sommes dans ce processus, qui est un processus de dissolution, de fait. Je ne sais pas s’il en sera question réellement, mais si ça continue comme ça c’est ça qui va se passer. Je crois que dans le Champ freudien on ne peut pas concevoir notre communauté avec une opposition. Le Champ freudien suppose une solidarité, et cette solidarité ne repose pas du tout sur une homogénéité. Quand on voit les témoignages des AE, on n’a pas du tout l’impression qu’ils sont tous pareils, ce sont plutôt des gens assez pittoresques, chacun pour eux-mêmes. Mais il n’empêche qu’il faut cette solidarité, qui repose donc sur une disparité. On parle de jumelage. Vous savez très bien que le problème des jumeaux n’est pas de se ressembler, leur problème c’est d’être différents, d’être séparés justement, de se rendre compte que, alors que tout est fait pour qu’ils soient le même, eh bien! il y a quelque chose qui fondamentalement les sépare. Je crois que c’est ce qui fonctionne et ce qui doit fonctionner par exemple dans les jumelages, et c’est bien pour cela qu’on parle de jumelage entre pays étrangers, entre terres étrangères, entre langues étrangères. Et ces jumelages ne sont que la représentation de ce que nous sommes tous. C’est ça qui fait notre réel, on connaît ça suffisamment, le non-rapport sexuel. A partir de ça, eh bien! il faut qu’on ait une solidarité sur une cause commune. Vous savez à quel point nous étonnons les autres groupes par le fait que là nous sommes mille cent et que certainement à la Rencontre internationale nous serons deux mille. C’est parce que nous transmettons que nous avons une cause commune, qui n’est pas du tout un idéal, qui est un désir. Quand Jacques-Alain parle c’est vrai qu’il est passionné, et je crois que nous le sommes tous, je le suis là en ce moment quand je parle. Donc, à partir du moment où il y a une opposition, c’est-à-dire une désolidarisation, eh bien! les choses éclatent. Je peux vous dire que, quand on est au Conseil de l’Ecole de la Cause freudienne - je m’excuse, je parle trop vite -, et que deux de nos collègues, qui ont été choisis pour participer à ce Conseil, ne sont pas là, eh bien! je peux vous dire qu’on a le sentiment que ce Conseil de l’Ecole de la Cause freudienne est bancal. Il faut que nous prenions malgré tout des décisions, que nous essayons de suivre l’orientation, la bonne marche de l’Ecole, avec un tabouret à deux pieds, et souvent on n’est pas loin de se demander si on ne va pas se casser la figure. Je ne sais pas ce qu’il en est du Directoire de l’Ecole de la Cause freudienne, mais je suppose qu’il en est de même.

            Donc je crois que nous sommes dans un groupe où on ne peut pas admettre des oppositions et des gens qui font bande à part.

 

Eric Laurent - Je voulais aussi intervenir sur le schéma et les propositions qu’a faits Colette Soler.

            D’abord je constatais que, pour la première partie de son exposé, nous étions d’accord sur le fait qu’il y a une tension de l’Ecole et des groupes. Tu dis, Colette, qu’il ne faut pas la prendre comme extérieure, c’est une tension à l’intérieur. Tout à fait d’accord. C’est effectif que l’on a vu s’exprimer des chefs de groupe qui sont à l’intérieur d l’Ecole. Ce n’est plus à l’extérieur, maintenant ce mouvement-là est à l’intérieur.

            De même, dans le discours universitaire, ça peut être aussi bien à l’intérieur. En effet, ce peut être dans les Sections cliniques, ce peut être un certain usage que font des collègues, qui sont à l’intérieur et qui en effet ont une tendance à universitariser, au sens précis de cette extinction de la place de l’énonciation et de la mise au poste de commande du savoir, sans énonciation apparente. Simplement il faut veiller à ce que les Sections cliniques en effet ne tournent pas à ça. En effet on a très peu de chance que l’université nous protège de l’université, mais on a une petite chance que les Sections cliniques nous protègent. En tout cas il faudra sans doute y veiller davantage et en tirer toutes les conséquences.

            Le troisième point, c’est un désaccord plus global sur la présentation de la façon dont tu situes l’aporétique du Un. C’est une présentation d’une juxtaposition de symptômes isolés, obtenus par la cristallisation, la purification du symptôme au cours de l’analyse, et le problème serait de les faire tenir ensemble par ce Un d’exception.

 

Jacques-Alain Miller - J’ai bien noté : Colette Soler parlait d’unifier les exceptions.

 

Eric Laurent - C’est là qu’il peut y avoir en effet des divergences.

            Qu’est-ce que la mise au point du symptôme dans l’expérience quand nous disons soit identification au symptôme, soit savoir-y-faire avec le réel en jeu ? En effet, les AE en témoignent - ce n’est pas simplement dans les livres une rumeur qui circule -, avec ce point impossible en effet, qui peut se dire de différentes façons, avec le S de grand A barré, on apprend à faire avec un certain réel en jeu. Ce qui permet, par rebroussement, de s’adresser à un certain type de réel, et chacun sait y faire avec un certain type de réel.

            Dans l’IPA on dit ça par exemple de la façon suivante : “ Il y a des analystes qui sont excellents pour analyser la phase sadique-anale ” ; ou “ Il y a des analystes qui sont excellents pour analyser tel type de symptôme ”. C’est-à-dire qu’on reconnaît [le point de rebroussement,] qu’il y a un certain savoir-y-faire.

            En effet, chacun atteint à la fois ce symptôme, mais pas du tout qu’il ne l’isole pas ce point-là, ça l’amène à un certain savoir-y-faire, et par là ça le lie à d’autres symptômes, ça le lie à un certain mode du réel.

            C’est pour ça que je vois plus notre monde comme une sorte d’algorithme si l’on veut, de série, de niveau, ou de puissance - c’est le terme qu’avait utilisé Jacques-Alain ces jours - de savoir-y-faire avec du réel. Le monde que nous avons est un monde très différencié. Il y a, d’un côté, dans ses Ecoles, des règlements où c’est le quelconque, la permutation, le tous-pareils, et de l’autre, il y a le savoir-y-faire avec le réel qui est toujours ce qui échappe au règlement. Et au fond notre système d’Ecole fonctionne, pas seulement sur le règlement, il fonctionne sur ce savoir-y-faire, avec ce qui circule entre tout ça, qui peut être affectio societatis, odio societatis, inertio societatis. Bref, le bout de réel en jeu qui circule. Et chacun s’adresse à ça. Et ça en effet ce n’est pas transmissible, on ne peut trouver de solution par décret, et c’est pourtant le monde que nous construisons.

            C’est pour cela que je ne vois pas du tout ce monde comme Un-tout-seul et le reste, mais plutôt, disons, exceptions multiples. Il suffit qu’il y en ait un qui réalise l’effectivité du processus, pour qu’en effet on s’aperçoive alors, que les autres fonctionnent aussi comme ça, qu’ils ne sont pas simplement définis par leur permutativité, régularité, etc, qui pourtant est un niveau essentiel, mais par le savoir-y-faire avec le réel en jeu. C’est là que je dis en effet que ce monde tient, et les interventions que chacun fait là-dessus, dépendent du point où il en est ; ce n’est pas interchangeable.

            Lorsque par exemple, au début des cartels de la passe, Jacques-Alain Miller a dit “ Il y a une divergence entre les cartels, parlons-en ”, en effet il pouvait, lui, la voir, la mettre au jour, et non pas par une sorte de fantasmagorie, toute la suite a pu montrer qu’en effet il y avait bien des problèmes. Qui pourrait dire que c’était simplement une rêverie que de penser à un désaccord? Il y avait un désaccord. Et il a pu trouver sa forme, trouver une mise au point, permettre une discussion. C’est-à-dire au-delà des effets de défiance, je pense que c’est plutôt un témoignage de ce qu’on peut appeler la façon dont chacun intervient sur le réel en jeu selon ce qu’il sait y faire.

            Maintenant, si j’ai bien compris, il y avait une proposition concrète à la fin de ton exposé, qui était que l’AE soit analyste de l’expérience de l’Ecole. Eh bien ! il me semble que c’est tout à fait ce qui se passe. J’ai le sentiment que nous avons des AE qui, de plus en plus, sont analystes de l’expérience de l’Ecole. Nous avons connu un certain type d’AE : dans la première crise, en 1989, on en avait un qui était considéré comme une sorte d’idéal d’AE et qui professait qu’il fallait être loin de toute l’Ecole, que la meilleure façon d’être analyste de l’Ecole était d’être sur l’Avantin, très haut. Cet AE ayant été nommé, il a fallu contester cette conception bizarre et le ramener sur terre. Mais là maintenant on a des AE qui considèrent normal en effet de parler de la crise politique en cours, de ramener ça à des points précis de leur analyse, que tout cela ne s’opère pas simplement au ciel des idéaux mais s’effectue dans un certain type d’expérience, voire réfléchir sur les modes d’organisation, de structuration, [ce que nous avons appelé les " gouvernes "] comment chacun va au-delà de cette figure du père et de son amour équivalent pour tous les symptômes, que sont pour lui les enfants, eh bien ! au-delà de cet amour pour tous, en effet, ce qu’est le Un à quoi on peut avoir affaire lorsqu’il s’agit de mettre en oeuvre une action humaine.

            Alors, les AE toujours plus responsables de l’expérience de l’Ecole, sûrement. Ils sont dans les Conseils, ils prennent la parole, et je pense qu’il faut les stimuler toujours plus.

            Maintenant, qu’il faille aussi bien voir que ce savoir-y-faire avec le réel de chacun ne se soutient pas sans les Ecoles, sans leurs règlements, sans leurs procédures parfois lourdes, eh bien ! en effet c’est exactement comme ça que ça avance ! Le pas en avant que nous allons faire vers le plus d’unité, l’Aufhebung que propose Jacques-Alain, ça se fera dans le cadre d’une Ecole qui va supposer encore des procédures, des règlements, un certain nombre d’équilibres et d’équilibrages qui à chaque fois doivent être mis au point compte tenu de la particularité de ce pourquoi l’Ecole est faite.

            Nous avons donc un système extrêmement articulé, réticulé. C’est un monolithe, mais un monolithe entendu comme un cristal. Le cristal, c’est extrêmement réticulé, et pourtant ça se présente avec un maximum de compacité. Alors, allons vers le cristal ! C’est un mode d’organisation, si on suit cette métaphore du monolithe, qui permet de combiner à la fois la réticulation, une algorithmisation, et pourtant un point de solidité.

 

Luis Izcovich - El psiconálisis de orientación lacaniana atraviesa un momento histórico. Una página se da vuelta hoy y se anuncia en ella cuales serán las coordenadas del psicoanálisis para el tercer milenario.

            Una fórmula se deduce a partir de esta conversación y se destaca netamente del resto: el psiconálisis en el siglo XXI depende de la AMP que es su útil necesario y la Tirade que aparece como introducción del anuario, es su plataforma. Notemos que la cuestion ya no es más si el siglo XXI será lacaniano o no. Estamos tan seguros de nosotros en cuanto al resultado? En todo caso la apuesta ya no es esa. La apuesta se mezcla con una amenaza: sin la Tirade , la causa esta muerta. Es incontestable que fórmulas de este orden son un modo de retomar lo que el DG nos indicaba con la promesa del Apocalipsis. Antes era: sin mí, la nebulosa. Hoy sería, sin la Tirade, el diluvio.

            Muy bien, todo esta muy claro, sólo que yo digo que no. Yo exprimo (sic) mi solidaridad con los colegas mencionados en la Tirade y rechazo entonces el contenido del prefacio del anuario de la AMP.

            La amalgama está hecha. El siglo XXI, es aquél donde se verá lo que se prepara hoy: de lo que se trata es de hacernos creer que la causa analítica es igual a la fidelidad al DG.

            Hay en esto un cambio histórico. En el 92 fue el Pacto de París con la creacion de la AMP. Se trató de un pacto de confianza ilimitado en relación al DG, un cheque en blanco. Hoy se miden las consecuencias. Una de ellas es el anuario. Se acusa en él a Sauret de falso semblante. ¿Pero qué mejor ejemplo de falso semblante que el de promover la reconciliación por un lado, y publicar un ataque violento por el otro ?.

            Nos decían, Jacques-Alain Miller el pacificador. ¿Este anuario apunta a la pacificacion? A mi se me plantean problemas practicos. ¿Podré presentar este documento al exterior de nuestro campo? ¿A un ministerio por ejemplo que nos pregunta que es la AMP?

            Yo digo que sí a la causa, sí a la ECF, pero no a una deriva, la de la AMP, en la que no reconozco ni el discurso analítico ni las condiciones necesarias para su existencia.

            Se dice en esta conversación que la posición de cuestionamiento a la politica del DG está basada en intereses personales. Hay que señalar que el mejor interés en nuestro campo es el silencio. Si uno está en una instancia de la Escuela, si es eficaz y además silencioso, es seguro que tiempo después va a pasar a otra instancia.

            El mejor nombre del interés personal es el silencio. Salvo, si se espera que uno hable. En dicho caso el silencio será acompañado del castigo.

            En cambio si se habla sólo debe ser para testimoniar un acuerdo, el acuerdo con la versión oficial.

            El pacto entonces del que se trata en este momento histórico, es un pacto de exclusión de hecho de una serie de colegas. Ello implica la renuncia al pacto, que presidió a la creación de la ECF y al que más tarde presidió a la creación de la AMP: pactos éstos de solidaridad no entre personas, sino entre colegas que se reconocían en la orientación lacaniana.

            En definitiva, me parece evidente que realizar el sueño de la unidad es incompatible con la posibilidad de ofrecer a que cada uno despliegue su talento por la causa analítica. Por lo tanto, no me parece que las bases actuales de la AMP constituyan el mejor punto de partida para la reconquista del campo freudiano.

 

José Monseny  - Aunque voy a repetir algunas cosas que ya se han dicho voy a fijar mi posición. Mi nombre: José Monseny, miembro de la EEP. Para mí plantear la cuestión de que aquellos que han planteado problemas y objeciones sólo defienden los intereses, es un error de método. Los intereses, es un problema, seguía Lacan, pero están por todas partes. Hay intereses y hay confort para quedarse también bajo el Uno de la compacidad. Y a veces, por el contrario, poner cuestiones, plantear objeciones y riesgos, implica que uno sienta que pueda perder todo aquello que cree tener. Que para el que ha hecho la experiencia de la desubjetivación sabe muy bien que en la mayor parte de los casos es fundamentalmente imaginario.

            Una paciente me dijo ya hace bastante tiempo -muchas cosas aprendemos de los pacientes, no sólo de nuestra propia experiencia- me dijo: "Acabo de descubrir que en toda mi vida una falta de coraje me ha llevado a realizar siempre un trabajo infatigable". A veces detrás del trabajo decidido no siempre y necesariamente hay un amor por la causa.

            Para mí tres cosas son fundamentales. Trataré de exponerlas con claridad. La primera: ¿hasta qué punto la Escuela puede seguir siendo una Escuela plural, la Escuela del paisaje que Jacques-Alain Miller me hizo amar y que me hizo ayudar a entender lo que significaba el ¿...? lacaniano, ¿...? compatible con la Escuela Una, pero con un sólo límite que debería tener, a mi modo de entender, allí donde apareciera una concepción verdaderamente distinta del psicoanálisis, demostrada y fundada en razón y reconocida como irreconciliable. Yo hasta ahora no he visto esto. Y soy consciente de que mis palabras hacen un cierto eco a las del Dr. Zilboorg en aquellos tiempos del Discurso de Roma.

            Segunda cuestión para mí fundamental. No creo que todo se reduzca, aunque esté presente, a la cuestión de la Escuela versus Grupo. Para mí la cuestión más importante aún es si la Escuela, que es siempre un grupo, podrá seguir siendo permeable al discurso analítico, al deseo del analista que es deseo de la pura diferencia.

            La tercera cuestión que para mí es importante, y que me gustaría que pusiéramos bajo la disputatio y no bajo las disputas, es si puede seguir siendo una Escuela del Pase, una Escuela creíble, donde todos podamos confiar, y sobre todo donde podamos innovar y realizar una buena articulación entre el gradus y la jerarquía.

            He seguido desde los inicios del Campo Freudiano en Barcelona la orientación de Jacques-Alain Miller. Yo no soy de esos que a veces él dice que le odian. Él lo sabe muy bien, y los que son mis colegas cercanos también. No sólo no le odio sino que tengo un gran aprecio, estima y respeto por él. No creo tampoco que él sea el único problema como en algún momento parece que él entiende que algunos le dicen. He dicho en muchas ocasiones que la figura feroz y terrible del superyó se alimenta de muchos de los renuncios que nosotros hacemos. En muchas ocasiones he dicho a mis colegas que para mí también es un problema una asamblea muda, y algunas de esas hemos tenido. Creo que ha habido entre eso y la magnificación de la figura feroz, una cierta relación.

            Puse todo lo que yo tenía en esta Escuela, y no lo digo para hacer ahora un balance, sino lo digo para decir que tenía confianza en él. Trabajando junto a él, y con su orientación, he visto durante años favorecer la superación de las diferencias. Pues bien, no entiendo el modo de llevar las cosas desde Buenos Aires hasta aquí. No veo la voluntad de hacer una Aufhebung a pesar de algunos gestos. Tanto la topología como la cronología de los tiempos lógicos de los debates me parecían erráticos y confusos y algunos, especialmente Internet, más proclives a favorecer el odio y la segregación. Además, para mi tristeza, le he oído repetir en los últimos días: "no iré tras de nadie, los puedo perder". En eso me ha parecido oír un deseo de segregación que teme. Y me pregunto, pero ¿qué Escuela es esa que cada equis tiempo necesita excluir lo diferente o incluso lo discrepante? ¿No es eso la Ausstossung freudiana? ¿No va eso en contra de lo que Lacan nos decía de que el psicoanalista a lo real debe hacerle frente?

            Voy a expresar un Wunsch, y digo un Wunsch porque el deseo es inconsciente. Aquí en Barcelona, tal como Jacques-Alain Miller escribió en una ocasión, se cambió la flecha de la tendencia que lleva a la disgregación a los grupos psicoanalíticos. Mi deseo sería que esa fuese la serie que se repitiese. No la de las escisiones. También me gustaría, en ese Wunsch expresar que la propuesta de una Escuela catalana o una Escuela de España en Barcelona no sea una operación que al compacificar anule la diversidad de voces, o que reabra divisiones que durante años trabajamos para superar.

            Y quiero añadir para terminar que ha habido y hay efectos de discurso universitario tanto en el Campo Freudiano, como en las Secciones Clínicas, como en las mismas Escuelas. Los cuatro discursos abundan por todos los lugares. Muchas gracias [applaudissements].

 

(Jacques-Alain Miller quitte la tribune et va s’asseoir dans la salle)

 

Antonio Di Ciaccia - Je voudrais dire deux mots. En premier lieu, comment je situe tout ce qui se passe ces derniers temps. Je le situe entre la dispute et la disputatio, disputatio est un terme latin, c’est un débat argumenté sur un thème souvent indexé du nom d’une personne. J’aurais aimé qu’il y ait eu moins de dispute et plus de disputatio. Pendant que je me disais cela, il y a quelques jours à Rome, je suis tombé sur un livre qui reprenait une disputatio théologique de la première moitié du XIIe siècle à Paris et qui s’était terminée avec beaucoup d’excommunications et beaucoup de morts. On n’en est pas là. Or la disputatio permet d’extraire d’un contexte contingent un enseignement qui n’est pas contingent. C’est le premier point.

            Deuxième point. La disputatio est souvent indexée, comme je le disais, d’un nom propre. C’est dans cette optique que j’ai lu la Tirade de Jacques-Alain Miller. En fait, moi-même, je suis en position de recevoir une tirade. J’étais le plus-un du cartel B de la passe. Carmen Gallano a parlé d’une disqualification de mon cartel, peut-être que d’autres membres du cartel le pensent, moi je ne le pense pas. C’est vrai, le cartel B restera marqué d’une défaillance, défaillance dont je suis responsable en premier lieu. Mais d’autre part le cartel B restera comme signe d’une avancée théorique et pratique, par rapport à certains dysfonctionnements de la passe.

            J’ai été très sensible ce matin à ce que disait Marie-Jean Sauret. Mais je pense que c’est à chacun de nous de donner à tout cela le statut d’une marque négative ou d’une marque positive. Merci.

 

Marcus André Vieira de EBP-Rio - Eu vou pedir a vontade de vocês para sair um pouco das questões essenciais para retomá-las desde um ponto de vista local; vou voltar ao Rio.

            Algo me veio durante o almoço, fiquei com uma dúvida, se eu falava, se valeria a pena voltar a isso. Mas como continuo achando, vou voltar e por isso fiz duas horas de fila aqui. Rio não deixa de ser um lugar que reúne aspectos paradigmáticos da crise que a gente esta vivendo e então eu deixo a generalização a cargo de vocês. Eu queria trazer algo que me incomodou hoje de manhã. Não da para a gente sustentar a idéia que no Rio havia um grupo que funcionava muito bem e que houve uma crise imposta de fora, o que explicaria uma espécie de lógica do processo e da exclusão.  Eu não estou dizendo que Rio estava em crise, que era um caos, mas Rio tinha seus problemas específicos e na nossa última reunião ¾ vou apenas retomar o dito por Ricardo Seldes mas é importante insistir ¾ foi essa minha posição. Existe uma crise específica do Rio quanto a lógica de poder no Rio de Janeiro e a maneira em que era exercida e que era problemática. Claro que casou-se com isso a crise internacional e tornou o momento atual do Rio a paralisação total como foi dito hoje de manhã. O Rio está tal vez paralisado, em termos de atos administrativos, por exemplo, por causa deste problema mas aconteceu uma coisa muito forte no Rio nestes últimos tempos. Certamente aconteceu algo que era para acontecer. Aconteceu que uma série de pessoas resolveram se pronunciar, se colocar, tomar posição e dizer não ao tipo de funcionamento que havia no Rio e que eu acho que independe da crise internacional.  Desse ponto de vista, devemos suspender a idéia de um vetor de cima para baixo, para mi é horrível, uma crise imposta e que iria a cortar algumas cabeças num lugar que funcionava tão bem. Acho que não da para sustentar essa idéia e temos que pelo menos pensar num círculo ou um outro tipo de funcionamento para poder entender a crise. A partir de ali tal vez a gente possa generalizar um pouco e pensar que o que aconteceu no Rio é algo específico e ao mesmo tempo geral.

            O que acontece no Rio hoje em dia, eu acho, permite pensar que é possível  se descortinar uma grande mudança para melhor com uma grande possibilidade de entusiasmo no trabalho, de um trabalho diferente tal vez do que se fazia até agora, mas tal vez até com as mesmas pessoas, não sei, mas um trabalho na minha opinião, muito mais rico ainda.

            Isto permite tal vez que a gente deixe de lado a idéia que haveria uma briga interna entre Rio de Janeiro e Minas Gerais. Faço parte faz pouco tempo do Conselho da Seção Rio mas foi discutido e o que ficou claro é que haveria um problema com o seminário de Quinet em Minas. Nunca houve problemas, nunca aconteceu uma rivalidade desse tipo entre a Seção Rio e a Seção Minas. Bom, obrigado.

 

M. X? ( texte inaudible)

 

Jacques-Alain Miller - Une toute petite pause, la lecture d’un poème, très brève. Juan Carlos Indart va lire en espagnol un petit passage d’un très beau poème allemand de Hans Magnus Enzerberger, qui s’appelle “ Le naufrage du Titanic ”. C’est un petit passage simplement sur l’iceberg, et ça mettra une toute petite ponctuation avant qu’on poursuive.

 

Juan Carlos Indart - El Iceberg.

 

El iceberg avanza hacia nosotros

inexorablemente.

Vedlo cómo se suelta

del frente del glaciar,

de los pies del glaciar.

Sí, es blanco,

se mueve,

sí es más grande

que todo cuanto avanza

en el mar,

en el aire

o en la tierra.

 

Sueños mortales

que una larga caravana

de icebergs atraviesa.

“A doscientos cincuenta pies de altura

sobre el nivel del mar,

destellan sus colores

que son maravillosos

y totalmente diáfanos.”

“Como si fuese un sol

multiplicado

sobre celosías de cientos de palacios”

 

Mejor es no pensar en lo que pesa

un iceberg.

Cuantos lo han visto

no olvidarán jamás tal espectáculo

aunque vivan cien años.

 

“Ese espectáculo aguza la imaginación

pero llena el corazón

de un sentimiento de involuntario horror”

 

El iceberg carece de futuro.

Flota a la deriva.

No podemos hacer uso de él.

Existe, sin duda.

No tiene valor.

La confortabilidad

no es su fuerte.

Es mayor que nosotros.

Siempre y únicamente

vemos su cima.

 

Es efímero.

No se preocupa.

Nunca progresa,

pero “cuando, parecido

a una inmensa mesa

de mármol blanco,

veteado de azules,

se mueve de improviso y quiebra lo profundo,

todo el mar se estremece”.

 

En nada nos concierne,

sigue su ruta monocorde,

no necesita nada,

no se reproduce,

y se derrite.

No deja huellas.

Se disipa perfectamente.

Sí, ésa es la palabra:

perfectamente. 

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VI. Manoel Barros da Motta, Rose-Paule Vinciguerra, Alexandre Stevens, José Rambeau, Danièle Silvestre, Pierre Skriabine

 

Manoel Barros da Motta de EBP-Rio  ¾ Bem eu queria tratar de algumas oposições que dão conta do que aconteceu com o Rio de janeiro e que entram em relação com o quadro geral da AMP. Posso testemunhar de alguns desses  acontecimentos porque fiz parte do Conselho da seção, estive ligado a Escola desde antes da fundação e também tive algum papel na edição do livro de Colette Soler. Bem,  a primeira oposição que eu gostaria de fazer é entre a guerra e um pacto. Me parece que em primeiro lugar que essa questão da guerra existe em Lacan, quer dizer, no coração da teoria analítica isso foi tomado como tema, naturalmente transformado tendo em vista os objetivos da psicanálise, quando Lacan articula tática, estratégia e política  da psicanálise e todos sabemos que essa trilogia foi tomada de Clausewitz, um teórico da guerra. Lacan fala que o psicanalista deve se aparelhar. Não me parece que o combate pela psicanálise possa ignorar essa dimensão do conflito, da dialética, ela esta presente em Lacan. Enfim, não é possível esquecer essa dimensão.

            Há também a dimensão do pacto, o pacto que criou a AMP e o pacto que por exemplo foi feito pela AMP e pela EBP recentemente no Rio de Janeiro e que, em um certo sentido, encerrou uma parte dos conflitos que existiam localmente. Eu creio que eles podem ser expressos de uma maneira bastante clara por aquilo que Jacques-Alain Miller disse ou escreveu, na famosa Tirade, quando ele se refere a opção das exigências de uma democracia extremamente forte no centro mas que localmente praticam uma política muito pouco democrática, dura com os oponentes como a que nos vemos existir no Rio de Janeiro mais ou menos a partir de um ano atrás. Uma série de problemas que se configuram exatamente nesse quadro surgiram.  Uma parte dessas questões pode ser esclarecida a partir dos textos da Conversação do Rio, as pessoas da AMP podem ter acesso a esses documentos. Existe um quadro que foi bastante sério, de problemas extremamente graves que dizem respeito  ao trabalho de colegas, de dis-funcionamentos de instâncias que tem a ver com esse estilo de política que está comentado na Tirade. Eu diria o contrário, eu diria que a presencia de Jacques-Alain Miller, do Delegado Geral no Rio de Janeiro a diferença de produzir uma crise, na verdade ela  tornou possível que um bom numero de pessoas das instancias responsáveis da Diretoria e do Conselho pudessem tomar a palavra. De tal maneira era um mal-estar fechado, de tal maneira havia angustia, silencio, imposições absurdas, um poder paralelo, que eu não vou  chamar  de ditadura. Acho excessivo, existe um extremismo espantoso na forma em que se fala de ditadura. Creio que um bom número de argentinos e brasileiros que passaram efetivamente pela ditadura sabem que no Campo freudiano isso não existe. No me parece absolutamente que o Delegado Geral, nem  as escolas, ao menos com as que eu tive contato, funcionem dessa forma, nesse quadro. O que me parece realmente é que há abusos, pode-se pensar que são metáforas, que são imagens, etc. porém há abusos extremos  de certos termos, imprecisões ou ainda uma tendência que leva para o sentido oposto.

            O que diz respeito por exemplo a  questão das citaçoes. Eu estava trabalhando na edição de um livro de Colette Soler, a edição desse livro entrava um pouco no quadro do múltiplo como disse Jacques-Alain Miller aqui e eu assumo a responsabilidade por isso. Havia me parece, um quadro em que por exemplo, os livros eram produzidos de uma maneira um pouco independente, sem muita coordenação. Esse livro originariamente havia sido programado para a coleção que dirige Jacques-Alain Miller, Coleção do Campo freudiano no Brasil. Problemas com o editor e outros problemas levaram a que esse livro fosse editado por uma outra editora, uma responsabilidade que eu assumo, eu diria que ate tenho uma certa culpa, usaria esse termo, efetivamente. Esse livro, Foi me pedido por Jacques-Alain Miller que a edição desse livro fosse diferida, se desse um tempo para a edição, para depois desta Assembléia, porque efetivamente, com o quadro no Brasil, havia problemas aí, alguns que eu próprio ignorava. Eu concordei com esse aspecto, esse livro deverá ser publicado, não se tratou absolutamente em momento nenhum de proibição do livro, eu não ouvi isso de Jacques-Alain Miller. Pelo contrário, perguntou-me se havia outros projetos, num modelo que não significa censura, pelo menos quanto a minha atividade de produzir este livro, poderia entrar em detalhes sobre a edição.

            Quanto à questão das citações ou como se diz em francês do pompage, eu não posso efetivamente comentar esse problema mas me parece que algumas pessoas quando falam ao respeito, em vez de discutir  argumentativamente do que se trata: o que é citar, o que foi dito, quais são as teses, aonde, etc., tomam uma posição extremista também dizendo "a obra foi jogada na lama, etc." coisas desse  gênero, que me parece que para uma comunidade analítica não é muito positivo, não me parece que seja um bom caminho. A discussão argumentada é algo mais razoável para levar em conta nessa discussão em relação a esse problema, e não o tipo de postura que eu vejo ser adotada por muitas falas. Me parece que é preciso meditar, argumentar reflexivamente e criticamente sobre o que acontece, levar em conta os documentos, informar-se com maior precisão porque a tendência ao extremismo leva a graves problemas para a AMP e para o destino da psicanálise.

 

Rose-Paule Vinciguerra - Je voudrais poser une question et faire une remarque.

            Une question. On a parlé d’aporie tout à l’heure, et on a souvent opposé, dans les textes qui ont été envoyés sur Internet, orientation théorique et directives politiques, de Jacques-Alain Miller nommément ; on a pu lire aussi que politiquement on avait fait confiance à Jacques-Alain Miller et que c’était une erreur ; on a parlé de dysfonctionnements récemment découverts. Mais pourquoi ce dessillement collectif après tant d’années de confiance ? Voilà la question que je pose. D’autre part, comment rendre compte théoriquement de cette division entre des dysfonctionnements dans l’ordre politique et par ailleurs une orientation théorique analytique que l’on trouve fondamentale pour notre champ?

            La remarque. On a entendu beaucoup de revendications au nom du règlement démocratique. Le règlement démocratique je le respecte ; la preuve c’est que j’attends depuis presque deux heures que le micro tourne. Cela étant, est-ce qu’il n’y a pas une illusion dans cette revendication de règlement démocratique? On sait que Lacan a parfois qualifié la démocratie de démocratie de maîtres. Par ailleurs, une institution analytique comme la nôtre n’est-elle pas fondée nécessairement sur le transfert ? Le transfert, dans un de ses derniers Séminaires, Lacan le qualifie non pas de moyen mais de résultat, du fait qu’il y ait du savoir. Au fond, toute la question est de se demander si ce savoir, dans notre institution est au poste de commandement, mortifié, comme on a pu le dire ce matin, ou s’il est frayé à partir d’une position de bord. De bord c’est-à-dire au joint du réel. Je pense que Jacques-Alain Miller est à cette place de frayer un savoir à partir d’une position de bord. Et je pense qu’il faut à ce moment-là tirer les conséquences politiques du fait qu’il tienne cette place épistémique.

 

Alexandre Stevens (texte établi par Alexandre Stevens) - Je voudrais revenir sur un point qui était présenté par plusieurs comme un des moments d’où s’origine le malaise, puis la crise que nous connaissons aujourd’hui. C’est ce moment du début du Collège de la passe, et puis d’une grande partie de sa durée, où il a été fait état d’une “ guerre des cartels ”. C’est une expression que reprenait Antonio Quinet ce matin dans sa série des guerres. Carmen Gallano ensuite, lorsqu’elle évoquait ce qui est à l’origine de la crise actuelle, mettait en avant deux points : l’accusation de plagiat faite par Jacques-Alain Miller vis à vis de Colette Soler et, disait-elle, la disqualification du cartel B par Jacques-Alain Miller.

            C’est sur ce point de la disqualification du cartel B que je voudrais intervenir pour préciser les choses. Qu’est-ce qui s’est passé au Collège de la passe? Il y a eu en effet un débat sur une décision d’un cartel. C’est le point nodal, le point majeur de ce qui se subsume sous le terme de “ guerre des cartels ”, parce que cette décision a été aussi entendue avec les articulations théoriques différentes des deux cartels qui avaient été proposées à Buenos Aires deux mois avant l’ouverture du Collège. Il y a eu un débat nourri, qui est publié, que chacun peut lire, il y a eu ensuite d’ailleurs un débat sur le père et l’exception, qui vient absolument à la suite de celui-là, on pourrait le démontrer. Et puis je pense que l’on peut dire qu’une grande majorité des membres du Collège a considéré que la décision du cartel B n’avait sans doute pas été la bonne. Alors certains ont reproché à ce débat de jeter la suspicion, le discrédit sur la passe. Et ce débat, il faut bien dire que c’est Jacques-Alain Miller qui l’a mené, initié, soutenu, on peut même dire exigé, contre le dysconfort qu’il engageait. Et c’est pourquoi sans doute Carmen Gallano, pensant que ce débat jette le discrédit, et comme c’est Jacques-Alain Miller qui l’a initié, dit “ Jacques-Alain Miller a disqualifié le cartel B ”.

            Au fond, il y a là un choix politique.

            Je reprends les termes de Pierre-Gilles Guéguen dans le débat de ce matin, qui articulait politique de la psychanalyse et pari épistémique. Je suis parfaitement d’accord avec ça. Et c’est justement ce qui fait que je pense que ce débat ne jette pas de suspicion sur la passe, et pas de discrédit sur le cartel B. Il a discuté une décision du cartel B, ça n’est pas en tout cas un discrédit sur les personnes, ça n’est même pas un discrédit sur l’ensemble des décisions d’un cartel. Moi je soutiens plutôt qu’un tel débat est sain, nécessaire, et que c’est ce débat qui maintient du crédit à la passe et qui fait que la confiance que nous faisons au dispositif peut persister. D’ailleurs très concrètement, Jacques-Alain Miller l’évoquait tout à l’heure, cette confiance dans l’Ecole persiste largement puisque le nombre de demandes de passe reste extrêmement important.

            Je pense au contraire que structuralement, ce qui jette la suspicion, la défiance sur la passe, c’est le refus d’un tel débat, cela aurait été le refus d’un tel débat. Evidemment le refuser au titre que d’en parler risque de jeter le discrédit sur la passe, ne modifie rien au fait que c’est ce refus même qui jette le discrédit.

            Il faut bien voir que ce Collège de la passe, parce que j’ai entendu aussi Kaltenbeck ce matin qui proposait une instance de contrôle, qui contrôlerait aussi bien un certain nombre de malaises de nos collègues, si j’ai bien compris, que les décisions de passe, il faut bien voir que le Collège de la passe ce n’est pas du tout un ensemble de sages. C’est tout simplement ceux qui ont été, au cours des six dernières années, membres d’un des cartels ou du secrétariat, c’est-à-dire des personnes qui ont eu toutes à prendre de telles décisions. Ce n’est pas un collège de sages, ce sont des personnes qui se sont engagées dans de telles décisions, et qui au bout de six ans réfléchissent ensemble pour voir comment ça marche.

            Il me semble que si on veut refuser à un tel endroit un débat sur le processus de décision, et même sur l’une ou l’autre décision concrète, c’est alors que la passe serait en danger. D’ailleurs, puisque c’est Jacques-Alain Miller qui nous a forcés à un certain niveau à ce débat, voilà une des raisons structurales que je vois pour soutenir son action. Je vous remercie.

 

José Rambeau - Je suis un membre encore récent de l’Ecole de la Cause freudienne par la procédure de la passe. Je voudrais apporter un bref témoignage de ce que je qualifierai de souffrance discrète, mais pour autant sérieuse parce que je serais dans l’embarras si les choses continuent, je serais dans l’embarras s’il me fallait choisir un camp. Je m’explique. Je me suis engagé à être enseigné par Lacan et son Ecole comme je me suis engagé dans une analyse lacanienne juste après la mort de Lacan. Je ne l’ai donc pas connu de son vivant. Ma première entrée à l’Ecole a été en tant qu’auditeur, comme beaucoup d’entre nous, elle s’est faite par la médiation du Collège freudien pour formation permanente - je voulais quand même le préciser, c’est une porte d’entrée. Ce que j’ai tout de suite repéré dans l’enseignement qui était délivré à l’Ecole de la Cause freudienne, c’est que la transmission de l’enseignement de Lacan et je dirais même de son énonciation particulière a été faite au fond par trois personnes. En tout cas, ce qui m’avait saisi, c’est, qu’il y avait un collège de la transmission de l’enseignement de Lacan, et ce collège était composé effectivement de Jacques-Alain Miller, Colette Soler et Eric Laurent. Je n’ai pas de lien analytique avec ni l’un ni l’autre.

            Ce que je voulais dire, c’est que ce collège, cette transmission collégiale de l’enseignement de Lacan, m’a permis en tout cas dans ma pratique clinique beaucoup d’orientations venant des uns et des autres. Alors aujourd’hui je me pose la question : pourquoi cette collégialité n’est pas applicable à l’AMP? Je vous remercie [applaudissements].

 

Danièle Silvestre - Vous reconnaîtrez avec moi que le lien associatif en a pris un coup. Mais il n'y a pas de quoi parler de dissolution!

            C'est plutôt le moment d'analyser ce qui se passe, enfin. Les AE qui sont à la tribune sont bien placés pour le faire ; c'est même ce qu'on attend d'eux : analyser l'expérience de l'École, c'est leur fonction, politique. Je vais faire quelques remarques là-dessus ; ce peut être le traitement que l'on fait subir aux personnes qui fabrique des opposants, puis une opposition, éventuellement. Mais c'est surtout la manière dont on maltraite les faits qui provoque le désir d'y aller voir de plus près — dans les faits — et de les examiner à la loupe. Mettre le texte de Jacques-Alain Miller, “ la tirade ”, en préface à l'Annuaire de l'AMP, est une des façons de susciter étonnement et curiosité, voire de solidariser une éventuelle opposition. Je ne chercherai pas à vous faire verser des larmes — de crocodile — sur le coup porté à des collègues, mais plutôt à vous faire vous demander si vous trouvez correct de publier un texte qui en critique violemment un autre, sans publier cet autre. Quand on lit “ la tirade ”, on a envie de lire le texte auquel elle répond. Comme membre du Conseil de l'AMP, si Jacques-Alain Miller m'avait demandé mon avis, je lui aurais déconseillé de faire ça. C'est une manière de procéder qui ne va pas.

            Cela m'est arrivé, à une échelle moindre, il n'y a pas longtemps: une petite revue, l'Envers de Paris, a publié un article critiquant un texte de moi qu'elle n'avait pas publié ; j'ai protesté — Leguil s'en souvient sûrement — en leur expliquant qu'on ne faisait pas ça ; ça n'est pas correct. Il en va de même avec les publications des documents du collège de la passe : les textes de Jacques-Alain Miller ont été publiés l'été 97, seuls, isolés des autres auxquels il répondait pourtant en général, et diffusés très largement. C'est seulement trois mois plus tard que les autres textes ont été publiés. Il ne faut pas faire ça. Il y avait pourtant un secrétariat du collège de la passe, et il y a le Conseil de l'École qui a en charge de veiller à la bonne marche de l'association. Il ne fallait pas laisser faire ça. Enfin, on a évoqué encore le cartel B. J'en faisais partie ; et j'apporterai ceci : le cartel B a été soupçonné d'avoir pris comme critère de fin d'analyse, comme critère de passe, la séparation d'avec l'analyste. Mais j'ai appris par une amie qui a fait la passe à l'EEP et qui m'a autorisée à en parler — elle me corrigera si je ne dis pas exactement ses termes — que la réponse que lui a donnée le cartel, avec sa non-nomination, était qu'elle avait atteint la fin de son analyse mais qu'on ne voyait pas bien... la séparation avec l'analyste. Je vous laisse avec ça.

 

Pierre Skriabine - Dire que non à l’exception, c’est ouvrir la porte au discours du maître. L’exception, on s’en est plaint depuis des semaines dans le courrier que nous avons reçu. L’exception, a-t-on dit, “ elle fait souffrir, elle est insupportable ”, et toute une kyrielle de signifiants stigmatisant le maître dans le vocabulaire de la féodalité a suivi. Je me suis demandé ce qui pousse ainsi à confondre le signifiant-maître et la fonction de l’exception d’une part, avec le discours du maître d’autre part. N’est pas là qu’un déguisement qui recouvre une tentative de faire émerger le maître pour de bon dans la psychanalyse? J’ai regardé tous ces textes qui nous sont arrivés, je vous en livre une lecture un peu abrupte, un peu brève, mais voilà.

Au niveau régional, on voit l’émergence de concrétions d’un pouvoir local assis sur une base solidement contrôlée. C’est peut-être du registre de l’anecdote, ce sont des choses qui arrivent toujours, mais ça aussi doit être traité et mis en question. En tout cas remarquons que c’est de là, là où le maître montre le bout de son nez, qu’on se plaint le plus de l’exception.

            Au niveau le plus global - et là est l’enjeu majeur -, il y a une conception différente, nouvelle, de l’AMP, qui se fait jour. En fait, au travers de ce haro sur l’exception - haro bien sûr sur Jacques-Alain Miller : c’est une AMP du tous frères, à l’occasion jumelés, et surtout une AMP réglée, dominée par un appareil et des apparatchiks, éliminant toute dimension possible d’une énonciation. Certes, il y a ici quelque chose qui est de l’ordre du discours universitaire. Mais il me semble qu’il n’y a pas seulement cela et que dans cet appareil on retrouve aussi les vieilles lunes du centralisme démocratique. Alors effectivement avec un tel discours il me semble qu’il n’y a pas possibilité de composer.

            Au niveau des Ecoles enfin, on voit surgir l’imputation du “ tout ”, étayée par une conception simpliste et faussée de l’exception. Parce que l’exception n’est pas simplement - et Lacan aussi le prend sous cet angle-là - ce qui conditionne le tout, l’exception c’est ce qui ouvre la voie de la série, c’est le niveau épistémique qui a été évoqué ce matin. L’exception, c’est quelque chose de tout à fait fondamental chez Lacan. Par exemple dans l’aliénation il faut qu’il y ait un signifiant Un qui, à un moment, chute, qui soit perdu, qui s’excepte, pour que l’infini des combinaisons signifiantes soit possible. Cette fonction est fondamentale. Et puis il y a l’exception évoquée sous le thème du chef d’orchestre qui permet le un par un, ou encore sous le thème de l’AE qui relance le savoir.

            Ce que je voudrais simplement en conclure, c’est que, au-delà des effets de pouvoir anecdotiques, il s’agit de savoir dans quel style nous voulons notre communauté. Pour ma part, c’est évident que cela ne pourra jamais être dans le sens d’un appareil bureaucratique . En tout cas ce n’était pas de ce côté-là que Lacan a imprimé son style.

J’aimerais qu’on adopte l’expression heureuse de Dominique Laurent, à savoir “ l’attitude droite devant le signifiant-maître ”, qu’on reconnaisse la posture de l’exception, pour que justement, des exceptions, il continue à y en avoir.

L’acceptation de la fonction de l’exception, je le crois, c’est tout le contraire du discours du maître.

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VII. - Pierre Bruno, Bernard Lecoeur, Gabriel Lombardi

Colette Soler, Sérgio Laia, Jacques-Alain Miller

 

Pierre Bruno — J’ai préparé hier soir le texte que je vais vous lire. Il se trouve que, malgré l’ampleur du débat qui a eu lieu aujourd’hui, je ne le trouve pas dépassé. Vous en jugerez.

            Auparavant, deux remarques en réponse à ce que j’ai entendu aujourd’hui :

            1) Toujours attentif à ce que dit Gennie Lemoine je veux simplement préciser à son intention que j’emploie le mot “ dialectique ” dans le contexte de l’opposition entre “ dialogue ” et “ dialectique du désir ”, opposition que je considère comme une référence de Lacan. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai souligné la nécessaire discrétion — à entendre comme discontinuité — du désir, sans laquelle sa mutation dialectique n’a pas lieu.

            2) Eric Laurent évoque la position d’un A.E. nommé en 1989, qui soutenait la thèse selon laquelle il y avait un problème d’incompatibilité entre la nomination comme A.E. et l’exercice de responsabilités institutionnelles. Je suis d’accord avec lui, mais lui fait remarquer que son opposition est en miroir, dès lors qu’il tient l’exercice de responsabilités institutionnelles comme une prime à la nomination. Dans les deux cas, l’enjeu de la passe en sort brouillé, car la charrue de la politique est mise — à charge ou à décharge — devant les boeufs — animaux que j’estime — de la passe.

            Le texte maintenant.

            Je ne sais quand j’aurai de nouveau l’occasion de m’adresser à vous. C’est pourquoi je me suis demandé avec une acuité particulière ce que je voulais vous dire et comment.

            J’aurais pu vous dire quelque chose sur le Collège de la passe puisque, pour moi, c’est de là que tout est parti. Je n’en dirai que ce qui est relatif au point que j’ai finalement choisi de retenir. Je crains que dans l’avenir le risque n’existe de voir la passe tendanciellement réduite à une procédure standardisée d’avancement, et ce contre la surprise de découvrir, quant à la fin et quant au désir de l’analyste, quelque chose qui était impensable d’avant.

            J’aurais pu vous dire ce qu’il en a été de mon éviction de la Présidence de l’ECF, motivée par la seule raison que je n’étais pas prêt à me faire le vaguemestre de la vérité officielle. Je ne dirai, là-dessus, qu’une seule chose : les douze collègues qui n’ont rien dit, rien fait, si peu que ce soit, pour contester cette éviction, n’ont pas sur ce point mon estime.

            Mais je concentrerai aujourd’hui mon message sur ceci, qui commande tout : le risque de dilution du psychanalytique dans l’éducatif. Mon désaccord raisonne avec “ l’esprit de l’École ” où la dite “ orientation lacanienne ” tient au constat que je fais : le Champ freudien est en train de devenir une industrie de formatage au un par un et sur mesure. C’est une expression étonnante, à la mesure de l’exploit qu’elle désigne, ou qu’elle vise : réussir une éducation où les grands, les petits, les maigres, les gros, les verts, les rouges, les jaunes n’aient plus aucun complexe, à condition de consentir à un principe éducatif, qui consiste à transformer le désir en demande.

            Il y a peu j’ai vu dans les rues de Paris un camion ou un bus sur lequel était écrit en lettres immenses l’impératif prometteur : apprenez à penser par vous-mêmes. Or penser par soi-même ne s’apprend pas mais, comme le savoir, se prend.

            Je vais cependant conclure sur un exemple encore plus probant à mes yeux et qui nous touche de plus près. Il se trouve qu’il y a trois semaines, quatre-vingt quinze collègues de l’ex-ACF-TMP sur cent treize ont signé un texte qui annonçait la décision des signataires de ne pas se rendre à la troisième Conversation de Toulouse. C’est ce texte qui a été qualifié de pétition par Guy Briole, contre donc l’évidence sémantique et l’évidence de la lettre, puisque les signataires ne demandaient rien. Ce détail illustre le trucage éducationnel dont je parlais : on transforme un désir — la décision — en demande — la pétition. C’est contre cette pente éducationnelle de la psychanalyse que je prends épistémiquement parti.

 

Bernard Lecoeur – Une remarque, brève, pour dire mon profond désaccord avec une idée qui voudrait s’imposer aujourd’hui. Celle qui consiste à laisser croire qu’il faudrait compter dorénavant avec une opposition au sein de l’AMP et au sein des Écoles. Je trouve cette idée exorbitante. Je ne vois pas comment, à l’intérieur de l’AMP ou d’une instance quelconque – un Directoire par exemple -, on pourrait œuvrer aux affaires de la psychanalyse si, d’aventure, s’installait cet état de fait.

            Que serait cette instance à l’intérieur de laquelle il faudrait en permanence faire le décompte des forces en présence chaque fois qu’une décision doit être prise ? Que serait une telle instance qui, dans son fonctionnement, devrait intégrer la notion d’opposition ?

            La présence d’une opposition, telle qu’on nous la dessine aujourd’hui, ne permet aucune prise en compte du réel situé au cœur des Écoles et de l’AMP. Il me semble que cette idée est un retour subreptice du maître. Un retour clandestin qui, au nom du respect de la divergence des points de vue réunis en une opposition, fait passer à la trappe l’impossible inhérent au groupe. Cela reviendrait, si une pareille idée trouvait à se concrétiser, à prendre une direction tout à fait contraire à l’orientation lacanienne.

 

Gabriel Lombardi - Gabriel Lombardi, de la Escuela de Orientación Lacaniana. También profesor en la Universidad de Buenos Aires. Es por eso que ya he sido hoy calificado de universitario. Bien, cuando uno dice esa palabra entre analistas, la voz se va. Sin embargo, yo no tengo aquí nada que decir desde el punto de vista de un profesor universitario. Bien por el contrario, tengo cosas que no sé, preguntas que quiero compartir con ustedes, que en estas circunstancias me parecen importantes e interesantes también, donde creo que nos estamos dando espacio para preguntarnos en qué consistiría una Escuela de enunciación, o un conjunto de Escuelas como la AMP y la enunciación, y que no sea la enunciación de Uno solo, donde lo que uno dice, que no sea ese Uno solo, pueda también tener alguna consecuencia, y que no esté todo decidido de antemano y que se compruebe si está sobre la base, por ejemplo hoy en la Gran Conversación de Barcelona, que no se compruebe si está sobre la base de que por ejemplo ya está prácticamente, como me decía hoy alguien a la tarde, ya está prácticamente fundada la Escuela Única, sin que la mayoría haya participado ni de la deliberación ni de la decisión.

            Me parece entonces, que personalmente me siento en un momento más de reflexión que de conclusión, y me parecería muy interesante que sea a partir de este tipo de conversaciones que una instancia psicoanalítica que tienen derecho a tener la palabra, a sostener lo que dicen a partir de su enunciación, me parecería interesante que surja de la lógica de lo que se va elaborando aquí y no de la enunciación de uno solo. Aún cuando, respecto del Uno solo, yo puedo tener - lo voy a nombrar ahora porque se trata de un agradecimiento y un reconocimiento personal - puedo tener un gran reconocimiento y un gran agradecimiento personal. Así como también en mi historia y en mi acercamiento al psicoanálisis existió, no directamente Masotta, sino Masotta a través de Germán García, a través de Juan Carlos Indart, fue por quien conocí los textos de Lacan y de Freud, y después recién llegó para mí el Campo Freudiano con todo lo que me ha permitido transmitir de un modo muy universitario que es el principio. Que se me diga y que se diga a otros colegas universitario en este contexto, me parece una descalificación, me parece como una manera de no tener derecho a hablar.

            Que se nos diga también que pertenecemos a un grupo y a una oposición, me parece que también puede ir en el mismo sentido, en un momento en que a lo mejor se trata de interrogar otra cosa. Se trata de interrogar, a lo mejor, la orientación misma que sostiene este conjunto de Escuelas. A lo mejor los síntomas, de los que venimos hablando, de los que yo personalmente he hablado también en Internet, no se refieren solamente a una sola persona, a una sola enunciación. A lo mejor los síntomas tienen que ver con la estructura misma que estamos en este momento interrogando.

            Para mí es, incluso, la enunciación, perdón, la orientación, la orientación en este momento pensarla como la orientación lacaniana única, hacia un real único, sea una orientación que tiene algo de equivocado y que hay que revisar. A lo mejor una asociación de Escuelas montada sobre el eslogan: "El Otro que no existe", existen sí los síntomas, el partenaire-síntoma, pero el Otro no existe, es algo que también debería ser revisado.

Personalmente me he preguntado sobre eso y he consultado los textos. He visto, por ejemplo, que Lacan fundó la Escuela Freudiana de París y produjo su Proposición sobre la base de una disyunción entre S1 y S2, una disyunción entre saber y poder. Y que esa disyunción parece que es fundamental, era verdaderamente fundamental. Pensaba que la noción misma de Escuela dependía de eso, de la disyunción entre jerarquía y gradus.

            Entonces, ¿cómo resituar esta circunstancia en la cual vemos que hay algo del Otro que no existe, que se traduce en segregación, en insultos, en distintos síntomas?. He revisado también otros textos de Lacan y por ejemplo me encontré con todos los desarrollos que él hace a partir del Seminario de La lógica del fantasma donde ubica al Otro que no existe como lo que ocurre en el nivel de la alienación, es decir en el nivel del Uno, del Uno que se repite, mientras que después, él propone una segunda etapa en la construcción de ese sujeto, que es la etapa de la separación, y que no es del alejamiento, no es de la ruptura ni la disolución, es el momento más bien de la disyunción, de la intersección con el Otro, que incluso es una intersección vacía.

            Yo creo que tenemos derecho a seguir interrogándonos cómo lograr que en la AMP entonces el Otro exista, cómo lograr que en la AMP no se trate al grupo por la segregación o por otros procedimientos, tales como hacer como que no existe. Personalmente no deseo la escisión, no deseo tampoco plantearlo en términos de guerra, no deseo retirar los alumnos. Deseo una AMP en que el Otro pueda ser tolerado, en que las divergencias puedan existir incluso en los Consejos estatutarios y en los Carteles del Pase.

            Personalmente anhelo, para concluir, una Escuela donde la divisa lacaniana scilicet: "está permitido saber", tenga la vigencia que exige el oxymoron del deseo para expresarse, en el intervalo que lo imposible cava entre poder y saber. Y para ello no desdeñaría nada que nos impida iluminar la noche conceptual que se arma cuando nos aburrimos con producciones acompasadas. Necesitamos la disyunción, hasta podríamos dejar que nos enseñe sobre la disyunción el hombre ya humillado por la senectud y, como Milton, por la ceguera, el bibliotecario Borges, que antes de morir encontró el brío de estos versos que nunca pudo escribir, sólo dictar a la caridad de una mano ajena, para retomar el tema del amor planteado por Lilia Mahjoub. “Nadie rebaje a lágrima o reproche esta divagación de la maestría de Dios que con magnífica ironía me dio a la vez los libros y la noche”.

 

Colette Soler - Je voudrais dire trois choses ; j'ai redemandé la parole, surtout parce que j'ai oublié un point que j'avais l'intention de dire tout à l'heure.

            La première, c'est qu'on ne peut pas parler sans faire de métaphore et dès qu'on fait des métaphores, on ne sait jamais où elles vous mènent. Voyez par exemple, vous utilisez la métaphore de la grenouille et du boeuf, et, aussitôt, le taureau est dans la métonymie. De même pour le Titanic, on y est revenu tout à l'heure avec le poème sur la banquise. J'ai été très surprise de cette métaphore du Titanic, parce qu'il est notoire, on le sait aujourd'hui, et le film récent nous a fait nous en souvenir, que le Titanic a coulé par la faute du capitaine, de la gloriole de son capitaine. C'est comme ça que ça s'est passé : métaphore dangereuse tout de même.

            Alors, deuxième point : j'ai dit en effet, que nous comptions sur le Un pour unifier les exceptions. On objecte à cette expression, Laurent a objecté : je suis d'autant plus d'accord avec l'objection que ce qu'il m'a objecté, je l'ai moi-même développé dans ma première lettre, disant que le ciment réel de notre communauté ce n'est pas le Un d'exception, mais un certain rapport au réel auquel conduit l'analyse et qui tient au fait que les différents sujets ont traversé jusqu'à un certain terme l'expérience de l'analyse. C'est ça qui, au fond, me paraît être le véritable élément unaire de la communauté. Alors, quand je dis “ le Un unifie les exceptions ”, je ne veux pas dire par là qu'il les ramène à l'homogène. Je désigne le registre de notre pratique où les directives de l'Un nous permettent de nous accorder sur des objectifs précis.

            Alors, deux exemples évidents : comment tous ces sujets si différents de la grande AMP passeraient-ils une année et plus à tous parler de “ l'inconscient interprète ”, si la thèse n'avait pas été avancée comme une directive pour le travail? Il n'y a rien à redire à cela, mais c'est ce que j'appelle un effet d'unification pratique dans le domaine de la pensée.

            Autre exemple : comment tout le monde se mettrait-il à réfléchir sur la reconquête de l'IPA — là c'est une expression qu'il faut peut-être corriger : ce sont de nouveaux contacts avec l'IPA, dit-on —, s'il n'y avait pas eu une directive? Alors, va-t-on me contester qu'il y a, à ce niveau, unification? Ça me paraît d'une évidence telle ! C'est au point que Jacques-Alain Miller lui-même, dans les Dépêches qui ont précédé la Rencontre de 96, avait cru devoir soulever le problème de la saturation possible sur les thèmes lancés pour préparer la Rencontre.

            Je soutiens donc qu'il y a un effet d'unification pratique grâce aux directives de l'Un. Alors, si l'on veut évaluer les avantages et les inconvénients, l'avantage on le voit facilement : ça permet à des personnes très différentes de faire converger leur travail, d'en parler ensemble, etc. Et ça contribue, en outre, au lien, au sens le plus positif du terme. L’inconvénient, la limite, c'est peut-être ce qui fait que Pierre Bruno se trouve induit à évoquer un effet “ éducatif ”. En effet, l'inconvénient du régime des directives, c'est qu'effectivement ça invite à s'en remettre à l'Autre. C'est une bonne disposition en soi de s'en remettre à l'Autre, mais on s'allège soi-même d'autant. Au lieu d'évoquer un effet éducatif, j'aurais plutôt évoqué, je l'ai déjà fait, un effet d'immaturité. Ça peut paraître paradoxal, car nous avons une communauté qui est remarquablement performante pour toutes les activités qui consistent à affirmer une présence dans le monde, un dynamisme et je dirais un désir qui entraîne.

            Regardez ici, cette Rencontre, c'est un travail énorme, parfait, remarquable, les affiches, les volumes, les brochures, l'effet rassemblement, etc. Cependant, par ailleurs, malgré tous les espaces d'interlocution qui se sont développés dans notre communauté — Dieu sait s'il y en a depuis deux ans, avec les Conversations, en particulier —, malgré tous ces espaces d'interlocution, le plus souvent nous discutons sur des conclusions déjà là. Nous ne discutons pas pour élaborer une conclusion dans un travail collectif, le plus souvent, nous avons déjà la conclusion, nous avons déjà la thèse, qu'elle soit au niveau de la théorie ou au niveau de la pratique, et nous débattons en quelque sorte pour l'assimiler, la comprendre, la justifier, la diffuser. Alors je dis que la contrepartie, c'est l'effet d'immaturité au niveau des décisions de pensée. C'est comme ça que j'interprète ce que beaucoup m'ont dit quand j'ai avancé qu'il faudrait que les Écoles orientent l'AMP : mais vous n'y pensez pas, ils en sont incapables — sans Jacques-Alain Miller, nos Conseils, comment y arriveraient-ils? Eh bien ! moi, je devais avoir des Conseils une plus haute opinion qu'on s'imagine, parce que je pense que les Conseils, ou d'autres instances d'ailleurs, peuvent avoir des idées bonnes sur la direction de l'ensemble. Ça devrait être, en tout cas.

            Enfin, troisième point, rapidement, parce que c'est ce que j'avais oublié tout à l'heure. Je vais vous parler de Los Cubanos. Quand j'ai appris que ma proposition ne serait pas en débat, c'était dimanche, j'ai décidé d'inviter ceux qui pensent qu'il y a des problèmes à discuter et qui veulent les analyser — en analyser l'origine, la nature, pour apporter des solutions possibles —, je les ai invités à se réunir. J'ai fait ça dans la hâte, dans l'improvisation. Certains m'ont déjà reproché de ne pas les avoir prévenus, mais je ne vois pas comment je l'aurais fait, je ne savais même pas si ça pouvait se faire, et finalement une première réunion s'est tenue avant-hier soir à l'hôtel La Habana. Jacques-Alain Miller, aussitôt, du fait que c'était à l'hôtel La Habana, a qualifié les participants de “ Cubanos ”. Eh bien, je trouve que ça me convient, les Cubains, parce que Cuba, ça évoque beaucoup de choses, pas toutes positives, mais au départ ce fut l'aspiration révolutionnaire. Lacan a pu dire beaucoup de mal de la Révolution, mais quand même, en 1966, il faisait du révolutionnaire l'une des trois figures qui nous reste de l'homme de vérité. Alors, la vérité, comme premier pas, ça me paraît très bien. Dans la psychanalyse, la quête de la vérité n'est que le premier pas, nous savons qu'il faut aller au-delà, que nous visons au-delà de la vérité, un réel, mais sans premier pas, pas de second, ni de troisième!

            Il ne s'agit pas de réunions secrètes, il ne s'agit pas de réunions de factions. Qui peut venir? Tous ceux qui veulent réfléchir sur l'état de notre communauté. Qui en serait exclu? Personne en droit, seulement ceux, en fait, qui auraient d'après leur expérience et leur place, déjà conclu que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. Les autres y ont leur place. [Applaudissements]

 

(Jacques-Alain Miller qui était assis dans la salle revient à la tribune)

 

Sérgio Laia - Primeiramente gostaria de reforçar as palavras de Marcus André Vieira, que falou ha pouco. De fato, não ha conflitos entre a Seção do Rio e a Seção de Minas Gerais. O que está acontecendo, e isso desde ha muito tempo, antes mesmo da criação da AMP, é sim, uma certa discussão em torno do seminário de Antônio Quinet em Minas ¾trata-se de um problema antigo para a EBP-Minas Gerais e as intervenções recentes de Miller nos tem permitido resolve-lo.

            Em segundo lugar, gostaria também de trazer uma espécie de testemunho. Parece-me estranho falar de uma posição monolítica e tirânica do Delegado Geral, na medida em que o que tenho podido experimentar no Brasil, inclusive antes da própria construção da EBP, é o quanto as intervenções de Miller promovem uma abertura das discussões e das posições diferentes, ou seja, algo bem diferente de uma espécie de vetorialização ou unificação tirânica.

            O que me espanta nessa atribuição que alguns fazem a ele  de uma posição monolítica é o quanto essas pessoas parecem desconhecer tanto o que tem acontecido nos últimos meses da Internet quanto o fato de que a Internet, pelas suas próprias características, não consegue ser monopolizadora de qualquer tipo de debate, pois ¾desde que qualquer um tenha acesso aos provedores e, no nosso caso, também às listas¾ qualquer um pode intervir sem qualquer tipo de censura.

            Como um terceiro ponto, penso que aqueles que defendem essa idéia de uma tirania personificada em Jacques-Alain Miller não suportam exatamente o que ele mesmo chamou aqui de sua paixão, de seu pecado. Parece-me estranho, inclusive, que analistas possam lidar tão mal com algo da ordem da paixão, do pecado ou mesmo com o advento de uma  quebra do protocolo.

            O que esses colegas não suportam é quando Miller não se apresenta, por exemplo, como um Chefe de Estado que tem toda uma hierarquia a cumprir ¾ é inconcebível para eles que Miller apareça com sua paixão e, quando isso acontece, como nesse caso da TIRADE, esses colegas preferem acusa-lo de tirania.

            O que Miller chamou de retorno do múltiplo na AMP, e mais particularmente na EBP, me parece ser uma tendência bem evidente. De fato, os efeitos de grupo sempre vão existir, eles fazem parte de um certo real de nossa experiência institucional. Mas o que acho que está em discussão, o que não e possível persistir e tem de ser tratado é uma certa grupalização, um certa tendência desses efeitos de grupo se consolidarem em grupos efetivos.

            Por exemplo, me chama a atenção, ainda não conseguir entender muito bem o fato de que, no momento em que a Conversação da AMP acontecia no Rio de Janeiro ha algumas semanas atrás, nos recebemos pela Internet a carta que foi intitulada "Não iremos a Toulouse" e que, após essa Conversação, outra vez pela Internet, mas só em francês e só publicada na AMP-Messager, saiu a demissão de Antônio Quinet da Diretoria da EBP. Ou seja, me parece muito estranho que Quinet tenha feito circular essa demissão, por escrito, na lista francesa e não nas outras listas da AMP.

            Por fim eu gostaria de fazer um pequeno comentário, já que se falou do perigo da metáfora do Titanic. Eu não a apreendi pelo viés do fracasso daqueles que dirigem, porque eu acho que ela surge no momento em que a gente vive esse sucesso extraordinário do filme Titanic. Então, me parece que é nesse contexto muito mais do filme do que propriamente da tragédia, do acontecimento histórico, que a metáfora deve ser tomada. Assim, me parece interessante que, por exemplo, haja uma entrevista do diretor desse filme onde ele nos conta que todo o seu desafio para fazer esse filme era exatamente o seguinte :

            como contar uma historia da qual todo mundo sabia o que ia acontecer? como tornar essa historia interessante para as pessoas que já sabiam dela? como transformar o já-sabido em algo agalmático. Nos nossos termos, poderíamos dizer também: como fazer de um fracasso um sucesso, ou seja, um procedimento que nos aproxima de uma "política do Witz". Assim, Cameron, o diretor, inventou esse artificio de colocar nessa historia que todo mundo já conhecia uma historia de amor. Logo, se por um lado, em termos do comandante do navio, do ponto de vista histórico, ha um fracasso, por outro lado, se a gente retoma o Titanic no contexto do filme, o que a gente vê é como que alguém que dirige faz do fracasso um certo sucesso criando, a partir desse fracasso, uma coisa que não estava prevista no script, no protocolo já dado pela história.

            Obrigado.

 

Jacques-Alain Miller - Je vais dire un mot. Colette Soler a tout à fait tort de penser que mon opinion serait toujours déjà arrêtée, et que les Conversations ne servent à rien. Les Conversations me servent beaucoup au contraire.

            Colette Soler critique ce qu’elle appelle les directives. Elle voit dans le fait que, quand je formule “ l’inconscient interprète ”, on travaille sur ce point, l’effet d’une directive qui serait dommageable.

            Je ferai remarquer d’abord qu’elle a été la première à être tellement d’accord avec l’inconscient interprète qu’elle a dit “ tout le monde est d’accord avec ça ”, et c’est même à ça que j’avais réagi. Mais avec ce genre de critique on ne pourrait même pas se réunir sur le thème du “ partenaire-symptôme ” ! Ce genre de critique rend impossible ce type de rendez-vous et de travail en commun dont nous attendons quelque chose. On pourrait peut-être se réunir sur des thèmes comme “ le transfert ”, “ l’inconscient ”, “ Freud et Lacan ”, comme nous l’avons parfois fait dans le passé, mais on ne pourrait pas se réunir sur des thèmes comme “ le partenaire-symptôme ”.

            Je n’aime pas entendre dans la bouche de Colette Soler le mépris pour les affiches, les merveilleux résultats, etc, parce que, depuis le début, dans le Champ freudien nous sommes des militants. Et c’était dans la Nébuleuse qu’on nous critiquait d’être des militants.

            Troisièmement, à qui fera-t-on croire que c’est un simple groupe de réflexions qui se réunit à l’hôtel Havana?

            Quatrièmement, Pierre Bruno pourrait donner une pensée au fait qu’il y ait un Conseil de quinze personnes, et que treize, qui n’étaient pas du tout sur les mêmes positions il y a un an, se sont réunis, et par rapport à leurs deux collègues toulousains. Le Conseil de l’Ecole de la Cause freudienne l’année dernière était un Conseil très divers, avec beaucoup de nuances : par quelle opération est-il devenu en six mois soudé pour réagir comme il l’a fait ? Peut-être faut-il donner une pensée à cela.

 

            Alors, en effet nous sommes là devant des positions qui ne sont pas claires. On ne saisit pas des thèses. Mais ce qui m’est devenu clair au terme de cette journée, c’est que ces collègues - je ne sais pas comment les appeler, je ne dis pas “ une opposition ”, puisqu’ils refusent d’être une opposition -, ces collègues ont des positions que l’on appelle, dans les organisations politiques que Pierre Bruno connaît bien, des positions de liquidation. C’est-à-dire qu’à suivre la critique de l’un, la critique de l’autre, trop de directives, pas assez de ceci, pas assez de cela, on terminera par la liquidation de l’AMP. Et donc, ma position est maintenant tout à fait arrêtée là-dessus : j’entends empêcher la liquidation de l’AMP par ces collègues. Ils m’ont cherché, ils m’ont déjà trouvé une fois, ils vont maintenant me trouver une deuxième fois. Je considère qu’ils sont sur des positions exactement liquidatrices.

            Je ne suis pas sûr de pouvoir empêcher la dissolution de l’AMP. Parce qu’en effet, si ça continue encore comme ça pendant deux mois, six mois, un an, tout le monde voudra en finir avec l’AMP.

            Mais en tous les cas j’empêcherai la liquidation du mouvement lacanien. Je l’empêcherai en respectant les statuts à la lettre, mais en étant absolument déterminé à repousser ceux qui doivent savoir en leur for intérieur à quel point ils sont inauthentiques.

            Nous avons été, Pierre Bruno et moi, oui, en 1964, dans le même congrès politique. Mais lui est resté là-dedans. Moi je suis passé chez Lacan. Il y aura toujours entre nous, je l’espère, du respect, de l’estime, de la parole, mais il y aura toujours entre nous, Pierre, cette différence, et vous ne la comblerez jamais. Et ce n’est pas en m’imputant l’éducatif que vous ferez oubli. Quelles sont vos attaches? Je trouve inauthentique votre position, profondément inauthentique.

            Colette Soler trouvait très bien ce que j’ai fait, ce que je faisais, la manière dont je le faisais, quand elle en partageait l’éclat.

 

            Demain j’aurai à parler en tant que délégué général à la fin de son mandat et en tant que candidat à diriger l’AMP pour les deux prochaines années.

            Ce qui orientera mon discours, qui sera sans doute un peu long, qui est presque entièrement écrit — mais la conclusion ne l’est pas jusqu’à présent —, c’est la décision de mener le mouvement lacanien en avant vers plus d’unité, de force, de capacité, de puissance, afin que, dans les premières années du XXIe siècle, nous puissions enfin nous affronter à ceux qui occupent le champ freudien. C’est de cela qu’il s’agit.

            Quant aux obstacles actuels qui se présentent apparemment dans notre groupe, je l’ai déjà dit dans une préface que j’ai écrite il y a quelques jours : bientôt, cela n’apparaîtra plus qu’un petit avatar.

 

***

            Ecoutez, il est huit heures du soir, c’était la limite qu’on m’avait donnée pour l’occupation de la salle. Si vous voulez bien, pour ce qui est des membres de l’AMP, ils pourront continuer à parler au cours de l’Assemblée générale.

 

***

Fin

de la Grande Conversation

de Barcelone

 

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